Trick or treat ? La saison d’Halloween est là ! Et avec elle ses décorations, costumes et surtout, surtout, ses soirées films d’horreur. Parmi les films cultes de cette saison, on retrouve bien évidemment : Massacre à la tronçonneuse, la série des Evil Dead, des Scream ou encore La nuit des morts vivants. Des titres qui rappelleront sûrement bien des souvenirs.
Le cinéma d’horreur et affiliés connaît un essor dantesque ces dernières années avec notamment le phénomène des séries telles que American Horror Story ou Marianne.
Démons, sorcières et autres spectres peuplent ainsi des scénarios et des univers tous plus horrifico créatifs. Mais s’il est un personnage qui met beaucoup de monde d’accord c’est bien les poupées ! Qu’elles soient décor ou au centre de l’action, ces petites créatures en appellent à une peur qui, plus qu’instinctive, réveille notre intime. Deux sorties en salles lui sont consacrées en cette année 2019, le reboot de Chucky, Child’s Play: la poupée du mal par Lars Klevberg et Annabelle 3: la maison du mal par Gary Dauberman. L’occasion de s’intéresser de plus près à ces jouets pas si innocents que cela.
L’horreur sur nos écrans
Avant toute chose, petits secrets (pas si secrets) d’histoire :
L’épouvante et le cinéma ont été dès le début presque indissociables. Notons le sursaut de panique des premiers spectateurs de l’Arrivée d’un train en gare de la Ciotat (Les frères Lumières, 1896). D’abord attraction à sensation puis divertissement des masses, le cinématographe se convertit très rapidement à l’horreur via une ambiance macabre comme, par exemple, le muet Les Vampires (L.Feuillade, 1915).
C’est grâce à l’expressionnisme allemand qui le fera genre à part entière grâce à des oeuvres aujourd’hui classiques. Nosferatu le vampire (F.W.Murnau, 1922) et Le Cabinet du Docteur Caligari (R.Wiene, 1920) en tête, lesquels sont bien souvent considéré comme les premiers films d’horreur.
Le terme “horror movies” ne verra le jour qu’en 1931 cependant avec l’adaptation du roman de Bram Stocker, Dracula, par Tod Browning avec Bela Lugosi dans le rôle principal. Son producteur Universal Pictures sortira très vite deux autres films du genre qui rencontreront également un grand succès. Celui ci poussera alors la firme à produire une série d’autres films de monstres, les “Universal Monsters” (1932/1948).
Si l’horreur subie beaucoup de censure et fut notamment cible privilégiée du code Hays, son panthéon ne cesse de s’accroître d’année en année.
Il est à noter que le terme de cinéma d’horreur regroupe plusieurs sous genre. Lesquels n’appuie pas tous sur la même corde (sensible). Les choix de mise en scène mais aussi le caractère personnel de la peur influe sur notre perception à l’écran.
On distingue ainsi :
. l’épouvante qui appuie sur son ambiance malsaine
. le slasher qui met en scène un tueur psychopathe (souvent masqué) qui persécute un groupe (genre plutôt américain et qui peut s’apparenter à notre “film de psychopathe”)
. le gore et ses scènes extrêmement sanglantes et très explicites dont l’objectif est de provoquer le dégoût chez le spectateur voire, parfois, le rire assumé tant l’explicite est “gros”
. le found footage, genre récent, qui est monté (comme son nom l’indique) à partir de rushs “trouvées” et qui joue sur une apparence de réalité. Laquelle est bien souvent renforcée par un carton au début du film qui indique le caractère “amateur” des images sur lesquelles on ne voit pas grand chose mais c’est justement de là que naît la tension
Jump scare et autres peurs bleues
Le cinéma cherche à créer une émotion chez le spectateur. Dans le cas du film d’horreur, sans grande surprise, ces émotions sont la peur et le dégoût.
Selon notre très chère Wikipédia, “la peur est une émotion ressentie généralement en présence ou dans la perspective d’un danger ou d’une menace. (…) Par extension, le terme peut désigner l’appréhension liée à des situations déplaisantes ou à des animaux. Il est alors question de phobie, du grec phobos, comme notamment, la claustrophobie, l’arachnophobie ou l’agoraphobie”. La peur renvoie donc à l’inconnu, à ce que l’on ne contrôle et/ou ne comprend pas. Elle tient également une grande part de notre irrationnel et de notre inconscient.
On a soudain les mains moites, les yeux écarquillés et le coeur qui s’accélère. C’est donc un réflexe instinctif pour ce que l’on considère comme inconnu, mauvais voire potentiellement dangereux.
De nos jours, le cinéma d’horreur s’est fabriqué ses propres codes. Portes qui grincent, murmures, silhouettes dans la pénombres… autant de “tricks” qui sont devenus (trop) classiques. Des codes dont les productions usent et abusent parfois jusqu’au ridicule voire l’ennui comme le gore qui frise parfois l’overdose ainsi que le (quand même efficace) jump scare.
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les poupées
Si elle s’invite de plus en plus régulièrement sur nos écrans, la poupée a fait son entrée relativement tard dans le bestiaire monstrueux. On retrouve bien évidemment des occurrences de mannequins, golems et autres poupées vaudous depuis bien longtemps mais la possession de poupée enfantine est assez récente.
