Venez à la (re)découverte d’une formation qui vient de loin, ou plutôt de très très loin. En effet, Da Genius est une formation à géométrie mouvante composée pour l’occasion de Gamil Dagenius Abdou Kamal-Dine et Yax et nous vient des Comores ; un archipel à plus de 7000 km de la France. J’ai eu la chance de les rencontrer et d’assister à l’une de leur performance scénique au Cameroun.
Yax et Gamil ont, en effet, été invités à participer à un moment créatif, pendant une semaine dans un petit coin de paradis, appelé Souza, à 45 minutes de Douala. Cet endroit magique en pleine nature a accueilli des artistes et des auteurs plus ou moins expérimentés, originaires du continent africain en résidence afin de (re)trouver l’inspiration et se former en compagnie de grands noms de l’écriture tels que Hemley Boum ou encore Anne-Sophie Stefanini et le slameur Capitaine Alexandre.
Ce dernier a d’ailleurs partagé l’affiche du groupe lors du concert organisé à l’Institut Français du Cameroun de Douala. Les deux formations sont habitués à travailler tous ensemble depuis un certain temps. Ils collaborent notamment dans le collectif appelé “On a slamé sur la lune”.
Mais parlons-en alors des concerts !
A Douala, Yax et Gamil sont accompagnés de Marsi et de Serge Epah au cajon (une percussion en forme de boîte, originaire du Pérou), et Capitaine Alexandre en guest. Alors qu’ils n’ont pas eu tant de temps que ça pour tous se coordonner, on ressent une belle complicité dès les premiers instants. Les textes sont bien écrits, dénoncent, nous questionnent, nous touchent et on voyage encore plus lorsque Gamil et Yax nous proposent des morceaux en comorien.
En résumé, un très bon feeling, des instrus entraînantes que je retrouve à Yaoundé le vendredi suivant, cette fois-ci sans Capitaine Alexandre ni Serge Epoh. Le début manque un peu de calage mais rapidement, ils reprennent la main et le public se réveille pour les accompagner et demander même une petite prolongation.
En bref, n’hésitez pas à aller les soutenir notamment en écoutant l’album MSAFARA « voyage poétique », en streaming, et si l’opportunité se présente, assister à un de leur show.
“On ne peut pas se faire 500 millions d’amis sans se faire quelques ennemis”, comme dirait très justement le Mark Zuckerberg. Le monde des start up, licornes et autres multinationales n’est effectivement pas un fleuve si tranquille que cela. Si la vie de ces presque demi-dieux fait rêver à base de jets privés, de soirées et de villas, elle vient aussi avec des contrepartie beaucoup moins sympas. La solitude, la fatigue et parfois quelques bouts de santé mentale jonchent les bords du chemin. Le marché du travail et encore plus dans ses hautes sphères n’est pas connu pour être le plus safe avec ces humiliations, horaires à rallonge, sexisme ou abus de pouvoir. L’arrivée en masse des start ups et la crise de 2008 ont notamment permis l’essor de ces success stories à l’écran parfois pas (que) très glam …
L’escroc
Figure emblématique des films sur l’entreprise et le pouvoir, l’escroc reste une valeur sûre. Il permet, en effet, de traiter des faiblesses du système qui le laisse s’intégrer jusqu’à son Olympe sans tout à fait remplir toutes les cases. L’escroc est aussi un bon moyen de se réaliser une parabole plutôt mignonne, à défaut d’être originale, autour de l’idée du “hard work always pay”. Une façon détournée de vanter les mérites d’une détermination sans faille.
La figure de l’escroc nous livre également (et surtout) un bon prétexte pour des aventures et des courses poursuites bien prenantes.
Le loup de Wall street
Arrête moi si tu peux
Le désabusé
Ce n’est un secret pour personne, le monde du travail peut être aliénant. La rentabilité est le mal de l’homme moderne comme la quête de sens celle de l’individu post moderne. L’argent mais aussi le pouvoir sont devenu un but en soi. Tout ceci végète et sous tend une société régie par le paraître et le vendre. Un bon concentré de good vibes non ?
