Le 9 novembre 1989, le mur de Berlin s’effondre sous les assauts d’une population en transe. Celui ci séparait depuis 1961 la RDA (République Démocratique Allemande) favorable au bloc soviétique à l’Est et la RFA (République Fédérale Allemande) à l’Ouest.
La frontière officielle des deux blocs est pourtant loin et Berlin-est se retrouve isolée, une île soviétique au beau milieu du bloc de l’Ouest. Si du côté est une garde rapprochée empêche les citoyens de s’en approcher, le côté ouest, quant à lui, fut très rapidement la cible des artistes pro ou amateurs. Les citoyens se l’approprient tout en le dénonçant. Une fois tombé, il y a maintenant, donc, tout juste trente ans, le mur est devenu tout autant une oeuvre de patrimoine et un lieu d’art.
Le Mur de Berlin a ainsi lancé la vague du Border Art. Cette forme d’art à visages multiples (et à business juteux) peut se définir comme “à la fois, l’art sur la frontière, de la frontière, à la frontière” selon Anne Laure Amilhat Szary (Le mur de Berlin, emblème du border art, France culture). La géographe précise que la séparation est de plus en plus représentée au sein de l’art contemporain. La fermeture progressive des frontières inquiète et fait ainsi naître tout une iconographie dénonciatrice. Les murs eux-mêmes deviennent ainsi des symboles non plus de fermetures mais de créativité, d’ouverture d’esprit et de libre expression. L’art démantèle la frontière et “une fois le mur démantelé, il devient symbole de liberté” (Yadegar Asisi).
En 2017, le français JR s’attaque à la frontière USA/Mexique avec la photo géante d’un enfant mexicain.
En 2005, c’était le britannique Banksy qui pris pour toile la frontière israëlo-palestinienne, le Mur de Gaza.
La Grande Muraille de Chine, le Mur d’Hadrien… l’Humanité a toujours usé de murs/frontières. En 1945, toutefois, il en existait à peine une dizaine. De nos jours, c’est plus de 70 qui sont soient déjà construits soient programmés. Ils recouvrent ainsi pour environ 40 000 km, c’est à dire 6 à 8% des frontières terrestres à ce jour. Un fait qui cristallise l’une des plus grandes peurs de la société mondialisée.
Eh bien demandez à Ed Sheeran dans son dernier album intitulé N.6 Collaborations Project sorti en Juillet 2019, qui a décidé de (bien) s’entourer afin de sortir un opus plutôt hétéroclyte.
C’est pour cela qu’en rentrant du travail, écoutant ma radio rock préférée, que ne fut pas ma surprise à l’écoute de BLOW lorsque le speaker m’annonce le nouveau Ed Sheeran. Je tombe des nues car il faudra quand même avouer que le jeune marié Irlandais nous a habitué à de la pop, des ballades, parfois tout de même des airs hip hop ou rap mais pas un bon vieux rock qui donne envie de secouer sa chevelure de tigresse (ou de lion d’ailleurs). Alors pour ce morceau il est entouré de Bruno Mars qu’on ne présente plus et de Chris Stapleton. Ce dernier est une idole aux Etats-Unis, grand chanteur, guitariste et compositeur de country notamment. C’est avec lui que Justin Timberlake a créé Say Something en 2018, on le voit apparaître dans le merveilleux clip (tourné en plan séquence Mesdames et Messieurs ! ) réalisé par la boîte française La Blogothèque ici (le monsieur au chapeau de Cow-Boy c’est Chris):
Bref, des pointures et cela dans son album entier : Khalid, Cardi B, Camila Caballo, Eminem, 50 Cent, Ariana Grande, Skrillex, Travis Scott ou même H.E.R ! Bref, de tous styles, de toutes les couleurs, on aime ou on aime pas, on ne peut pas lui enlever son attractivité (Chanteur solo le mieux payé de l’année 2018 quand même avec pas moins de 110 millions de dollars derrière deux groupes mythiques Coldplay, U2 !)