Le terme de pédiophobie (ou “peur des petits enfants”) n’est créé qu’en 1970 par Masahiro Mori, ingénieur en robotique. Il inclut ainsi, en plus de nos amis de porcelaine, les mannequins et les robots et désigne le fait que plus un robot va ressembler à un humain et plus ses imperfections vont nous sembler monstrueuses.
Lina Rodriguez McRobbie explique dans son article pour Smithsonianmag.com, The History of Creepy Dolls, que “nos cerveaux sont tellement préparés à voir des visages et à répondre aux émotions qu’ils laissent transparaître que nous en voyons partout, sur des grilles pains, des voitures…”. La peur des poupées s’apparente donc à la peur de l’inanimé ou plutôt ce que l’on y projette. Le développement de l’intelligence artificielle, Cortana et SIRI en tête, participe de ce développement horrifique.
La poupée possédée fait peur. C’est un objet inanimé et innocent. Notre compagnon d’enfance. On ne s’en méfie pas. Sa possession par un esprit démoniaque sali alors en quelques sortes ce symbole de notre pureté et d’insouciance. Tout est question de projection et de symbole donc. La poupée, qu’elle soit Barbie ou Corolle, fut bien souvent le support de nos jeux d’enfants. Qui n’a jamais joué à la dînette ou imaginé tout un tas d’histoire donnant une vie et une personnalité à ces assemblages de plastique ?
Le cinéma d’horreur possède un bestiaire des plus fournis. Grandement inspiré de la littérature, ses monstres ont fait frissonner plus d’un. La poupée, cependant, par son accroche dans notre inconscient profond s’invite de plus en plus sur nos écrans.Si l’on a rationalisé les loups garous, nos symbole d’enfance, eux, nous mène la vie dure. Bien loin de Toy Story, la poupée s’est bel et bien installé parmi les monstres sous notre lit.
Pour les plus courageux, voici une petite liste (non exhaustive) des films de poupées à voir sur votre 31 :
. Child’s Play, Tom Holland (1988)
.Child’s Play 2 : La poupée de sang, John Lafia (1990)
. Child’s Play : La poupée du mal, Lars Klevberg (2019)
. Annabelle, John R. Leonetti (2014)
. Annabelle 2 : la création du mal, David F. Sandberg (2017)
. Annabelle 3: la maison du mal, Gary Dauberman (2019)
Pour le début de son film Apocalypse Now, Francis Ford Coppola a trouvé ironique de jouer The End, des Doors (inutile des les présenter n’est ce pas ?). À l’écran des images superposées : une forêt bombardée qui prend, des hélicoptères dans le ciel dont les hélices se confondent avec celles d’un ventilateur, le visage du personnage principal à l’envers. Pas de titre, pas de nom, seulement la musique et le son entêtant des machines.
Remettons nous dans le contexte rapidement : sorti en 1979, Apocalypse Now nous emporte en pleine guerre du Viet Nam et raconte l’histoire de Willard, un soldat désoeuvré croupissant dans une chambre d’hôtel à Saïgon et qui, entre deux bouteilles d’alcool, ne songe qu’à retourner au combat car c’est la seule chose qu’il saisit désormais. Son souhait est alors plus ou moins exaucé : on lui ordonne d’aller exécuter secrètement le colonel Kurtz qui a fui l’armée et s’est réfugié au fin fond de la jungle, au-delà même de la frontière. Là-bas, il a rassemblé un petit groupe de fidèles et mène des attaques terribles contre « l’ennemi ».
Il s’agit d’une adaptation de la nouvelle Heart Of Darkness, de Joseph Conrad, qui, elle, se passait en Afrique. Les deux oeuvres ont en commun le protagoniste remontant un sinistre fleuve à la recherche d’un homme qui a sombré dans la folie.
Les Origines
Une version inachevée du film est projetée pour la première fois en Mai 1979, au Festival de Cannes. Une claque, qui décrochera la Palme d’Or et fera un véritable pied de nez aux journalistes du monde entier qui avait rebaptisé le film Apocalypse When ? à cause des retards et des problèmes rencontrés lors de la production. C’est toujours avec honnêteté que Francis Ford Coppola évoquera ce qui s’est passé sur ce tournage mémorable, jusqu’à dire à la conférence de presse cannoise : « Mon film ne parle pas du Viet Nam. Mon film est le Viet Nam. »
On sait que le réalisateur a aussi dit que l’art naît parfois d’accidents, et on peut dire que ce film là les a collectionné : un typhon qui détruit le décor de fin, l’acteur principal Martin Sheen qui fait une crise cardiaque et doit être doublé par son frère, Marlon Brando qui refuse de tourner quoique ce soit pendant près d’une semaine… Un endettement de 30 millions de dollars pour Coppola qui veut à tout pris faire ce film et un cauchemar pour l’équipe qui, au lieu de six semaines restera plus d’un an aux Philippines pour tourner les 200 heures de rushes d’Apocalypse Now… Doit-on enfoncer le clou et préciser que les hélicoptères étaient prêtés par le gouvernement philippin et décollaient en plein milieu des scènes pour partir servir leur État ?
Si vous voulez en savoir plus sur les coulisses de ce tournage, je vous conseille le documentaire Heart of Darkness : Apocalypse of a filmmaker, réalisé par la femme du réalisateur et devenu aussi culte que le long-métrage.
