Un été au Cameroun : Une mosaïque bariolée entre racines et modernité (1/3)

Un été au Cameroun : Une mosaïque bariolée entre racines et modernité (1/3)

Cet été, l’équipe de Purple Haze souhaitait vous faire un peu voyager, et vous propose de poser vos valises dans “l’Afrique en Miniature”, c’est-à-dire le Cameroun ! Bienvenue au pays des crevettes (les Espagnol ont baptisé le fleuve Wuri Rio Dos Camaroes car ils y ont trouvé beaucoup de crevettes, depuis le nom a évolué pour donner Cameroun). Ici, vous trouverez un petit tour d’horizon de ce qui se fait au niveau artisanat, et industries culturelles. Bonne lecture !

Artisanat

Les formes d’artisanat que vous rencontrerez le plus souvent au Cameroun sont le tissage, la sculpture, la forge et le moulage, la broderie, la tannerie, la vannerie et la poterie. Elles sont toutes très bien implantées dans les grandes villes camerounaises aujourd’hui et ne se rencontrent plus uniquement dans les parties rurales, plus traditionnelles, du pays. Il est ainsi très facile d’aller voir directement un artisan pour faire sur mesure ses meubles, sa décoration, ses bijoux, ses vêtements etc…

Le tissage, comme les autres types d’artisanat d’ailleurs, varie d’une région à l’autre. Ainsi, dans l’Extrême-Nord, notamment dans les environs de Rhumsiki, les tisserands fabriquent des tissus et des nattes à partir du coton à l’état brut de paille séchée ; dans l’Ouest, les artisans Bamouns utilisent, eux, des fibres de coton pour produire leurs différents tissus traditionnels, de même que dans le Nord-Ouest (le toghu par exemple à Bamenda), notamment à Bafut, à Ndop (d’où le nom du tissu bleu très reconnaissable que vous pouvez voir un peu partout) et à Bali. 

La sculpture, elle, se fait soit sur bois, comme dans l’Ouest et le Nord-Ouest où sont fabriqués des masques, des statues, mais aussi du petit mobilier, soit sur ivoire, comme dans le Sud.

Les forgerons jouent également un rôle très important au Cameroun. Ils sont quasi sacrés dans certaines régions. Ce sont eux qui fondent le minerai de fer (mais aussi le laiton ou le cuivre) pour fabriquer des armes, des masques, des statues ou qui effectuent le travail d’orfèvre, dans les grandes villes du pays surtout, pour confectionner des bijoux en or ou en argent.

La broderie est surtout présente chez les Bamouns et dans le Nord, tandis que la tannerie, qui produit des ceintures, des chaussures et de la maroquinerie, est une particularité de l’Extrême-Nord (notamment à Maroua qui se trouve dans le Sahel).

La vannerie est quant à elle plus spécifique aux régions de forêts, car les artisans se servent du rotin, abondant dans ces régions, pour fabriquer des meubles.

Enfin, la poterie est quant à elle présente dans tout le pays, et l’argile sert essentiellement à la confection de pipes, de jarres et d’assiettes. Vous trouverez la plupart de ces objets sur les marchés des villes ainsi que dans les centres artisanaux du Cameroun, comme à Foumban et à Djingliya. Alors rendez-vous au “marché des fleurs” à Douala ou au centre artisanal de Yaoundé pour faire quelques emplettes.