Pour revenir au titre BLOW, même le clip nous fait rappeler les clips de Glamrock des années 70, plutôt minimaliste dans la mise en scène puisque c’est une fausse captation live du morceau, mais bien sûr léchée et travaillée dans le design des costumes, les plans, les couleurs, l’exposition choisis. Petit girl power en plus car ce sont trois actrices qui représentent les alter egos des trois chanteurs; toujours un peu étrange d’entendre des voix d’hommes sur des lèvres féminines mais elles sont magnifiques et nous donne envie de laisser échapper notre esprit rock’n’roll : sortez les cuirs, les fourrures et les clous !En bref, on sent qu’il s’est bien amusé dans toutes ces collabs que ce soit dans les morceaux ou dans les nombreux clips ! Un album bien évidemment numéro un des ventes à sa sortie aux Etats-Unis, Royaume-Uni ou encore en France. Allez jeter une oreille à l’album si vous vous en sentez même si ce papier n’est pas une promo pour Ed qui n’en a absolument pas besoin. Plutôt un billet de surprise confrontée à BLOW, qui m’a en effet soufflée de stupeur.
Netherfriends by Angie
Encore un dimanche pluvieux, avant une semaine de reprise de cours, de travail, en bref, un dimanche morose. Jusqu’à l’arrivée d’une chanson, de cette chanson : Don’t be a fuck boy d’un certain Netherfriends. Du piano, une instru Soul Trap Rnb accompagnée de parole nous poussant à profiter de la journée et de bien plus : “Give it all you got just have fun, do what you want just don’t be a fuck boy”. Une découverte plus qu’intéressante donnant à cet après-midi tristounet un rayon de soleil.
Derrière le pseudo Netherfriends se trouve Shawn Rosenblatt, producteur, songwriter et artiste basé à Los Angeles. Il s’est lancé un défi relativement impressionnant pour l’année 2019 : sortir un album chaque vendredi, soit cinquante deux albums sur une même année composé d’une dizaine de chansons. Chaque semaine, Shawn nous transporte dans un nouvel univers. Nous allons de Weeds à Songs for flowers tout en passant par Lonely as fuck, Daddy issues, Insecure as fuck, Freckles ou encore, Ghostin’, l’album de la semaine où sont écris ces lignes. Ces “thèmes” sont développés à travers une dizaine de chansons, nous exposant introduction, développement et conclusion du sujet. Ses musiques nous font voyager d’un aspect plus mélancolique à une tonalité joyeuse et dansante procurés par les différents styles musicaux mélangés (Rap, Soul, Blues, Rock Indie..) donnant notamment naissance au Blues Trap ou encore au Country Trap.
Fuck Boy on the Internet, dernier clip posté sur son site, illustre bien le contraste de l’univers de Netherfriends : Shawn, seul dans une rue, de nuit, dansant et fumant, nous invitant à lâcher prise, à nous déconnecter des réseaux sociaux ainsi que du travail pour pouvoir enfin profiter des bons moments de notre vie que le stress ronge. En résumé, une ode à la joie, une invitation à profiter de l’instant présent, de la vie réelle.
Netherfriends nous emmène dans un univers farfelu parsemé d’humour tout en abordant des sujets plus profonds, donnant une touche joyeuse à des thèmes qui le sont moins, un bon moyen de nous montrer que rien n’est tout blanc ou tout noir.
Trick or treat ? Ça y est ! Le grand soir est arrivé. Les portes de l’enfer s’ouvrent et les monstres sont de sortie. Pour fêter ça, la rédac’ vous a préparé une petite liste (non exhaustive) de ses meilleures expériences culturellement monstrueuses. Ne nous remerciez pas.
C :
Sans hésiter: Evil Dead ! Je parle du remake de Fede Alvarez sorti en 2013 pas de ceux des 80’s. Je n’ai jamais vu le film en entier. La bande annonce m’a suffi. Le dernier plan avec la petite fille hante encore pas mal de mes nuits ! Je pense que le contexte de visionnage y est pour beaucoup aussi (la maison de mon meilleur ami, une vieille bâtisse en pierre, centenaire, à côté d’un cimetière). Celles des Annabelle 2 et 3 aussi n’ont pas fait du bien à mon sommeil. La dernière scène de la BA de The Witch par Robert Eggers (2016) m’a pas mal secouée aussi. Pour l’instant, seul le cinéma m’a autant transportée et marquée en ce qui concerne l’épouvante.