Côté hollywoodien, cet aspect est assez peu montré. Si il est présenté, ce n’est souvent qu’une péripétie dans le parcours du personnage qui en ressortira grandi. On peut citer à ce titre la plupart des biopics musicaux et notamment le récent Rocketman lequel se focalise sur la lente descente aux enfers d’Elton John avant de terminer sur un message d’espoir et de paillettes.
L’adaptation du roman de Beigbeder figure cependant l’un des seuls long métrages qui appuie le malaise et la dépendance créées par le besoin constant de la performance.
99 francs
Le dictateur
Classique parmi les classiques, le business c’est aussi pas mal d’exploitation et d’abus de pouvoir. Comme les ouvriers d’hier, les employés sont souvent interchangeables et subissent les humeurs et décisions de leurs patrons.
Un aspect un peu moins démontré au cinéma désormais à l’exception, encore une fois, d’une courte péripétie dans le voyage d’un Hercule vers le nouvel Olympe. Andrea Sachs (Anne Hathaway) dans le Diable s’habille en Prada, par exemple, subit les envies de Miranda Priesley mais c’est pour mieux se découvrir.
Un autre concept peu développé également à l’écran mise à part quelques jolies paraboles du papillon et de la chenille figure le travail lui-même comme le patron le plus exigeant.
Parmi la masse de biopics, le Joy de David O’Russel (2015) fait un peu figure de curiosité. Il s’agit, certes, d’une success story à l’américaine. Le pitch se détache toutefois de l’ordinaire pour s’intéresser à l’aventure d’une femme entrepreneure et le revendique ! Inspiré d’une histoire vraie, le film porte à l’écran l’histoire de Joy Mangano, une star du téléachat outre atlantique. La jeune femme, inventrice de génie, se consacre à sa famille. Le jour où elle a l’idée d’un serpillère révolutionnaire, elle décide de tout changer.
Une aventure féministe, un entrepreneur qui ne navigue pas dans le digital, une histoire de conte de fées à la Cendrillon … Joy tient-il ses promesses ?
Un film iconoclaste … mais pas trop quand même !
Alors oui, un biopic américain n’a jamais vraiment été gage d’originalité. Joy ne fait pas exception. Il s’agit, effectivement, de l’énième ascension d’un self made man comme l’Oncle Sam les aime. Le héros démarre comme banal citoyen et termine au firmament par son travail et sa dévotion. Comme souvent, le pitch est l’adaptation d’une histoire réelle. L’entrepreneur (à succès, c’est important) est élevé au rang de demi-dieu et son histoire se doit d’être racontée pour inspirer et éduquer. On est pas très loin des douze travaux d’Hercule non ?
Ce qui fait toutefois le charme de cette merveilleuse parabole ici, c’est le choix de ne montrer que les débuts du projet. On s’attache ainsi aux débuts chaotiques d’une entreprise lorsque l’on est véritablement au bas de l’échelle. Joy est loin de ces petits geeks solitaires de la Ivy League. Elle cumule les petits emplois, vit avec ses enfants, son ex, sa mère et parfois son père et n’a pas fait d’études. Son produit, une serpillère (rappelons le) n’est pas très glam non plus comparé aux applications mobiles de la Silicon Valley. Oui mais voilà, c’est justement ce qui fait l’attrait de cette histoire. Joy est extrêmement réelle. Elle figure n’importe quel individu ayant de l’idée mais pas l’occasion ou le courage nécessaire pour se lancer. Joy pourrait ainsi être un voisin ou une amie en quête de reconnaissance.
Si le film finit par la transformation de la jeune femme en princesse du business (on reste en amérique hein ! De l’happy ending !), elle entre dans les foyers et surtout amène une vague d’empathie chez le spectateur.
Et le féminisme ?
Avant même de parler du film en lui-même, il faut saluer la performance de Jennifer Lawrence qui s’installe définitivement comme l’une des actrices les plus talentueuses du moment.
Joy promet un beau moment de féminisme. Toute la promotion, d’ailleurs, est inscrite en ce sens. Au sortir du visionnage cependant, il apparaît que, certes, Joy subit la pression d’être mère. Le père s’occupe très peu de sa progéniture. Le regard des autres est également pesant : on l’accuse d’être une mauvaise mère lorsqu’elle emmène avec elle ses enfants pour tenter une vente. Sa famille est omniprésente, également, voire même étouffante. Joy n’a plus le temps de penser. Elle n’a plus le temps de quoique ce soit. Mais c’est normal, c’est une mère de famille. Une situation qui va atteindre son paroxysme lors de la scène du bateau.