Cinéma

Extrait de « Aventure à Paris », Jean Paul Ngassa
Thérèse Sita Bella, date inconnue

Le cinéma camerounais est né très tardivement. Ceci pour une raison évidente, la culture et la politique étant étroitement liées, il a longtemps été celui de la colonisation, c’est-à-dire le cinéma européen. Le cinéma camerounais débute donc à Paris avec un documentaire de Jean-Paul Ngassa, Aventure en France, réalisé en 1962 sur la situation des étudiants camerounais en France. Il est alors étudiant de l’IDHEC (Institut des hautes Études Cinématographiques de Lille). Ce thème va ensuite inspirer Thérèse Sita Bella, la réalisatrice de Tam-tam à Paris en 1963. De retour au pays, Ngassa se met au service du jeune État et produit plusieurs films, notamment de propagande, comme Une nation est née en 1970. Alphonse Beni se distingue par la diversité des thèmes abordés, réalisant entre 1971 et 1985 des films disco, des policiers et des films érotiques. Ce n’est réellement qu’après la décolonisation, en 1960, que l’idée de promouvoir un cinéma national émerge dans le pays.

Les premiers longs métrages camerounais sont en effet sortis seulement en 1975. Le premier que nous pouvons citer est Muna Moto (L’Enfant de l’autre), de Jean-Pierre Dikongué Pipa. Muna Moto est un film grave, qui met en exergue les relations entre l’homme et la société dans laquelle il vit. Il a reçu, entre autres distinctions, la palme d’or du film africain au festival de Genève en 1975 et surtout le grand prix du Fespaco (Étalon de Yennenga) en 1976. Dikongué Pipa recevra avec d’autres films plusieurs lauriers dans des festivals et la reconnaissance du grand public. Il en est notamment de : Histoires drôles, Drôles de gens en 1983 et Courte maladie réalisé en 1987.

En 1975, Pousse-Pousse, de Daniel Kamwa, sort sur les écrans. C’est une comédie de mœurs traitant du problème de la dot. A sa sortie, ce film bat les records d’entrée dans les cinémas de Yaoundé et de Douala, avec 24 000 personnes venues le soir même. Devant un tel succès populaire, le réalisateur décide d’exporter son long métrage, qui connaît alors le même succès, en Côte-d’Ivoire et au Sénégal notamment.

Ces 2 premiers grands réalisateurs camerounais, Jean-Pierre Dikongué Pipa et Daniel Kamwa, ont inspiré de nouveaux réalisateurs très prometteurs comme Bassek Ba Kobhio, réalisateur entre autres de Sango Malo (Le Maître du Canton), sorti en 1991 et sélectionné au festival de Cannes, et par ailleurs fondateur du festival de films Ecrans noirs, le deuxième en importance d’Afrique noire francophone, qui se tient tous les ans fin mai, début juin dans la capitale camerounaise.

Le Festival du cinéma  » Ecrans noirs « , qui a fêté sa 18e édition en 2014, a révélé les années précédentes des cinéastes tels que Waa Nkeng Musi avec le film On the Brim, ou encore Tikum Titus avec le film Great Passion, des films du Cameroun anglophone. Une des Palmes d’or remarquées avait été remise au long métrage burkinabé Julie et Roméo. L’Écran de l’espoir avait quant à lui été délivré au Camerounais Jean-Jacques Ndoumbè pour son court métrage Sur le chemin de mon rêve.