M:
Petit retour dans le passé, lorsque j’étais encore jeune et chevelu, un jeu vidéo m’a terrifié autant qu’il m’a fasciné. L’univers de Resident Evil 2 était pour moi le summum de l’horreur. Je me souviens encore des sueurs froides et de la nuit d’angoisse qui a suivie. Le pire c’est que je n’y ai même pas joué! C’est un de mes ainés qui m’y a introduit et je n’ai, encore aujourd’hui, aucune envie de toucher à ce jeu tant il m’a traumatisé à l’époque. Rien de tel qu’un zombie mal placé pour vous mettre la chair de poule.
D:
Il y a peu de série que j’aime autant que les enquêtes, et les plus intéressantes sont celles qui sont psychologiques. Il était donc tout naturel pour moi de me lancer dans la série Hannibal, campé par une flampé d’acteurs de très haute volée et un design léché. La qualité de la série rend le tout réaliste et sombre. Lorsque le personnage de Will ressent la folie et les pulsions des tueurs c’est avec autant d’aisance que je ressens sa confusion et son malhêtre. Une passion dévorante que j’ai du abandonné car je voyais mon comportement lentement changé. Et si je voulais finalement voir le monde avec la simplicité de la pulsion, sombre colère? Une série magistrale qu’il est bon d’apprécier de jour de préférence.
AP: Le film qui m’a traumatisée, personnellement, en tout cas, qui m’a fait littéralement détester les Tic Tac d’horloges c’est le film Saw II. J’étais jeune à l’époque (cherchons une excuse…) et mon oncle et mon frère, friands de ce genre cinématographique, avaient décidé de passer une soirée tranquillou devant un petit DVD (oui, oui) acheté pour l’occasion. Ils m’ont proposé de regarder avec eux. Ne voulant pas passer pour une chochotte du haut de mes 10 ans je décide de prendre mon courage à deux mains en me persuadant que ça ne doit pas être si terrible. Cinq, je crois que je suis restée cinq petites minutes et me suis enfuie jouer à Zoo Tycoon. Le masque de fer à retardateur à eu raison de moi, et j’ai passé un bon bout de temps à enlever les piles de toutes les horloges. Merci Saw.
AM : Le film qui m’a traumatisé sans aucune hésitation restera à jamais Shining de Kubrick ! Alors il faut dire aussi que j’avais 10 ans quand je l’ai vu ! Mais qui ne garde pas un souvenir atroce des jumelles sur leur vélo ou encore de la mare de sang qui dégouline des murs ! Mon dieu j’en tremble encore ! Je me souviens encore avoir couru devant ma salle de bain car on pouvait y voir le rideau de la baignoire dans le fond de la pièce ! Et 18 ans plus tard je n’ai jamais réussi à le revoir ! Peut être que sa suite ( Doctor Sleep) me permettra d’exorciser ma peur !
Ah Halloween ! Ses bonbons, ses déguisements et bien sur ses films d’horreur. A l’approche du 31 octobre, Purple Haze vous propose une sélection (non exhaustive) des séries les plus horrifiques !
Les zombies :
The Walking Dead (2010)
Comment évoquer les zombies sans parler de The Walking dead. Adaptée du comic du même nom publié pour la première fois en 2003, la série prend place lorsque Rick se réveille à l’hôpital après plusieurs mois de coma (les fans du genre auront sûrement comme un sentiment de déjà vu avec 28 jours plus tard, sortie 1 an avant le début des comics) et découvre que le monde a changé. Une guerre semble avoir éclaté, le chaos règne dans les rues et c’est alors qu’il découvre avec stupéfaction que les êtres humains ont changé. Ils sont devenus des monstres. On notera que le terme de “zombie” n’est jamais employé dans la série. Rick part alors à la recherche de sa femme et de son fils à dos de cheval portant son uniforme de shérif. Sur son chemin, il va croiser des zombies et, alors que la mort semble inévitable (à tout point de vue), croise Glenn. Lequel vient à sa rescousse et lui propose de rejoindre son groupe de survivants. Dans un climat de chaos, les hommes doivent réapprendre à vivre et se réorganise ainsi en communauté.
