Un vampire, c’est souvent l’atout séduction dans un film aujourd’hui. Lestat, Damon, Angel, Edward et leurs confrères aux dents longues ont fait soupirer bien des cœurs. A travers le papier mais surtout les grands et petits écrans, le vampire a opéré sa transformation de monstre repoussant à objet de désir coupable. Que s’est il passé ? Retour sur une figure de la pop culture …
Un rapport aux instincts
Le vampire, c’est avant tout une incarnation de notre part animale. Il n’est plus humain. Son corps a été réveillé par une quelconque malédiction mais sa conscience est restée prisonnière de l’au-delà. Il n’a plus aucun intérêt pour la chose sociale. Son seul besoin est purement naturel: se nourrir. Il acquiert ainsi suffisamment d’énergie pour pouvoir continuer à avancer et surtout à chasser. Tout comme dans le reste du monde animal donc, il n’est absolument pas question ici des notions du bien et du mal, ce qui importe pour le vampire, c’est la chasse. Plus rien ne compte si ce n’est l’instinct. On voit déjà se dessiner l’incarnation cathartique de nos désirs enfouis, de notre part bestiale. Ce lien est d’ailleurs beaucoup moins subtil lorsqu’on se penche sur la façon qu’il a de se nourrir. Une morsure profonde qui fera les choux gras de nombreux écrivains et scénaristes qui feront de celle-ci tantôt un moyen de créer un lien fort et intime avec la victime et tantôt une expérience vraiiiimmment sympathique.
Le démon tentateur
Des créatures de type vampirique, il y en a beaucoup dans les différents folklores. Il est dans la plupart, une créature proche du zombie vaudou lequel est régi par une autre puissance. Dans le cas du vampire, il s’agit bien souvent du Mal et surtout du Diable qui viendrait interférer dans l’ordre naturel de la vie et de la société. Le plus célèbre représentant de ces créatures, le comte Dracula tire même son nom de Dracul qui signifie dragon ou diable en roumain. Le Diable, donc, lequel est très lié ,justement, à cette animalité et à tout ce qui concerne les désirs enfouis. Une association qui s’est d’ailleurs renforcée avec l’avènement de la mystique judéo-chrétienne. Rappelons, pour exemple, que selon la légende (et le Malleus maleficarum) le Démon était censé coucher avec les sorcières qu’il avait réussi à séduire pendant le sabbat.
Le glow-up du millénaire
C’est toutefois à partir du XIXe siècle que l’image du vampire s’est considérablement transformée. La parution de Carmilla, Sheridan LeFanu (1872) est l’une des premières occurrences d’une tension homo-érotique voire carrément érotique dans une histoire de vampire. Le tournant le plus fameux, cependant reste le fameux roman de Bram Stocker qui fait de sa créature, un véritable personnage à part entière, doué d’une certaine conscience. Il sera d’ailleurs l’un des premiers à faire d’un vampire, un membre de l’aristocratie, riche et détenteur de châteaux et autres titres fonciers. Anne Rice, ensuite, à continuer de romantiser la créature avec son Interview avec un vampire.
Puis ce sera le cinéma et surtout les séries qui complèteront l’image moderne du vampire et l’assureront dans nos imaginaires. Un rôle qui assurera le succès de la créature grâce notamment aux productions de la Hammer, à l’adaptation de Coppola ou encore True Blood. Buffy, Vampire Diaries ou encore True Blood ont continué l’inscription du vampire comme une créature tragique liée à l’intensité du sentiment amoureux, comme un instinct dont on ne peut résister.
Les années 1990’s et 2000’s signeront ainsi l’âge d’or du vampire moderne. Ce sera, en effet, la déferlante des séries gorgées en hémoglobine et tension amoureuse voire érotique. Une nouvelle facette pour une créature qui n’a pas fini de hanter nos imaginations.
On en a fait du chemin depuis la créature du folklore antique et médiéval ! Tout d’abord, créature de la nuit, proche du rat et autres vermines, le vampire n’a plus rien à voir (ou presque) avec sa figure moderne. De créature sans conscience associée aux golems ou aux zombies vaudous, il est aujourd’hui un atout charme dans tout projet horrifique. Il est aujourd’hui, aristocrate ou en tout cas de la classe haute, attirant et surtout se rapproche désormais de la succube. Une figure parfaite pour une histoire romantique (voire érotique) sur nos écrans, petits et grands. Mais alors, peut-on encore compter le vampire parmi les monstres ou est-ce la fin pour son capital terreur ?