Littérature

La littérature camerounaise est jeune, car contemporaine : elle débute en fait en 1920, lorsque le roi Njoya invente l’alphabet Bamoun, permettant ainsi d’écrire et de décrire la chronique, la tradition, l’histoire. Le premier véritable écrivain camerounais est Jean-Louis Medou Njemba, et la première œuvre de littérature est Nnanga Kon, parue en 1932. Par la suite, de nombreuses figures du monde artistique et littéraire se sont succédé jusqu’à nos jours. La littérature est avant tout profondément marquée par les traditions africaines, c’est-à-dire basée sur l’oral et sur des fondements très anciens. Traditionnellement, les poètes récitaient les poèmes en s’accompagnant du mvet, sorte de harpe de 4 à 7 cordes. Ces poètes étaient qualifiés de  » troubadours « , alliant le texte à la musique. Cette  » littérature  » camerounaise reste basée sur l’oral jusqu’à la venue du roi Njoya à la fin du XIXe siècle. Il est l’un des premiers à rédiger ses textes sur papier. Son ouvrage le plus célèbre est le Livre des remèdes et des guérisseurs. En 1930, Isaac Moumé-Etia, auteur d’une grammaire du douala (langue parlée par les Peuples Sawa dits les Peuples de l’eau dans la ville de Douala et autour), publie un recueil de contes en français et en douala. Malgré cette unique tentative en Afrique noire et malgré l’islam qui avait apporté l’écriture au nord du Cameroun, ce n’est qu’avec la colonisation de la France et de l’Angleterre que le pays rentrera réellement dans la civilisation écrite. La majeure partie de la littérature camerounaise est rédigée en français durant les années de la seconde guerre mondiale. Elle est très riche et variée, allant des travaux historiques, tels ceux du R.P. Engelbert Mveng (Peuples et civilisations de l’Afrique antique, Histoire du Cameroun, Arts d’Afrique noire), aux études plus précises comme celles publiées par Enock Kahe Kwayeb, les Institutions du pays Bamiléké.

L’après-guerre est marquée par ce que l’on appelle le  » courant de la négritude « . Il naît dès 1948. Ce courant va influencer 2 jeunes poètes militants : Sengat Kuo et surtout Elongue Epanya. Le premier de ces 2 écrivains est l’auteur de Fleur de latérite. Il utilise un pseudonyme, Francesco Nditsouna, sous lequel il écrira durant de nombreuses années. Elongue Epanya joue un rôle important dans la littérature camerounaise, car il est le premier écrivain qui fait éditer ses poèmes dans sa langue maternelle, le douala, et en français. Nous pouvons affirmer que le réel mouvement littéraire camerounais naît à cette époque. Il ne date donc que du début des années 1950. Cette date d’origine d’un courant intellectuel prouve le retard important du point de vue culturel du pays. Mais ce retard va être vite comblé avec l’arrivée dans le monde littéraire de deux grands auteurs des premiers romans camerounais : Mongo Beti et Ferdinand Oyono. Une multitude d’autres talents vont être effacés du public par le charisme et la mainmise sur la littérature de ces deux grandes figures du mouvement de la négritude. Ces auteurs sont quasi inconnus de nos jours comme ils l’étaient dans les années 1950.

Comme dans de nombreux arts, l’évolution de la littérature camerounaise se fait en parallèle avec l’évolution de l’histoire politique du pays. En effet, à partir de 1960, date de l’indépendance du Cameroun, le mouvement de la négritude préconisant l’obsession de la couleur noire va petit à petit disparaître, grâce à sa victoire sur le plan historique. Les intellectuels ne ressentent plus la nécessité d’écrire sur ce problème qui est en train de se résoudre. Du coup, les genres et les thèmes de la littérature camerounaise vont se diversifier. Le courant de pensée qui va s’installer est un courant basé sur la tradition camerounaise. Les auteurs vont puiser dans le répertoire ancien qui était, comme nous l’avons vu ci-dessus, un répertoire oral. De ce répertoire oral (des contes, des fables…), les auteurs vont extraire une nouvelle substance et l’arranger à leur façon, c’est-à-dire que des anciennes histoires fantastiques, par exemple, vont se transformer par l’écriture en grandes épopées historiques. Le genre à la mode à cette époque est en effet le roman d’épopée, le récit d’aventure, que l’on peut comparer avec le roman du Moyen Age en Europe. Ces histoires vont devenir très populaires au Cameroun à partir de 1963, date à laquelle est créée une maison d’édition qui permet au grand public d’accéder plus facilement à ce genre de lecture. Il s’agit de la maison d’édition CLE (Centre de littérature évangélique). Le but de cette maison est de promouvoir la littérature écrite par des Africains pour des Africains. Elle fournit toute l’Afrique noire. Les livres sont même vendus dans certaines librairies spécialisées européennes. Les auteurs du nouveau style traditionaliste sont Benjamin Matip, auteur de Afrique nous t’ignorons et du Jugement suprême, une pièce de théâtre à grand succès. Matip va obtenir un franc succès en adaptant en français des contes traditionnels. C’est le cas notamment de A la belle étoile. Nous pouvons citer également Gaspard et Françoise Towo-Atangana, qui ont traduit et publié Nden-Bobo ou Le Conte de l’araignée. Le dernier auteur célèbre de ce courant est Jacques-Mariel Nzouankeu. Il a en effet connu un grand succès avec son roman Le Souffle des ancêtres, chef-d’œuvre dont les thèmes sont inspirés des sources mystiques du folklore camerounais. Cet auteur écrira également des pièces de théâtre et de la poésie. Parallèlement à ce côté traditionaliste, un fort courant poétique naît au Cameroun à cette époque. Il s’agit de poésie qui sera soit en prose, soit en vers. Les thèmes sont variés et sont en rapport avec l’évolution de la société camerounaise. On nomme généralement ce courant la Thématique moderniste. Les deux auteurs les plus célèbres de ce courant sont Francis Bebey et Joseph Owono.