Fear the Walking Dead (2015)
Face au succès de The Walking Dead, un spin off ne tarde pas à voir le jour. Ainsi Fear the
Walking Dead se déroule au moment où l’épidémie est propagée. Les individus ne savent alors pas ce qui se passe ni comment venir à bout de ses monstres qui semblent ne jamais mourir. Nous suivons alors le périple de Madison, conseillère d’orientation dans un lycée de Los Angeles qui élève seule ses deux enfant Alicia, élève brillante et Nick jeune un peu à la dérive qui a sombré dans la drogue. La petite famille voit d’un mauvais oeil la nouvelle histoire d’amour de leur mère avec Chris, professeur dans le même lycée et père divorcé d’un jeune adolescent Chris. C’est donc dans ce contexte que notre famille va tenter de survivre dans un monde qui sombre peu à peu dans le chaos.
I Zombie (2015 – 2019)
Plus légère que les deux précédentes, IZombie raconte l’histoire d’Olivia Moore, une étudiante en médecine qui voit sa vie chamboulée en une soirée. Elle va ainsi être transformée en zombie. A l’inverse des zombies classiques, qui perdent toute fonction cérébrale et n’ont qu’une envie, celle de nous dévorer, Olivia conserve une vie plutôt normale (à ceci près qu’elle se nourrit désormais de cerveaux humains). En effet, elle va devenir médecin légiste ce qui s’avère pratique lorsque l’heure du repas sonne. Pratique ? Et pas qu’un peu ! Cependant, à chaque fois qu’elle dévore le cerveau d’un cadavre, elle aspire les souvenirs de la personne ainsi que ses capacités physiques et mentales. Elle va plutôt mettre ses nouveaux talents au profit de la police et apporter son aide au lieutenant Clive Babineaux.
Les sorcières :
Les Nouvelles Aventures de Sabrina (2018)
Si vous avez grandi dans les années 90, vous vous souvenez sûrement de K2A. Vous savez, cette émission qui passait les samedi et dimanche matins et qui nous diffusait des séries cultes comme Phénomène Raven, Lizzie Maguire ou encore Sabrina, l’apprenti sorcière. Et bien c’est sur cette dernière que nous allons nous pencher. Force est de constater que dans cette nouvelle version de la série, notre sorcière préférée a bien changé. Exit les aventures gentillettes d’une lycéenne un peu naïve. Aujourd’hui les histoires sont plus sombres. En effet, alors qu’elle s’apprête à célébrer son 16ème anniversaire, Sabrina doit faire un choix qui chamboulera sa vie à tout jamais: soit elle décide de se faire baptiser et de devenir membre de la satanique Eglise de la Nuit, soit elle renonce et décide de passer sa vie avec les mortels mais avec des pouvoirs d’une moindre importance. À cela, s’ajoute la menace de Madam Satan qui pèse sur toute sa famille et qui tente par tous les moyens de recruter Sabrina.
Charmed (1998)
Série culte du début des années 2000, Charmed nous raconte l’histoire des trois sœurs Halliwell qui découvrent qu’elles sont sorcières après la mort de leur grand mère. Commencent alors une lutte sans merci contre les forces du mal. Prue, Piper et Phoebe vont devoir apprendre à conjuguer leur nouvelle vie de sorcière avec leur vie de femme indépendante et ambitieuse. Alors oui ! On est d’accord, il ne s’agit pas d’une série d’horreur, mais tout de même on parle de sorcières, de démons et surtout elle reste un grand classique du genre. Enfin, la série aura permis de mettre en lumière des femmes fortes et indépendantes qui n’ont pas besoin d’hommes pour sauver le monde.
Les inclassables :
Buffy contre les vampires (1997)
Autre grand classique de la fin des années 90, Buffy contre les vampires raconte les aventures d’une jeune adolescente qui se voit confier la mission de débarrasser le monde des vampires. Elle est l’Elue, la Tueuse. A ses côtés, deux jeunes un peu naïfs et pas du tout préparés à affronter ces créatures de la nuit, Alex (Xander dans la version anglophone) et Willow. Tous les 3 arpentent les rues de Sunnydale suivant les conseils avisés de l’observateur de Buffy, Gilles. La série met non seulement en avant une femme comme héroïne badass, mais elle est également une des premières à mettre en scène un couple homosexuel. De nombreux thèmes encore tabous aujourd’hui y sont représentés comme la parole d’une femme après une agression qui n’a laissé aucune séquelle physique ou encore le viol. La série met en scène une héroïne qui allie une badass attitude et une certaine fragilité. Si la série est pleine d’humour, elle n’en est pas moins sombre. En effet, Buffy doit jongler entre sa vie d’adolescente, puis d’adulte tout en conjuguant sa vie de Tueuse. Et c’est en cela qu’elle est culte.
