“Kill, kill, kill !”, c’est par ce cri que débute l’émeute à Springfield dans Les Simpsons, le film (David Silverman, 2007). Une émeute c’est impressionnant, effrayant, grisant … C’est tout cela mais c’est surtout l’expression de la colère collective. C’est une rage trop longtemps contenue, sous jacente, qui explose et détruit. L’émeute est bien souvent décrite comme le chaos déchaîné sur Terre. Elle est, parfois aussi, le mal nécessaire, la destruction pour mieux reconstruire.
A l’écran, elle peut être un outil puissant. Qui n’a jamais eu envie de monter à la barricade suite à une telle scène ? Une question se pose cependant : Comment filmer le chaos ? Comment en retranscrire surtout le sens du collectif ?
Le visage de la colère
Le Larousse définit le phénomène comme un soulèvement populaire généralement spontané et non organisé, mouvement, agitation, explosion de violence.
Le terme de mouvement n’est pas anodin. C’est une explosion certes, mais qui résulte d’un besoin (certain ou ressenti) de passer à l’action. Le peuple trop longtemps enchaîné choisit de se faire justice. Elle devient foule déchaînée.
C’est la colère dans son côté le plus social. Un mouvement par lequel les individus disparates ne sont plus qu’un tout en étant multiple. Les participants par ce formidable élan d’appartenance deviennent entité : l’Emeute.
Filmer le chaos
Deux grandes problématiques entrent alors en jeu lorsqu’il s’agit de filmer le phénomène. La première est purement technique. C’est une explosion de violence. Quels moyens mettre en place alors pour rapporter des images depuis l’oeil du cyclone ?
La seconde est plus théorique et esthétique. Que montrer et surtout comment le montrer ? Un plan depuis l’hélico TV ne traduira pas la même chose que des images des participants face à la police. Le contexte même dans lequel l’émeute l’inscrit dans le message final. Est ce un documentaire ? Une fiction d’émancipation ?
L’émeute c’est une explosion sociale, certes, mais non moins violente. Le principal risque est alors de romancer un tel phénomène.
Raciale, politique ou même manipulée, l’émeute est de plus en plus représentée en salle.
Voici une petite liste (non exhaustive) des plus célèbres de ces retranscriptions :
. Kings, Deniz Gamze Erguven (2018)
Le film retrace le procès de Rodney Kings et des événements qui ont menés aux émeutes de 1992 à Los Angeles sous le prisme d’une résidente de la ville des Anges.
. Do the Right Things, Spike Lee (1989)
Lee retrace une journée estivale dans son quartier d’enfance, Brooklyn. La chaleur ambiante va très vite faire monter la tension.
. Joker, Todd Philipps (2019)
Dans un contexte socio économique tendu, le Gotham pré Batman est en proie à de grosses disparités sociales. La ville est une vraie poudrière. L’action remarquée de celui qui se fait appelé “Joker” en direct ne fera que mettre un visage sur la colère ambiante et met le feu aux poudres.
. V pour Vendetta, James McTeigue (2006)
Est il besoin de le présenter ? Vraiment !
Le film montre, à l’égal de Joker, comment une personne peut devenir le visage de la colère et ainsi personnifier la rébellion. Il indique cependant aussi comment par la manipulation d’images et autres stratégies, on peut manipuler l’opinion pour l’amener à se soulever.
. Détroit, Kathryn Bigelow (2017)
Inspiré de faits réels, le film raconte les événements de l’été 1967 aux USA. Le contexte est fortement tendu entre la guerre au Vietnam vu par la population comme une intervention colonialiste et la ségrégation raciale. Les événements de l’Algiers Motel à Detroit vont alors mener à ce qui est à ce jour, l’une des émeutes les plus violentes de l’histoire des Etats Unis.
. What you gonna do when the world’s on fire ?, Roberto Minervini (2018)
Un an après la mort d’Alton Sterling, il s’agit d’un documentaire autour de la communauté Afro Américaine de Baton Rouge (Louisiane, USA) à l’été 2017 alors qu’une série de meurtres violents secoue le pays.