La poésie et le théâtre

La poésie camerounaise, si elle n’est pas utilisée pour traiter des problèmes sociaux, parle d’amour. Les auteurs représentant ce style littéraire sont René Philombe, Okala Alane, Ernest Alima et Léon-Marie Ayissi. Nous pouvons également citer l’abbé Charles Ngandé. Ces auteurs sont connus dans le monde de la littérature pour avoir su se démarquer du style poétique lyrique européen. Le style qui découlera ensuite de cette évolution littéraire est le théâtre, qui connaîtra un grand succès au Cameroun, car c’est un genre qui convient bien à cette population gaie, ayant une grande sensibilité théâtrale. Les premiers grands auteurs de pièces de théâtre sont des auteurs connus dans d’autres genres littéraires comme par exemple Jacques-Mariel Nzouankeu, Benjamin Matip ou encore René Philombe. Mais le plus célèbre est sans aucun doute Guillaume Oyono-Mbia. Il est l’auteur le plus lu des éditions CLE. Sa pièce, Trois prétendants… un mari, est en effet devenue un succès national et international. Elle recevra en 1970 le prix El Hadj Ahmadou Ahidjo. Elle met en scène des passages typiquement camerounais de la vie de tous les jours, avec une sensibilité et une inspiration puisées dans les lectures de son maître à penser : Molière. Cette pièce est l’une des seules du théâtre camerounais à avoir connu le succès à la fois sur scène et en librairie.

D’autres auteurs célèbres de pièces de théâtre sont : Jean-Baptiste Obama, Pabé Mongo, E.N. N’embe, Werewere-Liking (grande artiste pluridisciplinaire camerounaise, elle vit maintenant en Côte d’Ivoire où elle a ouvert son propre lieu culturel Le Village Ki-Yi à Abidjan), Y. Karone. La satire tragi-comique les inspire souvent, notamment Kouma N’Dumbe III, Franz Kayor plus connu sous le pseudonyme de Paul Tchakoute, René Philombe, Dave K. Moktoï, ayant comme patronyme David Kemzen Mokto. Il faut ajouter à cette liste quelques grands poètes, comme Paul Dakeyo (L’Enfant-pluie a reçu le prix Saint-Exupéry en 1994), Stanislas Awono et surtout Antoine-François Assoumou, au destin aussi fulgurant qu’un Radiguet, puisqu’il mourut à seulement 17 ans. Relancée par une association dénommée “La Ronde des Poètes”, la poésie camerounaise a retrouvé de nos jours une seconde jeunesse.