Malheureusement, une fois dans le monde du business, aucunes des difficultés qu’elle rencontre ne semble réellement liées à son statut de femme. Se faire escroquer par son fournisseur ou choisir le mauvais conseiller sont des péripéties qui pourrait très bien arriver à un homme comme à une femme. Le seul point touchant à la condition de la femme dans les affaires apparaît lorsque Joy doit choisir sa tenue pour son passage à la télévision.
Cette déception s’efface cependant face à l’incroyable sympathie que dégage Jennifer Lawrence à l’écran et qui nous fait frissonner pour elle tout genre confondu.
Joy, malgré une proposition ambitieuse, ne figure pas le grand film féministe annoncé. Le peu de détails à décrire l’univers de la femme dans les affaires mais aussi une narration parfois un peu brouillon gâche un peu ces belles promesses. On regrette également un certain manque de profondeur quant au développement de l’univers de Joy. On aurait aimé, en effet, creuser d’autant plus les personnages et leurs relations afin de véritablement dresser un éco-système qui tienne la route.
Le film toutefois est grandement relevé par la performance de Jennifer Lawrence, laquelle est incroyable de sincérité.
“Rocketman” , “Bohemian Rhapsody”, “The social network” ou “Snowden”… Presque pas une année sans son lot de biopic en tout genre. De l’anglais, “biographical motion pictures” , un biopic est une œuvre de fiction centrée sur la description biographique d’un personnage ayant réellement existé. Il est donc à distinguer du documentaire par son aspect plus grand public que ce dernier. S’ il est assez apprécié du public (et des producteurs), il se présente toutefois comme un exercice risqué comme le choix des acteurs, les choix scénaristiques mais aussi les négociations avec les ayants droits. Un exercice, donc, qui peut facilement être casse gueule (sorry not sorry).
La petite histoire
Le biopic est un classique du cinéma. On a coutume de figurer sa naissance avec le Cléopâtre de Georges Méliès en 1899, c’est dire !
C’est cependant au cours des années 1930’s que ces long métrages biographiques vont connaître un véritable âge d’or. Il s’agit à cette époque d’appuyer principalement le rôle pédagogique du film. La précision documentaire est ainsi recherchée. Les sujets couverts vont ainsi principalement aux grands scientifiques et politiques tels que Pasteur ou Zola.
Il sera cependant un peu délaissé par la suite mais connaît un vrai regain d’intérêt dans les années 1980. Il remontera ainsi les échelons du fun avant de rencontrer un nouvel âge d’or entre la fin des 2000’s et début 2010’s. Après la WW2 et la montée de l’industrie de l’entertainment, l’homme se rêve et s’espère. La société devient de plus en plus libéraliste et individualiste. Les biopics offrent alors un nouveau panthéon d’idoles à désirer. Les films mettent en effet ici beaucoup plus en valeur la réussite personnelle, l’ambition, le chemin parcouru. Un biopic devient alors une opération marketing plus qu’éducative. Certains biopic (Rocketman en tête) sortent même alors que leur protagoniste est encore en vie. Il se distinguent alors deux tendances : les entrepreneurs et les groupes musicaux. Notons toutefois que la personnalité la plus biographié est Abraham Lincoln avec pas moins d’une centaine de films.
La tendance des biopics ne se cantonne pas simplement à la France et aux USA, bref au monde occidental. L’Asie, et notamment la Chine, est friande de grandes fresques historiques à l’image de The Grandmaster de Wong Kar Waï qui retrace la vie de l’un des inventeurs du kung-fu.
Si les biopics sont plutôt rares dans les sélections de festivals, l’engouement du public est certain même si il a tendance depuis la fin des 2010’s à baisser quelque peu. Un genre très apprécié ces dernières années donc, à tel point que parfois, deux films sortent en même temps sur la même personne (Coco Chanel en 2009, Truman Capote en 2005-2006) et se font une large concurrence commerciale.
