“Le Space opera désigne une sous catégorie littéraire et cinématographique de science fiction consacrée aux voyages dans l’espace, à l’exploration des planètes mais aussi à la description de civilisations intergalactiques.”, La cinémathèque française .
Présent dès les premiers balbutiements du cinématographe (coucou George Méliès et Fritz Lang), le space opéra est un devenu un incontournable du cinéma de science fiction mainstream. Gravity (Alfonso Cuaron, 2013), Interstellar (Christopher Nolan, 2014), Les Gardiens de la Galaxie (James Gunn, 2014) ou encore Seul sur Mars (Ridley Scott, 2015) ont fait se renouveler (ou presque) un genre un peu oublié. Les avancées autour de l’exploration spatiale (coucou Elon Musk) ont, en effet, ravivé un certain engouement du public pour l’exploration spatiale. Le space opéra fait cependant partie intégrante du cinéma tant dans son esthétique, ses thématiques et surtout son histoire. Depuis Le Voyage dans la Lune (George Méliès, 1902), l’aventure spatiale n’a cessé d’inspirer nombre d’œuvres cultissimes comme 2001, l’Odyssée de l’Espace (Stanley Kubrick, 1968), Alien, le huitième passager (Ridley Scott, 1979), Dune (David Lynch, 1984), Solaris (Andreï Tarkovski, 1972)…
Si il peut se voir comme un genre extrêmement visuel, le space opéra ça s’écoute aussi. Musique non diégétique ou bruitages, synthétiseur ou orchestre, la musique n’a rien perdu de sa place de choix dans ce qui est le plus récent des arts de la représentation. Tout comme pour le théâtre ou l’opéra (justement) la musique fait toujours partie intégrante de l’œuvre, de l’histoire, du spectacle et du message transmis. Petit saut dans l’hyper créativité du space opéra…
La musique qui raconte
Le space opéra traite d’exploration spatiale. Jusque là, vous suivez ? Il s’intéresse aussi et en premier plan à l’Homme. Le space opéra, en effet, c’est aussi beaucoup de huis clos, de milieux hostiles et de dilemmes à résoudre. Un contexte privilégié pour le développement d’intrigues à base de trahison, d’amour, de déception ou encore d’injustices. Des intrigues où l’Humanité est passée au scanner, en somme. Des thèmes déjà abordés sur les planches avec le Don Giovanni (Wolfgang Amadeus Mozart, 1787) ou Carmen (George Bizet, 1875) (dé)placés dans un cadre futuriste à la manière d’un Hamlet post (post post x5) moderne. “Etre ou ne pas être ?”, “se sacrifier ou se cacher ?”, “Qui suis-je ? Qui es-tu ?” sont autant de questions qui façonnent le rythme des opéras, qu’ils soient spatiaux ou non, depuis des siècles.
Ce qui rapproche le genre du space opéra de l’opéra, également, c’est avant tout le lien fort qui unit musique et histoire. Celui-ci s’exprime ici par les bruitages et autres expérimentations pour nous faire entendre un monde dont on ne sait encore rien.
L’usage de la musique est, de plus, largement utilisé comme un véritable support de l’intrigue. La technique du leitmotiv, par exemple, très répandue aujourd’hui, fut modernisée par John Williams lorsqu’il s’attelle à la bande originale d’un certain Star Wars : Un nouvel espoir (George Lucas, 1977). En bref, un leitmotiv est un thème musical attaché à un personnage, un couple ou encore un lieu. Ils sont utilisés depuis des décennies par les compositeurs. Williams, donc, s’intéresse à ce concept mais leur apporte un twist plus moderne pour le grand écran. Il s’inspire, en effet, de Wagner qui fait évoluer les thèmes (qu’on appelle parfois motifs) au fil de l’histoire. Le thème d’Anakin Skywalker, par exemple, s’adapte aux différentes étapes de sa vie, de jeune garçon au cœur pur sur Tatooine au padawan ambitieux jusqu’à son passage du côté obscur. Il est à noter aussi que les thèmes de Leia et Luc sont issus de celui de leurs parents.
La musique comme vocabulaire
La musique est donc un élément indissociable du space opéra. Elle est un véritable outil qui soutient l’intrigue bien plus qu’une simple décoration. Il s’agit ici de faire ressentir des espaces que nous ne connaissons pas encore, d’imaginer et de transmettre des sensations qui nous sont encore inconnues. Le genre du space opéra, et la science-fiction en général, c’est avant tout de l’exploration et des expérimentations tant à l’écran qu’en pré ou post production. C’est donc le lieu des expérimentations sonores par excellence. Bruitages et sons électroniques se mêlent à la musique orchestrale pour tenter de créer plus qu’un son, une sensation, un rêve. Que l’on soit de ceux qui penchent pour la véracité scientifique ou pour une exploration plus libre, le son permet, pour reprendre l’expression de Michel Chion, de créer un vocabulaire du vide, des étoiles et de l’infini.
Les “canons” (ou classiques) de la musique figure le message voire même le leitmotiv de l’Humanité en tant que civilisation dans ce milieu hostile que représente l’univers.
L’opéra, qu’il soit spatial ou non, s’attache au concept de la catharsis, du pathos et de pas mal d’autres concepts, grecs ou non, à propos de l’exploration de l’âme de l’Humanité. Car c’est bien de cela qu’il s’agit finalement, découvrir qui nous sommes en tant qu’être, en tant que civilisation sur un petit caillou perdu dans l’univers. Le dormeur doit se réveiller comme on dit (si vous avez pas la ref, réparez cette abomination tout de suite).
“Mozart vient ainsi résonner quelque part hors de la Terre, dans un lieu de préférence hostile pour faire entendre un accent d’humanité, et mettre en valeur le fait que le cosmos nous ignore et que la plus belle et rassérénante musique n’est qu’une faible lumière que nous devons emporter dans l’espace”, Des sons dans l’espace : A l’écoute du space opéra, Michel Chion