Mongo Beti

C’est l’une des figures majeures de la littérature camerounaise. Alexandre Biyidi Awala est né en 1932 à Mbalmayo, près de Yaoundé, et a été, tout au long de sa vie, un grand défenseur des droits de l’homme et des libertés pour son peuple. Agrégé de lettres, il a accompli toute sa carrière au lycée Corneille de Rouen, en publiant parallèlement de nombreux ouvrages. Alexandre Biyidi Awala est sans conteste un écrivain engagé, ce qui lui a valu d’ailleurs quelques tracas, tant dans son pays où il est retourné dans les années 1990, qu’en France où il a parfois stigmatisé les incohérences de la politique africaine. Il a écrit Main basse sur le Cameroun, Les Deux Mères d’Ismaël Dzewatana, L’Histoire du fou. Sous son pseudonyme Mongo Beti, il publie Ville cruelle en 1953 et Le Pauvre Christ de Bomba. Dans Ville cruelle, Mongo Beti lutte contre le colonialisme européen, relate les nombreuses aliénations subies par le peuple africain dans les villes coloniales. Il réalise une critique virulente qui engendrera tout un nouveau courant de pensée. Dans Le Pauvre Christ de Bomba, il lutte également contre la société africaine traditionnelle, mais dans ce nouvel ouvrage, l’ironie et l’humour sont omniprésents. Cet auteur révolutionnaire accroît encore sa popularité avec les livres Le Roi miraculé et Mission terminée. Dans ces deux romans, il rompt avec ses anciens écrits, souvent dominés par des questions politiques, tout en gardant un fort caractère de militant. Ce changement l’écarte du  » mouvement de la négritude « , ce qui lui attirera les foudres des adeptes de ce courant littéraire. Il sera néanmoins à l’origine d’une nouvelle génération d’écrivains camerounais, désireux de suivre son exemple et de se démarquer de la  » négritude « . Ses derniers romans : Trop de soleil tue l’amour (1999), Branle-bas en blanc et noir (2000) et, à titre posthume, Africains si vous parliez (2005). Mongo Beti est décédé le 8 octobre 2001 à Douala.

Un été au Cameroun : Lydol

Un été au Cameroun : Lydol

Comment faire une série sur le Cameroun sans parler du slam et de ce fait, sans parler de l’artiste bamiliké (peuple de l’Ouest du Cameroun) LYDOL ?

Tout d’abord, petit point sur la pratique du slam qui, en France, a été popularisé surtout par Grand Corps Malade. Le slam est un genre musical qui peut être défini comme de la poésie déclamée, accompagnée ou non par de la musique. Le slam est bien souvent un genre engagé et le texte est au centre de l’œuvre.

Le slam est donc militant et on peut dire que Lydol l’est également. Ses thèmes de prédilections sont l’égalité des genres, la violence basée sur le genre et la défense du patrimoine camerounais. Elle a d’ailleurs créé une association de défense des droits des femmes au Cameroun en 2022 appelée SheHeroes.

Lydol a toujours écrit sans vraiment y réfléchir jusqu’en classe de première où elle découvre l’œuvre d’Engelbert Mveng « Balafon ». Elle fait alors attention à son écriture mais n’ose toujours pas partager ses écrits. C’est alors en 2016, dans l’émission “l’Afrique a un incroyable talent” que le grand public la découvre. Elle subjugue le jury (composé à l’époque de Angélique Kidjo (Chanteuse d’origine béninoise multi récompensée et reprise par les Kid’s United…), Claudia Tagbo (Humoriste originaire de Côte d’Ivoire) et Fally Ipupa (Chanteur né à Kinshasa au Congo) – et oui quand même !) quand elle improvise à partir de mots proposés par ce dernier. Lydol n’était pas étrangère aux scènes et aux compétitions avant ce coup de projecteur mais il faut bien avouer que le passage à la télévision accélère les choses.