La difficile production
Réaliser un biopic n’est pas de tout repos malgré la rapidité à laquelle il en sort ces dernières années. Du côté des acteurs, l’actrice Diane Kruger déclare dans une interview pour la promotion des Adieux à la Reine (Benoit Jacquot, 2012) que “c’est surtout risqué. Tout le monde a une idée préconçue sur une telle figure historique”.
L’un des principaux problèmes rencontré tient à l’identité même du film, son scénario. Doit-on, en effet, se concentrer sur les éléments réels (et donc se rapprocher d’une approche documentaire) ou, à l’inverse appuyer le côté divertissant quitte à s’attribuer quelques licences artistico-romanesques ? Il s’agit surtout de ne pas décevoir le spectateur tout en lui apportant un éclairage nouveau sur un personnage qu’il a aimé ou admiré.
Ces préoccupations artistiques s’accompagnent bien souvent de questionnements plus terre-à-terre. Dès la pré-production, de nombreuses questions sont en effet sur le feu. Le choix des acteurs, par exemple, peut symboliser un vrai dilemme. L’interprète doit, en effet, satisfaire l’équipe du film mais aussi le public et les ayants droits de la personnalité concernée. Sacha Baron Cohen, par exemple, fut longtemps pressentie pour le rôle de Freddie dans Bohemian Rhapsody. Les membres du groupe, au courant de la réputation plutôt …sulfureuse de l’acteur, n’était pas tous d’accord sur ce choix.
Extrait du tournage de Bohemian Rhapsody, Bryan Singer & Dexter Fletcher
Ce genre d’incident diplomatique est donc à prendre en compte quant aux choix faits sur le tournage au risque de perdre un temps et des billets verts précieux. Il arrive parfois même que le film soit totalement répudié par les proches comme ce fut le cas du Yves Saint Laurent de Jalil Lespert auquel Pierre Bergé à refuser sa bénédiction. Les maisons de disques et autres marques créées par la personnalité dont il est question sont également à prendre avec des pincettes. Le film peut, en effet, représenter plus qu’une oeuvre mais un véritable coup marketing apportant un regain d’intérêt pour l’oeuvre de leur créateur. Une véritable partie d’échec donc où chacun veut poser ses pions.
Les attentes du public / le message d’un biopic
Le premier à contenter cependant reste le spectateur. C’est lui en effet qui décidera in fine de la qualité et surtout de l’avenir du film.
Le biopic, c’est donc une arme puissante. Il s’agit d’une très astucieuse façon de faire passer un message qu’il soit politique ou non par le biais d’un storytelling attirant. La personnalité choisie pour être représentée est souvent appréciée dudit public qui va éprouver du plaisir à le voir mis en scène voire apprendre de nouvelles anecdotes. De célébrités, elles passent alors à presque demi-dieux, immortalisées sur l’écran comme Jésus et ses apôtres sur les vitraux d’une église de campagne. On en occulterait presque (on a dit presque hein) les parties sombres de l’histoire comme, par exemple, la relation trouble de Coco Chanel avec l’Allemagne nazie et les Wertheimer. Des éléments peuvent même être (quelques peu) transformé pour satisfaire le propos du film comme cela s’est vu sur The Social Network que Mark Zuckerberg déteste, lui reprochant de le faire passer pour un véritable loser solitaire avant d’avoir l’étincelle. “Si le film voulait être vraiment proche de la vérité, ils auraient dû me filmer pendant deux heures face à mon ordinateur parce que c’est comme ça que c’est arrivé. En travaillant”, déclarera-t-il.
The Social Network, David Fincher (2010)
De nos jours considéré comme une “valeur sûre”, le biopic est souvent vu par les producteurs comme une opération à risque limité puisque le public est déjà conquis par le personnage lui-même. Sa production et sa réalisation ne figurent pas une partie de plaisir cependant. De nombreux éléments entrent en compte avant même que le film ait vu le jour. Le biopic apparaît cependant comme un formidable outil de divertissement …mais pas que. Après si on part sur un Abraham lincoln, chasseur de vampires là, beh on peut plus rien faire.