Malgré l’enfer qu’aura pu être la production de ce film, Coppola tient à s’y replonger à deux reprises : la première en 2001 en sortant la version Apocalypse Redux, à laquelle il rajoute quasiment une heure de film. La seconde fois, c’est à l’occasion des 40 ans du film pour sortir Apocalypse Now : Final Cut.
Le spectateur au coeur des ténèbres
Si je devais décrire ce film en un mot, je choisirais immersion. Quand les lumières de la salle s’éteignent, dès l’intro, nous nous retrouvons au Viet Nam.
Pour la version Final Cut, les équipes sont allées repêcher les pellicules originales et les ont restaurées. Il faut savoir qu’une bonne partie du film se passe de nuit, et des détails jusque là cachés dans la pénombre deviennent visibles. On voit mieux cette jungle qui nous engloutit quand elle se referme sur les personnages et les couleurs de jours sont davantage flamboyantes.
L’esthétique reste cependant très sombre, et c’est ce qui a fait l’originalité visuelle de ce film : l’audace de sous-exposer les scènes. En cinéma, pour être certain que l’action soit bien visible, on a tendance à vouloir tout éclairer. Darius Khondji, chef opérateur, avait dit à ce sujet : « Si vous inondez de lumière, c’est que vous avez peur. »
Personne n’a eu peur sur ce film là, que ça soit la séquence de guerre nocturne où les personnages n’apparaissent que quand les flashs des bombes les éclairent ou le personnage du colonel Kurtz émerge si peu des ténèbres qu’on le ne voit quasiment jamais entier.
Un trip auditif
Ce qui a marqué également avec ce film, c’est son mixage sonore. Et pour cause, c’est avec lui qu’on a utilisé pour la première fois le 5.1. Sans entrer dans de trop longs détails techniques, il s’agit d’un système audio à cinq voies et c’est grâce à ça que l’on a l’impression d’être « entouré » par le son dans les salles de cinéma ou chez soi lorsqu’on possède une installation de la sorte. D’où le titre générique de « 5.1 Surround ». C’était déjà une prouesse à l’époque. Walter Murch, qui a chapeauté le montage et le mixage sonore d’Apocalypse Now, est, d’ailleurs, venu participer pour la version de 2019. Il a alors travaillé à partir des masters sons originaux trouvés dans une poubelle et produit une version sonore étoffée mais surtout oppressante.
Regarder Apocalypse Now, c’est aussi l’écouter. Un concert de tonnerres, de bruits de jungle et d’animaux nous embarque dans ce bourbier tropical, la musique des Doors et la bande originale psychédélique nous font planer, le mythique passage de la musique de Wagner mariée aux bruits des bombes et des tirs déclenchent en nous quelques frissons.
Le Final Cut
Il y a des choses qui ne changent pas entre les versions, comme le jeu juste époustouflant mené par des monstres même dans les rôles secondaires, tels que le très jeune Laurence Fishburne en soldat immature, ou Robert Duvall et son iconique Lieutenant Bill Kilgore qui « aime l’odeur du napalm au petit matin ».
Coppola a déclaré que ce montage inédit était la meilleure version d’Apocalypse Now qui existe. Il est vrai que la « meilleure version » dépend de celui qui la regarde : certains resteront à jamais fidèles à l’originale de 79, d’autres préfèreront Redux (2001) qu’ils jugent plus complète. D’une durée de 3h02 qui coupe la poire en deux entre la première (2h33) et la seconde (3h30), Final Cut se débarrasse cependant de certaines longueurs sans s’amputer de scènes devenues mythiques telle que la séquence dans la plantation française et d’autres scénettes que je vous laisserais (re)découvrir.
Cette version a également le mérite d’être celle qui est la plus proche de ce que le réalisateur veut dans un univers hollywoodien où le final cut appartient souvent aux producteurs et aux studios.
Quand le film se termine, il n’y a aucun titre au générique. Si l’on fait attention, dans le décor de fin on aperçoit un graffiti : Apocalypse Now. Les lumières se rallument et les gens restent assis un bon moment plutôt que de se lever directement, comme s’ils étaient surpris de découvrir qu’ils sont assis sur leurs fauteuils dans une salle de projection et non pas sur le fleuve en pleine guerre.
La représentation de la guerre à l’écran n’est jamais chose facile. Le souci de véracité (historique ou narrative), les choix de scénario ou de montage sont autant de caractéristiques qui classent l’oeuvre du côté de la contestation, du documentaire voire de la propagande.
La guerre du Vietnam, en particulier, fut (et est toujours) largement contée au cinéma. Le conflit reste encore, en effet, une large cicatrice sur la joue de l’Oncle Sam.
C’est ainsi en mars 1987, seulement 10 ans après la fin des combats, que le réalisateur Oliver Stone présente sa vision du conflit avec Platoon. Il s’agit là du film qui le projettera sur le devant de la scène, notamment en raison de la controverse qu’il créera.
Oliver Stone (JFK, Snowden…), qui se spécialisera par la suite sur le film de combat (sur le terrain ou politique), est avant tout un vétéran de la Guerre du Vietnam au sein de laquelle il s’est engagé volontairement. Platoon s’inspire donc directement de son expérience au front comme une sorte de catharsis.
Petit point synopsis as usual : En septembre 1967, Chris Taylor, dix neuf ans, rejoint la compagnie Bravo du 25e régiment d’infanterie près de la frontière cambodgienne. Chris, issu d’une famille bourgeoise, s’est engagé volontairement. Mais la réalité est tout autre et ses idéaux vont voler en éclats.