En 2018 elle sort son premier album « Slamthérapie », titre évocateur qui évoque le pouvoir de cet art sur sa vie. Le titre phare de l’album est alors Le Ndem : une ode au Camfranglais, langue argotique mélange du français, de l’anglais et de mots provenant de plusieurs langues ethniques parlées au Cameroun. Le succès est au rendez-vous mais il faut tout de même préciser qu’au Cameroun se faire une place dans le milieu de la musique reste très compliqué d’autant plus dans le milieu du slam, peu connu du grand public et qui reste un domaine très urbain, et surtout assez masculin.

Mais Lydol s’accroche et continue sur sa fabuleuse lancée ; entre ateliers slam, concerts et compositions de morceaux, personne ne semble l’arrêter. Elle collabore avec des artistes de premier plan du paysage culturel camerounais : l’humoriste Ulrich Takam, le chanteur Aveiro Jess ou encore Cysoul avec qui elle signe un duo en 2023. Qui est aussi la date de sortie de son nouvel album “Hybrid”. L’ album qui porte bien son nom car elle continue à aborder tous ses thèmes de prédilection en collaborant avec de multiples artistes, ce qui prodigue à l’album une variété dans les styles musicaux.

Gardez ce nom en tête ; non seulement ses textes sont travailés mais elle est aussi un sacrée performeuse. Lors de ces concerts elle donne tout : slam, danse, tenues de scène, énergie et tout sourire ! Un vrai bonheur. Sachez que peu importe votre humeur du jour, il y aura un titre de Lydol fait pour vous aujourd’hui !

#SORTIE : GARDEN OF DELIGHT, SISTERHOOD PROJECT

#SORTIE : GARDEN OF DELIGHT, SISTERHOOD PROJECT

Aérien, tripant, explosif, esthétique, puissant… on pourrait continuer longtemps la liste des qualificatifs pour décrire le duo Sisterhood project. Fondé en 2018 par Marie de Lerena et Dorothée Rascle (dite “Doo”), il compte à son actif deux albums dont le récent Garden of Delight, sorti le 25 mars dernier.

En alchimistes musicales, le duo explore les divers styles musicaux du trip hop au jazz en passant par le rock et s’appuie sur des harmonies vocales puissantes. L’album Sisterhood (sorti en 2018), l’EP Brotherhood (2020) et Garden of Delight (2022) sont ainsi de véritables odes à la créativité mais aussi à l’inclusivité. 

La production du Sisterhood project est, en effet, imprégnée de cette volonté de s’inscrire aux côtés des luttes féministes et minorités de genre. Marie et Doo ont à cœur de se joindre au débat autour de la société patriarcale et surtout de ses conséquences sur l’industrie musicale. A travers leurs textes, elles interpellent ainsi le public sur des concepts tels que le body positivisme, la liberté ou le sexisme. Elles insèrent également dans leur nouvel opus, Garden of Delight, une réflexion autour de la thématique écologique. 

Des textes pointus et qui vous empoignent, des arrangements aériens, Sisterhood project c’est engagé et planant et c’est surtout à surveiller de près absolument !

crédits photo de couverture : Sébastien Renault ou Laura Ma

#Les Escapades musicales: Joyce Babatunde

#Les Escapades musicales: Joyce Babatunde

La première fois que j’ai eu la chance de découvrir Joyce Babatunde c’est lors de ma première semaine au Cameroun. En effet, je me retrouve dans un concert privé, à domicile du Laboratoire de Bastos. Une sorte d’école de musique située dans les hauts quartiers de la ville de Yaoundé, au Cameroun. Je me retrouve donc dans le salon d’un professeur, dont j’ai totalement oublié le nom (toutes mes excuses) et trois artistes vont se succéder. Joyce était la deuxième à prester. Depuis ce jour je ne peux m’empêcher d’avoir un œil sur elle, suivre son travail. Car dès ce premier concert, alors encore plutôt inexpérimentée, elle a mis le feu tout simplement. Malgré le set up allégé dû au fait que le concert se déroulait dans un salon et la proximité immédiate du public, on remarque très vite que Joyce se sent à l’aise ;  qu’elle a même besoin de sentir cette chaleur émanant du public, elle s’en enivre et en redemande : nous aussi !