Penny Dreadful (2014 – 2016)
L’histoire prend place dans le Londres des années 1891, alors que le ville doit faire face à d’étranges meurtres. Vanessa Ives, une jeune femme qui possède de puissants et hypnotiques pouvoirs va alors mener l’enquête. Pour l’aider dans sa tâche, elle est accompagnée d’Ethan Chandler, un homme rebelle et violent ainsi que de Sir Malcolm, un homme riche d’un certain âge. Ensemble ils vont mener l’enquête pour découvrir quelle est cette menace qui pèse sur la ville de Londres. La série nous plonge alors dans les contes et histoires d’horreur qu’on avait l’habitude de lire à cette époque. Histoires tirées des célèbres revues dites “Penny dreadful” nommées ainsi car elles coûtaient 1 penny et étaient terrifiantes.
American Horror Story (2011)
American horror story est une des premières séries à porter sur l’horreur. Chaque saison nous raconte une nouvelle histoire. Au cours de ses 9 saisons jusqu’ici, la série nous a donc fait plonger au coeur d’une maison hantée, d’un asile un peu particulier, d’un cirque, d’un coven de sorcière, d’un hôtel ou encore d’une secte légèrement réac sur les bords. Et, même si chaque saison est différente, son créateur Ryan Murphy, a reconnu certains liens entre certaines d’entre elles.
Chaque saison explore ainsi un canon horrifique différent. Les 1ère et 6ème saisons par exemple sont le théâtre d’une maison hantée. La deuxième saison (la meilleure !) est l’objet de possession démoniaque. La saison 3, quant à elle, nous plonge dans l’univers d’un coven de sorcière. Et enfin, la dernière en date (diffusé depuis le 18 septembre sur FX) titille notre corde sensible et nous embarque dans un bon vieux slasher des années 90 comme on les aime.
Comme la diversité de cette sélection nous le prouve, l’horreur n’est pas nécessairement dans la peur classique comme on l’entend habituellement. Elle n’est pas toujours synonyme de monstres, de maison hantée ou de possession. Elle se cache également dans notre quotidien. Et c’est surement là qu’elle est la plus effrayante car c’est là qu’on l’attend le moins.
C’est ainsi qu’Emma Larsimon présente Marianne, entité dont elle faisait des cauchemars réguliers à l’adolescence et qui est devenue sa source d’inspiration pour une saga de best-sellers d’horreur pour jeunes adultes. Auteure à succès, antipathique et torturée, Emma décide de mettre un terme aux mésaventures de son héroïne fictive Lizzy Lark combattant la diabolique Marianne et c’est en pleine promotion du tome final qu’on la découvre. Mais la séance de dédicace vire au glauque lorsqu’une amie d’enfance surgit pour lui dire que ses histoires terrifiantes deviennent réelles, et que Marianne n’est pas imaginaire. Si elle commence par renier ces aberrations, une suite d’évènements force Emma à retourner dans son village natal pour y affronter ses démons, autant au sens littéral que figuré. Sortie le Vendredi 13 Septembre 2019, Marianne est donc la nouvelle série d’épouvante de Netflix.
Pourquoi, parmi le très vaste catalogue de la plateforme de streaming, faudrait-il s’arrêter sur cette série ?
Made in France
Tout d’abord, parce que cette série est française. Malheureusement, ce premier argument pourrait en faire fuir certains (peut-on réellement leur en vouloir ?). C’est Samuel Bodin, déjà showrunner de deux séries pour OCS (T.A.N.K. et Lazy Company) qui a réalisé les huit épisodes et les a co-écrit avec le scénariste Quoc Dang Tran. À l’image de son personnage principal Emma, il a sorti la sorcière Marianne de ses cauchemars et gardé l’idée dans un tiroir en attendant un jour l’opportunité de faire un film ou une série d’horreur. Lorsque les producteurs de Netflix ont exprimé leur envie de lire ce type de scénarios, il a sans plus attendre envoyé une petite dizaine de pages racontant son histoire. D’abord refusé puis repêché, le projet Marianne a finalement vu le jour, devenant l’une des rare des séries de genre française actuelle.