L’entrepreneur fait partie des meubles au cinéma. Dans sa première version, l’homme d’affaire, il est en effet représenté assez rapidement. Si cela ne dépasse pas vraiment le cadre patronat/salarié en colère dans un lutte des classes comico-satirique, il va connaître son heure de gloire à la fin du XXe siècle et surtout dans les années 2000’s. La montée de l’occidentalisation du monde et du libéralisme va effet conduire à une vénération de cette figure. Petit frère du self made man des débuts, l’entrepreneur est le fer de lance d’un pays qui s’est imposé comme le plus gros pourvoyeur de rêves en long métrage. Le déploiement des technologies et autres réseaux connectés de la fin du millénaire apporte alors l’étincelle qui fera s’embraser le storytelling d’un nouvel Hollywood
I°. Le macho (style mad men) dans les 60’s
L’homme d’affaires se démarque véritablement dans les années 1960’s. Le monde s’est lentement remis de la WW2. La société de loisirs et de consommation se met en marche. La guerre froide, surtout, fait rage. Les USA et le capitalisme usent de leur meilleure arme : Hollywood. Les Etats mettent ainsi en place ce qui deviendra le Nirvana de milliers de jeunes gens. Le storytelling à l’américaine s’installe et s’enracine. Avoir sa villa sur Beverly Hills comme les légendes du cinéma, devenir millionnaire à New York… Voilà ce qui fait désormais rêver les classes populaires.
How to marry a millionaire, Jean Negulesco, 1953
L’entrepreneur ici est plutôt classique, presque discret. L’homme d’affaire est souvent macho et conscient de son pouvoir qu’il n’hésite pas exercer à l’image des célèbres Louis B.Mayer ou encore Hearst. La société vivant encore sur un modèle cloisonné : la femme reste à la maison et les hommes travaillent jusque tard en ville. Les vacances se passent aux Hamptons quand Monsieur n’a pas séminaire à Paris. Il a souvent une ou plusieurs maîtresses qu’il peut largement faire vivre (voire loger) grâce au billets verts et surtout au pouvoir que lui procure ce statut.
II°. Le bling (1980-2000’s)
Avec le tournant de l’hyper consommation des années 1980’s, l’homme d’affaires se multiplie. Faire carrière devient plus simple avec la floraison de domaines tels que la publicité, le divertissement ou encore les loisirs et les technologies. Tout est joie. Tout est plastique. L’homme d’affaire a réussi et n’hésite pas à la montrer. Dans une société où l’apparence prend de plus en plus d’importance, on affiche son rang social. On aime les hommes riches, clinquants, brillants. Les femmes en font des sex-symbols et les hommes rêvent de leur ressembler.
Ce que veulent les femmes, Nancy Meyers, 2000
Cette belle utopie est livrée cependant avec une belle part d’ombre. Obscurité que l’époque ne tente pas tellement de cacher. Superficialité des relations, exploitation des plus petits, sexisme… L’homme d’affaire est riche et beau mais très souvent pas opportuniste et irrespectueux.
Cependant, il faut l’avouer, il y a là une nouveauté à ne pas négliger: les femmes font leur entrée (timidement mais sûrement) dans le champ des postes à responsabilité.
III°. Le start uper (2010’s…)
Joy, David O’Russel, 2015
Au début des années 2010, une nouvelle facette de l’homme d’affaires émerge à l’écran: le fameux entrepreneur. Il se différencie de ses prédécesseurs en ce que son parcours tient presque du miracle (et de beaucoup de travail). L’entrepreneur, donc, part souvent de rien. Il s’agit même souvent d’un loser, geek harcelé à l’école ou encore femme au foyer qui a du potentiel et surtout une bonne idée. Il va alors travailler dur pour faire de son rêve une réalité. L’entrepreneur est visionnaire et déterminé. Il n’écoute pas les critiques et continue son ascension coûte que coûte.
David Fincher, David Fincher, 2010
Une nouvelle image qui se comprend au regard du contexte socio-politique de la fin des années 2000’s. La crise financière mondiale impacte chaque couche de la société. Le bling est alors jugé trop provocant. Le public a soif d’espoir et c’est ce que le cinéma (enfin Hollywood et son merveilleux storytelling) qui va lui fournir. On préfère alors partir de la base et parfois même encore plus bas, de l’échelle sociale pour monter jusqu’à l’Olympe. L’entrepreneur c’est alors le nouvel Hercule, celui qui surmonte toutes les épreuves pour atteindre le pays des dieux, Hollywood et New York qui s’accompagne désormais de Palo Alto et autres icebergs de la Silicon Valley.