Comment alors vous décrire le style de Joyce Babatunde ? Elle navigue avec brio en pop, world, reggae, soul et rap ! On dirait qu’elle nous concocte mille chansons en une et pourtant tout s’enchaîne avec une telle fluidité ! Sa voix est là, posée, elle a un flow incroyable et son instru est formidable. Le plus génial est qu’à chaque fois que je la vois en concert elle évolue, elle affirme sa personnalité : c’est une artiste qui ne s’arrête pas de travailler et le travail paie ! Cette jeune femme anglophone de la région du Nord-Ouest du Cameroon décroche d’ailleurs le prix révélation dans la catégorie “musique” du Goethe Institut à Yaoundé dès 2018 ! En parallèle de ses études en droit des affaires, elle travaille sur un album studio.

Peut-être que quelques chanceux d’entre vous l’ont découverte à Montpellier ou Bordeaux en fin d’année 2021 car Joyce Babatunde (et quelques autres artistes camerounais) a eu l’opportunité de se produire en France dans le cadre du nouveau sommet Afrique-France. En bref, écoutez ce qu’elle fait, suivez-là sur les réseaux, intéressez-vous à son travail afin de lui permettre de remettre les pieds en France et en Europe. Cliquez sur les liens ci-dessous pour la découvrir, et vous m’en direz des nouvelles !

#Lesescapadesmusicales: Da Genius – MSAFARA, « un voyage poétique »

#Lesescapadesmusicales: Da Genius – MSAFARA, « un voyage poétique »

Venez à la (re)découverte d’une formation qui vient de loin, ou plutôt de très très loin. En effet, Da Genius est une formation à géométrie mouvante composée pour l’occasion de Gamil Dagenius Abdou Kamal-Dine et Yax et nous vient des Comores ; un archipel à plus de 7000 km de la France. J’ai eu la chance de les rencontrer et d’assister à l’une de leur performance scénique au Cameroun. 

Yax et Gamil ont, en effet, été invités à participer à un moment créatif, pendant une semaine dans un petit coin de paradis, appelé Souza, à 45 minutes de Douala. Cet endroit magique en pleine nature a accueilli des artistes et des auteurs plus ou moins expérimentés, originaires du continent africain en résidence afin de (re)trouver l’inspiration et se former en compagnie de grands noms de l’écriture tels que Hemley Boum ou encore Anne-Sophie Stefanini et le slameur Capitaine Alexandre.

Ce dernier a d’ailleurs partagé l’affiche du groupe lors du concert organisé à l’Institut Français du Cameroun de Douala. Les deux formations sont habitués à travailler tous ensemble depuis un certain temps. Ils collaborent notamment dans le collectif appelé “On a slamé sur la lune”.

Mais parlons-en alors des concerts !

A Douala, Yax et Gamil sont accompagnés de Marsi et de Serge Epah au cajon (une percussion en forme de boîte, originaire du Pérou), et Capitaine Alexandre en guest. Alors qu’ils n’ont pas eu tant de temps que ça pour tous se coordonner, on ressent une belle complicité dès les premiers instants. Les textes sont bien écrits, dénoncent, nous questionnent, nous touchent et on voyage encore plus lorsque Gamil et Yax nous proposent des morceaux en comorien.

En résumé, un très bon feeling, des instrus entraînantes que je retrouve à Yaoundé le vendredi suivant, cette fois-ci sans Capitaine Alexandre ni Serge Epoh. Le début manque un peu de calage mais rapidement, ils reprennent la main et le public se réveille pour les accompagner et demander même une petite prolongation.

En bref, n’hésitez pas à aller les soutenir notamment en écoutant l’album MSAFARA « voyage poétique », en streaming, et si l’opportunité se présente, assister à un de leur show.