Platoon c’est le premier volet d’une trilogie que construira Stone autour de la Guerre du Vietnam (avec Né un 4 juillet et Entre ciel et terre) Ses lead roles sont tenues par un jeune Charlie Sheen, William Dafoe et est l’une des premières apparitions à l’écran d’un certain Johnny Depp. Le film remporta également plusieurs Oscars en 1986 (dont meilleur film et meilleur réalisateur)
A l’état naturel
Le conflit, finalement, est assez naturel. C’est par notre expérience et nos lois (Coucou Rousseau et le Pacte Social) que nous avons crée le concept d’Humanité pour nous éloigner de celui de l’Animal. La jungle de la modernité occidentale ce sont les grattes ciels et les jardins clôturés. La guerre, cependant, répond à ses instincts les plus primitifs.
A l’écran, dans Platoon la jungle, comme un Etat naturel, est présente au premier plan. Elle devient presque personnage à part entière voire ennemi tentaculaire. Dès son arrivée, Chris en fait les frais. Des fourmis venimeuses s’immiscent sous ses vêtements et des sangsues s’accrochent à ses joues. Les éléments le mettent également à mal et il fait un malaise peu après le début de sa première mission.
Ce qui tue le plus d’hommes, toutefois, c’est l’homme lui même. Poussé par son instinct de survie, il revient à la bestiale loi du Talion par la vengeance aveugle de ses semblables GIs ou Vietcongs. Une escalade de la violence provoquée et expliquée par le très simple “c’est la guerre” ou autrement dit, tue ou c’est toi qui sera tué.
Les factions américaines portent également à demi mot le germe des conflits qui séparent ses hommes. Un exemple criant en est l’étonnement des amis de Charlie lorsqu’ils lui demandent pourquoi il est sur le front malgré son air éduqué. On envoie pas les riches au casse pipe déclarent ils. L’un des soldats ajoutera plus tard également qu’on veut toujours “faire tomber le noir au plus bas de l’échelle”.
Light and Dark
Le coeur de Platoon s’apparente alors plus à une guerre entre la Bête et l’Humanité. Ce combat est illustré par la guerre civile au sein même de la faction. Les Sergent Barnes et Elias représentent alors chacun l’un des camps qui s’affrontent en chacun des soldats. Elle est également la représentation type de la formation de groupes autour d’un leader fort et charismatique qui fait alors office de gourou. Un petit big up de Stone à la Maison Blanche ?
Là où Apocalypse Now (Francis Ford Coppola, 1979), le superbe, s’intéresse à l’individualité, Platoon se penche plutôt sur les relations sociales, la collectivité et leurs impacts. Les GIs sont, en effet, traqué, perdu dans un environnement qui leur est hostile et doivent défendre leur vie pour une guerre à laquelle ils ne croient plus. Une situation extrême qui appelle chez certains un retour aux instincts primitifs de l’animal quand certains prennent la décision de rester dans les codes et tabous de l’humanité. L’attaque du village de civils est alors la cristallisation de ce conflit intérieur dans sa dimension individuelle ou collective.
Oliver Stone ou l’Amérique racontée
Si Oliver Stone est aujourd’hui un habitué de la critique frontale envers le gouvernement US, à l’époque Platoon fit pas mal de bruit. Si il fut quelque peu éclipsé par Apocalypse now, il n’en est pas moins une oeuvre de tout premier ordre. Là où le premier montrait comment l’armée venait à se nécroser par des soldats en quête de sens (qu’ils ne retrouvaient plus dans la bataille), le second choisit de montrer le point de vue d’un simple soldat volontaire qui se trouve confronté à une horreur qu’il ne comprend pas. Platoon c’est alors un témoignage sous forme de fiction aux accents autobiographiques comme peut l’être Valse avec Bachir (Ari Folman, 2008). On ne voit pas l’envergure de la guerre comme dans Apocalypse Now, on est au coeur du conflit tel que le voyait un simple soldat sans autres contacts avec l’extérieur et la hiérarchie que ses officiers. C’est ainsi le visage de la guerre dans toute sa vérité qui explose à l’écran.
La scène finale termine d’installer Platoon dans une contestation qui prend alors la forme d’une mise en garde. Le discours de Chris, blessé nous l’affirme. Une image, cependant, est encore plus parlante : la vue depuis son hélico de secours composée d’un charnier aux dimensions extraordinaires dans lequel sont rassemblés par des GIs mal en point les corps des Vietcongs éparpillés un peu partout sur le front.
Platoon c’est une autre vision de la guerre et de l’Amérique. Le film fit largement polémique à sa sortie et son réalisateur reçut nombre de menaces de mort. Il est également à noter qu’il fut interdit au Vietnam en raison de la description qui était faite de son peuple. Stone nous place dans la peau d’un soldat sur le terrain pour un témoignage immersif au discours philosophique. Le choix de sortir ce film quelques années seulement après la fin du conflit lui permet alors d’appliquer ses propres commandements. “Ceux qui ont survécu ont le devoir de reconstruire et d’enseigner ce que nous savons”, déclare Chris à bord de l’hélico infirmier.
Oliver Stone n’aura alors de cesse d’apporter critique et contre vision de l’Amérique afin que plus jamais une guerre aussi insensée n’ai lieu.