* Petite définition : en cinéma et télévision, on parle de genre pour évoquer des films et séries rattachés à un style cinématographique précis tels que les films/séries de science fiction, de guerre, d’action et bien entendu d’horreur avec toutes les sous-catégories que cela implique.
Il est certain qu’avec les productions Netflix comme Marseille ou Family Business qui ont suscité des réactions très mitigées, ou notre bonne vieille Plus Belle La Vie, on a tendance à vouloir ranger toute série française en bas de notre liste des choses à voir. Mais ici on parle bien d’un style qu’on rencontre peu chez nous, et cela a de quoi interpeller.
Et puis, petite fierté pour les bretons parmi nous : la majorité de l’action se déroule dans notre bonne vieille Bretagne, dans la bourgade fictive d’Elden. Et, bien que ce lieu soit effectivement imaginaire, le tournage s’est réellement passé dans le Finistère et les Côtes-d’Armor (à l’exception de quelques scènes tournées en Ile-de-France).
La saison de l’épouvante
Marianne n’est pas seulement française, elle est aussi horrifique. Comme dit plus tôt, c’est une série de genre, appartenant à la grande famille qu’est le registre de l’horreur. Parmi ses innombrables catégories et sous-catégories, on pourrait classer Marianne dans la branche de l’épouvante, c’est-à-dire que la tension naît d’une ambiance angoissante et malsaine, remuant nos peurs profondes plutôt que de miser sur le gore comme les slashers. Avec l’épouvante, vient la notion de surnaturel qui est, bien entendu, omniprésente dans cette série qui parle de sorcellerie et de démons.
Même si c’est une émotion universelle, la peur n’est pas ressentie de la même façon d’un individu à l’autre, donc il est impossible d’affirmer avec certitude que Marianne vous glacera les os. Cependant, les codes de l’horreur comme les portes qui grincent, les murmures dans la pénombre, les silhouettes plus ou moins visibles, toutes ces énormes ficelles que l’on a vu cent fois sont ici redoutablement bien gérées. Samuel Bodin a réussi l’exercice difficile d’appliquer les règles classiques sans faire un copié-collé de déjà-vus ennuyeux. Les premiers épisodes bénéficient par ailleurs d’un véritable atout : l’actrice Mireille Herbstmeyer qui incarne une vieille femme possédée par Marianne. Sa prestation est remarquable, parfois à un cheveux de tomber dans l’excès mais ne franchissant jamais la limite. L’avantage c’est qu’on n’en fait pas d’overdose : sans trop entrer dans les détails, Marianne change d’hôte dans la série et permet un renouvellement. Ainsi, le réalisateur se détache de cet élément phare, un choix courageux lorsqu’on sait que l’angoisse du premier arc repose entièrement sur le jeu flippant de Mireille Herbstmeyer. L’audace fait justement partie des qualités de cette série. S’il existe bel et bien un fil rouge entre les huit épisodes, la mise-en-scène n’est pas identique du début à la fin. On a des scènes d’humour voire loufoques avec l’inspecteur incarné par Albin Lenoir (Kamelott), un épisode qui se passe pendant l’adolescence d’Emma avec une vibe très Stranger Things, des séquences au rythme lent permettant à la tension de traîner douloureusement et d’autres faites d’affrontements et de cascades. La diversité des tons peut ainsi donner l’impression que la série s’éparpille, mais les intentions de Samuel Bodin étaient justement de tenter des choses et d’alterner les ambiances.
Dans ces tentatives, il y a évidemment des faiblesses. Les effets spéciaux et la mise en scène sont parfois maladroits, et le jeu est, pour certains acteurs hésitants au départ. On sent qu’on cherche à trouver ses marques dans ce registre original si rarement proposé en France. Heureusement, la série trouve rapidement ses repères et on a le droit à des scènes très bien réalisées et interprétées avec justesse.