La figure de l’entrepreneur fait rêver depuis maintenant plusieurs décennies. Il est toutefois principalement lié à l’American Dream et tout le storytelling autour de la Terre Promise des US. Outre Atlantique, toutefois, il est resté encore très souvent prétexte à la dénonciation sociale. Il est ainsi très souvent montré en dichotomie avec l’univers de l’usine, des petites mains.Son univers est plutôt froid tant dans l’humain que dans les décors eux-mêmes. Le chef d’entreprise et par extension le cadre, dans le cinéma français vit en général dans un milieu sans scrupules et doit se battre pour rester au pouvoir au point de parfois s’oublier lui-même. Une dichotomie qui mène souvent à la violence, la méfiance ou à des comédies plutôt savoureuses.
Souvent utilisée sur nos écrans pour ses vertus récréatives, la drogue au cinéma fait souvent montre de son double visage. La défonce c’est aussi, en effet, l’addiction, la dépression, l’isolement et plein d’autres petites choses sympas. Ce côté obscur fut largement usité au cinéma avant d’être occulté au cours des 60s au profit des visions psychédéliques. C’est les années 1990’s et la culture grunge qui ont alors permis un revival de cette drogue moteur de la déchéance. Depuis, bad trip et voyages dimensionnels se mêlent dans une vision de la drogue entre nuance et malaise…
Du fun et des souvenirs
Le bad trip n’est pas forcément noir et sombre…enfin sauf pour celui qui le subit. Il participe même régulièrement d’une image comique du drogué. L’exemple le plus flagrant en est le succès de Very bad trip (Todd Phillips, 2009). Le raz de marée fut tel qu’une série de long métrages a suivi. De nombreuses répliques sont également devenues cultes comme “Je me considère comme une meute d’un seul loup” (pour n’en citer qu’une). L’un des plans est d’ailleurs devenu l’un des mêmes les plus utilisés des internets.
Cette image comique ont en trouve des occurrences assez variées depuis lors et même tout au long des insouciantes années 2000’s. La crise financière vient alors à nouveau assombrir le regard.
De l’esthétique de l’horreur
Plus encore que le trip, rendre le bad trip à l’écran est un cas d’école. Il s’agit en effet de rendre l’horreur des hallucinations et surtout de diffuser ce sentiment de malaise jusqu’aux tréfonds de la cervelle des spectateurs. Couleurs et luminosité, ralentissement ou accélération du rythme, plan rapproché mais aussi travail du son, le cinéma offre une quantité astronomique de possibilités.
Gaspar Noé, par exemple mais c’est presque une habitude chez lui désormais, dans son Enter the Void (2010) préfère utiliser une charte chromatique extrêmement saturée et un son agressif. Tous les sens sont en éveil mais c’est pour mieux être agressé. On en prend plein les yeux. A la manière presque d’un John Waters, le malaise est présent.
Darren Aronofsky, quant à lui, fait plonger la mère du personnage principal, Sara, dans une sorte de déréalisation méta. Télévision, cinéma et réalité et fiction, tout se mêle lentement, presque sans bruit avant l’explosion.
Quand la réalité dépasse la fiction
Les années 1990’s et 2000’s ont apporté cependant une nouvelle dimension à ce fameux bad trip. Désabusé par l’informatisation et la standardisation d’une société libérale, le drogué fait figure d’outsider. La drogue est alors une échappatoire. Le trip devient le safe lieu et l’on fait tout pour ne pas le quitter. L’addiction, alors, fait petit à petit son chemin. Le drogué plonge du côté obscur et devient un junkie. Il ne peut plus décrocher mais ne le souhaite pas vraiment non plus.
1. Trainspotting, Danny Boyle, 1996 / 2. Requiem for a dream, Darren Aronofsky, 2001
Le bad trip finalement est à l’image même de la drogue au cinéma. Il est double, tantôt expérience comique, tantôt traversée de l’enfer. Il est surtout un matériel de choix quant à la création du malaise, l’identification et surtout l’implémentation d’un discours politique et sociétal.