Du 28 août au 7 septembre dernier se tenait la 76e édition du festival de cinéma, La Mostra à Venise (Italie). Créée en 1932, le festival se déroule annuellement au sein de l’historique Palais du cinéma de la cité des Doges. Elle a, de plus, été intégrée depuis quelques années à la Biennale d’art de Venise en qualité de section cinéma.
Pour cette 76e édition, c’est l’actrice Alessandra Mastronardi (To Rome with Love) qui se prête au jeu de la maîtresse de cérémonie et la réalisatrice Lucrecia Martel (La ciénaga, La Sainte fille) qui prend la direction du jury succédant à Guillermo del Toro. Retour …
Le palmarès
. En compétition officielle
Lion d’or : Joker, Todd Philipps (Etats Unis)
Lion d’argent : About endlessness, Roy Andersson (Suède)
Coupe Volpi Meilleure actrice : Ariane Ascaride pour Gloria Mundi (France)
Coupe Volpi du Meilleur acteur: Luca Marinelli pour Martin Eden (Italie)
Lion d’Argent du scénario : Yonfan pour N°7, Cherry Lane (Hong Kong)
Prix Marcello Mastroianni du Meilleur espoir : Toby Wallace pour Babyteeth (Australie)
Grand Prix du Jury : J’accuse, Roman Polanski (France)
Prix spécial du Jury : La Mafia non è piu quella di una volta, Franco Maresco (Italie)
. Orizzonti (Horizons)
Meilleur film : Atlantis, Valentyn Vasyanovych (Ukraine)
Meilleur réalisateur : Théo Court pour Blanco en blanco (Chili)
Meilleure actrice : Marta Nieto pour Madre (Espagne)
Meilleur acteur : Sami Bouajila pour Un fils (Algérie)
Meilleur scénario : Jessica Palud, Philippe Lioret, Diastème pour Revenir (France)
Meilleur court-métrage : Darling, Saim Sadiq (Pakistan)
Prix spécial du jury: Verdict, Raymund Ribay Gutierrez (Philippines)
. Prix Luigi De Laurentiis (Prix de la meilleure première oeuvre)
Meilleur premier film Prix Luigi de Laurentiis : You will die at 20, Amjad Abu Alala (Soudan)
. Venice VR
Meilleur film VR : The Key, Céline Tricard (France)
Meilleur scénario pour film linéaire : Daughters of Chibok, Joel Kachi Benson (Nigeria)
Meilleure expérience immersive : A Linha, Ricardo Laganaro (Brésil)
. Venezia Classici
Meilleure restauration : Extase, Gustav Machaty (Tchécoslovaquie)
Meilleur documentaire sur le cinéma : Babenco – Tell me when I die, Barbara Paz (Brésil)
. Autres catégories
Prix Campari Passion for film : Luca Bigazzi
Prix Jaeger -Lecoultre Glory to the filmmaker : Costa-Gavras
Lion d’or pour leur carrière : Julie Andrews & Pedro Almodovar
Les surprises (bonnes et… mauvaises)
. Le Joker de Todd Philipps rafle le Lion d’or à grands coups d’applaudissements et d’éloges. Le film raconte, en effet, la naissance du méchant iconique de DC avec en lead role rien de moins que Joaquin Phoenix (Gladiator,Her…). Réputé comme psychologiquement dérangé et dérangeant et ayant, de plus, une illustre parenté d’interprètes (Heath Ledger, Jack Nicholson notamment) le projet est très attendu. Le film a, d’ailleurs, été classé “R Rated” aux USA pour “violence importante et sanglante, comportement perturbant, vulgarité et brèves images sexuelles”. Il sera donc interdit aux moins de 12 ans en France et 17 ans outre Atlantique. Malgré cela, il est encensé partout où il passe et les pronostics pour son démarrages. sont plus qu’ optimistes. Un succès commercial et critique qui semble dépasser le simple comics illustré (vous l’avez ?). Beaucoup s’y sont cassés les dents (cc Jared Leto) mais Joaquin Phoenix semble avoir rallumé la flamme. Affaire à suivre le 9 octobre en salle.
. Le nouveau film de James Gray, Ad Astra fit également sensation à la cité des Doges. Celui ci raconte, en effet, l’aventure de l’astronaute Roy MacBride aux confins du système solaire sur les traces de son père et d’un mystère qui pourrait bien menacer l’Humanité. Un space opéra façon Interstellar avec à l’affiche Brad Pitt, Tommy Lee Jones, Liv Tyler ou encore Ruth Negga. Une pluie d’étoiles, donc, à découvrir le 18 septembre.
. Pour sa troisième édition, la section Réalité Virtuelle de la Mostra a encore une fois révélé de très belles oeuvres. Il est noter, d’ailleurs, que c’est la française Céline Tricard qui remporte le prix de Meilleur film VR avec son The Key. Une belle preuve de l’intérêt porté par la France aux technologies immersives et de son souhait de se positionner en temps que tête de file.
Hors champ L’annonce de la sélection de Roman Polanski créa la polémique (rappelons le, le réalisateur fut jugé pour un viol sur mineure qui se serait déroulé fin 70’s). Son ex victime a tenu toutefois à lui adresser ses félicitations pour son prix italien. Elle explique, en effet, être fatiguée de l’acharnement médiatique et juridique dont ils sont tous les deux les frais. Suite à la déferlante du mouvement MeToo et la révélation d’autres victimes, le réalisateur de Rosmary’s Baby a été radié de l’Académie des Oscars. Décision qu’il a décidé de contester devant la justice.