Une touche de féminisme et un peu d’émotion
Enfin, les dernières bonnes raisons de regarder Marianne, c’est son casting féminins. Ce détail a forcément été remarqué et abordé en interview — oui, en 2019 on est encore obligé de demander à quelqu’un pourquoi il y a plus de femmes que d’hommes dans ses personnages principaux… mais passons ! —, et Samuel Bodin a tout simplement répondu qu’il avait eu envie d’écrire une « histoire de femmes ».
Ainsi, l’héroïne féminine affronte une antagoniste féminine, et compte dans ses acolytes son assistante personnelle, son amie d’enfance et sa mère. Il y a des hommes bien entendu dans cette série, mais ce ne sont pas eux qui mènent la danse. Le créateur de Marianne voulait créer des personnages indépendants et forts qui se battent avant tout pour elles-mêmes plutôt que d’être des épouses ou des mères, bref les seconds rôles que l’on donne encore trop souvent aux femmes. Et puis on appréciera le caractère singulier d’Emma : antipathique, moqueuse, insolente, parfois méchante et égoïste, arrogante et alcoolo. En face d’elle, une sorcière cruelle qui investit le corps des gens et les ronge de l’intérieur, capable des pires atrocités. On a donc un duo qui est bien loin des clichés dont on affuble les femmes dans les oeuvres de fiction. Au penchant par conséquent féministe de cette série (sans que cela soit un thème abordé directement dans la narration), on peut aussi noter que ce n’est pas une simple histoire de démons qui fait “bouh” dans le noir. En racontant les aventures d’Emma Larsimon, Samuel Bodin a voulu parler du pardon. En effet, sans expliquer le pourquoi du comment que vous irez découvrir en regardant la série, Emma a coupé les ponts avec ses amis d’enfance et ses parents. La rédemption est la quête inconsciente de la jeune femme en revenant à Elden. De plus, nous abordons ici les destins entremêlés de deux femmes qui ne trouvent pas leur place : que ça soit Emma qui est une éternelle adolescente en rébellion rongée par ses regrets ou Marianne qui n’appartient ni au monde des humains et des vivants, ni à celui des démons et des morts. Ces thématiques permettent alors à Marianne de ne pas être une suite de jumpscares avec un scénario creux, mais une véritable histoire avec du relief.
Marianne: Trick or treat ?
À sa sortie, nombreux sont les médias français qui ont descendu la série. À l’inverse, elle a rencontré un accueil chaleureux à l’international : on ne manquera pas de mentionner que Stephen King, alias le maître de l’horreur, l’a encensée. Pourquoi cette division ? Mon humble avis serait que nous ne sommes pas habitués à voir de l’épouvante à la française, car même si le style de Marianne emprunte énormément aux classiques anglo-saxons, cela reste nos paysages, notre langue et notre french touch qui est à l’écran.
De plus, le genre et plus particulièrement l’horreur ne sont pas des plus populaires chez nous. Cependant, la liberté d’expression entraîne heureusement la diversité d’opinions et certains médias ont salué son audace. Nous vivons une époque où le genre revient sur le devant de la scène et connaît un renouveau : le cinéma d’épouvante et d’auteur aux États-Unis avec des films comme Hérédité, en Corée du Sud avec Un train pour Busan et plus récemment Parasite, dans les séries avec The Haunting of Hill House et American Horror Story, ou des registres plus réalistes avec Mindhunter. Et grâce à Marianne, la France participe à ce mouvement et propose son regard. L’avantage c’est qu’avec ses références aux grands classiques comme L’Exorciste, Seven, Cujo ou encore Ju-On, elle fait des clins d’oeil aux amoureux de l’horreur sans pour autant se fermer aux néophytes. Et que l’on soit un habitué ou non, on saura reconnaître que Samuel Bodin connaît et aime profondément cet univers, et qu’il s’éclate à apporter sa pierre à l’édifice, ce qui apporte toujours un petit quelque chose au visionnage malgré ses évidentes maladresses.
En résumé, je vous recommande Marianne parce que qu’elle vous plaise ou non, que vous soyez terrorisés, émus, divertis, dérangés ou déçus, quelque soit l’opinion ou l’impression qu’elle tirera de vous, elle ne vous laissera pas indifférent, parce que Marianne ne repart jamais sans rien.