Le dernier trailer de la saga Star Wars : Star Wars IX: L’Ascension de Skywalker a été présenté lors de la D23 (23 août 2019 – 26 août 2019), la convention de Disney. Ce trailer est l’occasion de faire un retour sur la série et de son évolution depuis le rachat de la licence par Disney. Surtout depuis le départ de notre regretté Georges LUCAS de la saga qu’il a forgé.
C’est quoi un bon Star Wars ?
Ce qui fait la marque de Star Wars, c’est avant tout une narration universelle et l’application d’une technologie innovante.
Placé au cœur de sa réflexion le chemin du héros, entre jeunesse et maturité, reprend les plus grandes odyssées à son compte. Nombreuses sont les influences et les figures utilisées dans Star Wars. Elles sont, par exemple, tirées de la mythologie gréco-romaine avec la figure du père à défier pour le dépasser tel un Oedipe moderne, ou bien de l’univers japonais avec la figure du samouraï pour Dark Vador. Cela donne une valeur universelle au discours et une profondeur de lecture beaucoup plus percutante.
Le récit s’inscrit toujours dans l’actualité de son époque et donne une lecture de notre environnement. La première trilogie, à savoir celle parue en premier (épisode IV, V et VI), nous replace dans le contexte de la Guerre Froide. L’Empire est une vision du communisme où les libertés individuelles sont interdites au profit d’un système politique dictatorial. L’économie est tourné vers les machines de guerre, toujours plus puissante au détriment du peuple, pauvre et affamé qui entraîne une augmentation de la criminalité. Les rebelles sont les libérateurs de cette injustice en faisant la promotion de l’individu comme maître de son destin. Une figure appuyée par le fait que seuls les rebelles soient identifiables individuellement, les stormtroopers portant tous le même casque. La seconde trilogie (épisode I, II et III) nous raconte l’ascension d’un politicien jusqu’au sommet de l’Etat grâce à des manoeuvres politiques douteuses voir illégales. Le Sénat est vide de sens et de pouvoir, corrompu par des lobbyistes qui entraîne la chute de la démocratie. Une critique de la politique américaine à cette époque (Bush, 11 septembre 2001).
Les évolutions technologiques étaient également au cœur de la démarche de Georges LUCAS et de ses équipes. Le réalisateur a ainsi toujours voulu fournir les plus belles images afin de créer un univers le plus réaliste possible. A tel point qu’il fait, dans les années 2000, une réédition des 3 premiers films avec des effets numériques inédits. Et il est vrai qu’il nous amène à chaque fois dans les étoiles.
En complément, une fois n’est pas coutume, voici l’émission de radio de France Inter Si l’Amérique m’était contée : L’Empire Star Wars – Sabres Laser, Etoile noire et dollars. Il faut préciser qu’à l’époque de l’enregistrement il n’y avait que deux trilogies :
Les œuvres qui ont été créé après la cession de Lucasfilm à Disney n’ont pas permis de retrouver une telle qualité narrative et technique. Il existe cependant une exception à cette offense, Rogue One. Il s’agit du premier spin off de la série (qui ne retrace pas les aventure de la famille Skywalker). L’histoire prend place juste avant le IVème film (donc le premier film à sortir sur grand écran en 1977) et décrit comment les rebelles ont réussi à récupérer les plans de l’Etoile Noire. Une aventure plus sombre mais qui a su retranscrire ce qu’était un bon Star Wars. Le film n‘est pas parfait mais l’on y retrouve une histoire qui sait s’inscrire dans notre temps. En effet la rébellion est une lecture froide du conflit contre les puissances politiques et entrepreneuriales. Une envie de rébellion et de changement que l’on sent dans notre actualité.
Les images sont également d’une beauté à couper le souffle. Ce que l’on retrouve également dans les derniers Star Wars il faut le dire. Les capacités techniques qui sont déployées dans Rogue One pour recréer les personnage de Tarkin et de la princesse Leia sont bluffantes à tel point que l’on se demande pendant tout le film si ce ne sont pas des rushes des premiers films. On y retrouve alors un récit sombre mais qui donne de l’espoir et des images marquantes comme la poursuite de Dark Vador dans le vaisseau de Leila qui saura mouiller toutes les moustaches. A must-see !
Rogue One rend hommage aux premiers films de la saga dans la construction de son univers sale mais réaliste. On pense notamment au marché de Jakku qui rappelle la crasse de Tatooine. Un aspect documentaire qui donne une crédibilité au discours bien loin du classique de la SF à l’époque avec ses lignes parfaites synonyme de progrès. Le film ne se perd cependant jamais dans un copié collé des premiers volets. Ils gardent, en effet, une identité propre. C’est ce que n’a pas réussi à faire la troisième trilogie et le spin off autour du personnage de Han SOLO.
Pour les deux premiers films de la dernière trilogie, il s’agit d’un remake des premiers mais sans aucune originalité et dans une déconstruction du discours des premiers qui n’apporte rien à l’univers. Ils passent dans une démesure propre à ceux qui n’ont pas l’inspiration et le talent pour hériter d’un tel monument. L’Etoile noire devient Starkiller, et donc 10 fois plus grosse, l’empereur devient Snog et la Force nous fait tomber du côté lumineux et non du côté obscur. Une mise en abîme et un gigantisme inintéressant qui bafoue l’œuvre originale. Hormis de belles images, il n’y a aucun progrès technique tel que ce fut le cas avec Star Wars II, le premier film a avoir été tourné entièrement en numérique. Il n’y a même parfois aucun sens aux situations à tel point que la destruction de la flotte par un vaisseau dans l’hyperespace dans le dernier film en date remet en question la logique même des combats dans l’espace. Si un vaisseau est capable de détruire une flotte en fonçant sur elle lors d’un saut dans l’hyperespace, il n’y a donc aucune raison de s’affronter dans des conflits spatiaux gigantesques.
Le spin off SOLO, quant à lui, pourrait être résumé ainsi « ils nous montrent ce que l’on ne voulait pas voir ». La part de mystère d’Han SOLO permet de créer la profondeur et la complexité du personnage. Nous montrer son histoire en reprenant toutes les petites phrases qu’il a pu dire dans les films du genre « Le raid de Kessel en 12 parsecs », n’a d’autre intérêt que de vider le personnage de sa substance. Un défaut majeur dans le film qui perd alors le spectateur non initié car le film est vide si l’on ne connaît pas les références. Cela est particulièrement visible dans la dernière scène du film qui ne parlera qu’à ceux qui ont suivi la série animé Star Wars : The Clone Wars.
Star Wars IX
Star Wars IX sortira en décembre prochain et nous a déjà proposé deux trailers. Dont voici le premier:
Le deuxième trailer, quant à lui, nous montre tout d’abord des scènes des autres films pour nous indiquer qu’il s’agit du film clôturant la série des Skywalker. Une approche intéressante car elle nous indique la fin définitive d’un arc tout en nous remémorant les scènes les plus marquantes des trois trilogies. La voie qui nous guide pendant cette remontée fulgurante dans le temps est Luke SKYWALKER. Il souligne les images nous précisant qu’il s’agit de la fin et du dernier combat. La suite du trailer fait apparaître les personnages principaux de la saga actuelle, Rey et sa petite bande ainsi que la princesse Leia. La scène permet alors de recentrer l’action sur les personnages de la dernière trilogie.
L’arrivé à l’écran de plusieurs vaisseaux et d’une armada qui remplit alors le ciel nous montre un conflit en approche dans un gigantisme propre aux derniers films. C3PO a les yeux rouges et un laser tiré depuis l’espace déchire le sol, puis Rey apparaît en pleine démonstration de ses pouvoirs. La guerre approche, le dénouement ! Puis c’est la voix de l’empereur qui monte sur le bruit du sabre laser de Kylo Ren. Il nous indique également que le conflit arrive à son terme. Le bien et le mal s’affrontent de nouveau dans un combat au sabre laser. La scène de fin arrive comme un choc, Rey dans une tenue obscure, un sabre laser rouge !
Le trailer est bien construit et le retour de l’Empereur est alors inévitable. Nous nous y attendions depuis le dernier trailer de Star Wars IX. Cela nous confirme que l’originalité ne sera pas de mise dans ce dernier volet. La présence d’une Rey obscure à la fin du trailer, également, le confirme. Le service marketing adore décidément inverser les rôles entre lumière et ténèbre. Le gigantisme est de nouveau de mise. On peut donc s’attendre à une suite digne des deux premiers films : sans histoire bien construite ou qui nous parle. On ne retrouve pas non plus la présence d’une technologie bien utilisé qui nous immerger davantage dans cet univers avec un effet Whaooo.
Peut-être faudra-t-il attendre les séries sur Les Mandaloriens (avec comme personnage principal Boba Fett et qui est prévu pour le 12 novembre 2019), sur Obi wan et peut être même sur Dark Maul pour connaître un renouveau dans l’univers de Star Wars. En attendant, comme un acte citoyen, je n’irais pas voir le prochain film. Il s’agit de crier haut et fort que l’on veut moins de personnages qui ne servent qu’à vendre des peluches mais une vraie histoire qui ne fera qu’étendre l’influence de ce merveilleux univers Star Wars. En attendant on peut toujours se plonger dans les livres et autres support de l’univers étendu, les jeux vidéo entre autres.
L’homme peut il survivre sur une autre planète ? Notre niveau scientifique et technologique actuel nous le permet il ?
C’est la question que se pose Andy Weir lorsqu’il publie en 2011 son premier roman The Martian. Celui-ci, qui parut tout d’abord en version électronique (via Amazon) puis sous format papier en 2014, est très vite devenu un véritable best seller. A tel point que la même année, Weir vend les droits aux productions Scott Free Productions. Son adaptation sur grand écran sort alors en 2015 sous la direction de (Monseigneur) Ridley Scott avec en lead role Matt Damon.
S’il passe relativement inaperçu face à un autre survival movie, le retentissant The Revenant (aka le sacre de Dicaprio), il figure une pierre solide à l’édifice de ce genre qui peut se révéler glissant.
Côté scénario: Lors d’une expédition sur Mars, l’astronaute Mark Watney est laissé pour mort par ses coéquipiers, une tempête les ayant obligés à décoller en urgence. Mais Mark a survécu et est désormais seul sur une planète hostile. Il va devoir faire appel à son intelligence et son ingéniosité pour tenter de survivre et trouver un moyen de contacter la Terre à 225 millions de kilomètres.
Comment s’en est donc sorti Ridley Scott avec son escapade martienne ?
Un ADN racé
Seul sur Mars c’est avant tout un maître à la caméra, j’ai nommé Ridley Scott ! Le réalisateur d’Alien (1979) et Blade runner (1982) n’est pas un complet étranger des épopées SF. Son style aux visuels superbes est ici quelque peu difficile à déceler cependant. Les représentations de la planète rouge sont magnifiques sans nul doute mais elles semblent bien secondaires faces aux péripéties bien rôdées de Mark Watney. Car oui! Si Scott nous a habitué à une maîtrise fluide de l’action, sur Mars tout se passe presque trop bien pour notre Robinson spatial comme pour le scénario.
Cependant, et malgré un manque de fantaisie certain, la machine fonctionne bien. La performance de Matt Damon y figure d’ailleurs un ingrédient de choix. Celui-ci fut d’ailleurs récompensé en 2016 par le Golden Globes du meilleur acteur dans un film musical ou une comédie. Le second survival de l’affiche 2015, The Revenant sera d’ailleurs également récompensé par la même cérémonie avec le Golden Globes du meilleur acteur dans un film dramatique pour Leonardo Dicaprio. Les deux films semblent alors comme figurer les deux versants du miroir. L’un est très psychologique, sombre voire mystique tandis que le second est beaucoup plus optimiste mais surtout beaucoup plus pédagogique !
Ridley, fidèle à lui même, réussit tout de même le pari de nous tenir en haleine tout au long du film (et ce malgré quelques moments d’égarement). La scène du sauvetage si elle est somme toute assez classique, nous laisse le coeur battant !
Et la science dans tout ça ?
Andy Weir, lorsqu’il s’attèle à la rédaction de The Martian, fait appel à des scientifiques spécialisés pour l’aider dans la construction scientifique de son récit. Quelques libertés sont prises afin d’asseoir le dramatique de la narration effectivement mais une grande partie des explications sont avérées. Non la puissance de la tempête qui causera la perte de Mark n’est pas vraisemblable. On peut cependant bien fabriquer de l’eau et faire pousser des plantes sur Mars ! Thomas Pesquet le fait déjà sur l’ISS d’ailleurs.
Seul sur Mars gère donc avec brio une dimension qui n’admet pas l’erreur: la vulgarisation scientifique. Ridley Scott (et Andy Weir) réussit à distiller des explications véritablement scientifiques sans nous ennuyer une seconde ! Il nous intéresse même !
Il s’agit alors, certes, d’un film de science fiction dans le sens où il s’agit bien d’une projection, nous ne sommes pas encore allés sur Mars ni n’avons expérimenté d’aussi long moment en dehors de notre confortable (mais sympathique) orbite terrestre, mais c’est bien de science que nous parle Mark.
Mars est la planète la plus connue du système solaire après la Terre. Nous avons donc déjà beaucoup d’indices sur sa composition et sa géographie grâce aux multiples satellites et Rovers envoyés là bas. Nous avons donc déjà une bonne connaissance du trajet et des conditions de survie sur la planète rouge. Ce qui nourrit d’ailleurs les rêves de nombres de scénaristes mais aussi de scientifiques et d’entrepreneurs comme le patron de Space X, Elon Musk.
La pomme (de terre) de la discorde
“Lorsque l’on a fait pousser quelque chose sur une terre vierge, on a colonisé cette terre”, déclare Mark Watney/Matt Damon au milieu de ces plantations de patates, citant l’université de Chicago. L’affirmation a de quoi faire réagir. Elle semble, en effet, comme un reflet de notre attitude présente face à la conquête spatiale mais aussi de celle que nous avons avec notre propre planète.
Plus tard, cependant, il ajoute que chaque pays qui participe de près ou de loin à l’exploration spatiale aurait ratifié le traité indiquant qu’aucun n’est autorisé à revendiquer un territoire spatial. Ces derniers se trouvent alors en eaux internationales. Les revendications de politique interne à l’Humanité sont donc exclues de la discussion (et c’est tant mieux). Mais qu’en est il à l’échelle de l’espèce humaine ? Mark peut il se revendiquer ainsi “premier colon martien” ?
Ridley s’intéresse également à une face de l’exploration spatiale que l’on voit (malheureusement) assez peu : la psychologie de ou des explorateurs. Mark doit, en effet, survivre seul sur une planète étrangère, sans ressources, sans moyen de communication et avec très peu de vivres. Il commence alors tout de suite ses calculs de rations et réfléchit à une stratégie agricole. Là où beaucoup se serait donné la mort de désespoir, Mark ne faiblit pas et entre tout de suite en action. Un instinct de survie incroyable qui est d’ailleurs l’un des critères de sélection au cours du recrutement spatial. Chaque astronaute doit, en effet, comme un militaire, rester calme face à la difficulté et prendre les décisions qui s’impose pour la survie de sa mission, celle de son équipe et surtout la sienne propre.
Ridley Scott avec Seul sur Mars ne signe donc pas sa Chapelle Sixtine. Un scénario somme toute assez classique et convenu ne nous permet pas d’être transcendé comme par un Blade Runner. Il explore cependant avec brio la dimension scientifique de l’exploration martienne voire même spatiale. Le personnage attachant de Mark Watney fait alors figure de professeur de physique/biologie dans un conte scientifique qui nous donne envie d’en savoir plus.