Un changement de paradigme
Le vampire a hanté nos nuits depuis l’Antiquité sous ses différentes formes suivant les folklores: strigoi et autres. A tel point que certaines traditions furent mises en place pour empêcher les morts de revenir. Il va se transformer petit à petit mais c’est véritablement le XIXe siècle qui posera les bases de sa forme moderne. Bram Stocker en fait un noble et un parfait gentleman, puis le roman Carmilla de LeFanu l’inscrit dans le monde merveilleux de l’histoire d’amour morbide et passionnée si chère au roman gothique. C’est ainsi que la littérature puis le cinéma vont peu à peu s’emparer de la créature pour en faire une figure parfaite tant pour le roman gothique que romantique. S’ il continue à utiliser ses pouvoirs pour manipuler ses proies, les fasciner et les séduire à la façon d’une plante carnivore, le vampire moderne a désormais une psychologie et, parfois, un cœur plein de conflits. Ce romantique torturé, devient donc le personnage parfait pour un arc narratif amoureux.
Ce sont les années 1990’s et 2000’s qui explorera à fond ce nouvel aspect du vampire… parfois jusqu’à l’overdose. Aux cultissimes Dracula de Coppola et Interview with a vampire qui le présentent comme un Roméo moderne succèderont la vague de Buffy contre les vampires, Vampires Diaries, Twilight, Van Helsing, Underworld, La Reine des Damnés, Blades, Une nuit en enfer, True Blood, Moonlight, Vampire Knight…
Notre créature devenu un véritable anti-héros voire un héros tout court, (éro)mantique, il apporte désormais une touche non négligeable de belle gueule, de tension sexuelle et d’histoires d’amours plus intenses que ton avenir.
Le vampire ne se démode pas
Le vampire n’a plus grand chose à voir avec la vermine de la nuit des débuts. C’est aujourd’hui une figure aux multiples facettes. Il peut, en effet, garder son côté animal ou à l’inverse, se repentir et chercher d’autres moyens de se nourrir voire tomber amoureux et se questionner sur sa nature monstrueuse. Parce que ce qui fait la longévité de la créature c’est surtout sa plasticité. Un personnage vampirique apporte, en effet, bien plus qu’un beau faciès mais aussi un sous-discours plus ou moins subtil. Il parle ainsi d’homosexualité dans Entretiens avec un vampire, de conflits politiques dans Underworld, de passage à l’âge adulte et d’identité dans Twilight. Il s’intègre donc parfaitement dans divers sujets qui, eux, ne se démodent jamais.
Malgré le tsunami érotico-romantique des années 1990/2000, le vampire a encore de beaux jours devant lui au sein de la (pop) culture. Sa plasticité et sa nature d’outsider monstrueux en fait une figure parfaite pour traiter de nombreux sujets de manière plus ou moins appuyée. Le vampire n’a donc pas fini de hanter nos nuits mais surtout nos écrans.
Pour une contre culture dont l’un des slogans les plus célèbres est “No Future”, le punk semble pourtant s’être bien ancré dans le paysage mondial. Il a connu bien sûr des modifications depuis son heure de gloire dans les années 1970-80. Issu de la contestation des classes ouvrières et de nombreuses références comme les penseurs situationnistes ou les artistes dada, le kepon a fait des petits comme le grunge, le post-punk, le cyberpunk… Au-delà de toutes ces déclinaisons, le punk, c’est avant tout un idéal, une philosophie qui s’imprègne notamment dans les différents médiums d’expression artistique à savoir, la mode, la musique, le graphisme et bien évidemment, celui qui nous intéresse ici: le cinéma.
Le goût de la provocation
Le mouvement punk sur grand (et petit) écran, c’est avant tout une envie de questionner à grand coup de 86 sur la tête. On cherche à se démarquer du commercial aseptisé et surtout conforme. L’objectif est d’interpeller le public, de l’amener à ressentir. Tout ceci dans une atmosphère souvent parodique car finalement, rien n’est véritablement sérieux si ce n’est la liberté. C’est d’ailleurs cette dimension humoristique qui fait une grande partie de la philosophie punk.
S’ils ne se revendiquent pas réalisateurs punks, les films de John Waters et Albert Dupontel incarnent bien ces valeurs.
Une esthétique caractéristique
L’un des piliers du punk au cinéma (et pas que d’ailleurs) est bien évidemment une identité visuelle et sonore caractéristique. La bande originale est souvent utilisée pour donner le ton à base de références musicales de la scène punk. La musique punk, donc, est régulièrement utilisée pour plonger dans l’univers d’une scène de baston, bien sûr, mais aussi plus largement de rébellion comme l’adolescence.
Le punk aime également ses plans assez serré, concentrés sur l’individu ainsi qu’une image vivante dans ses mouvements comme dans son traitement.
Le personnage punk
Ce qui va insuffler un peu d’esprit punk à un film, c’est aussi parfois un personnage. Réfractaire, bien souvent en marge, celui-ci personnifie à lui seul la philosophie de cette contre-culture. Parfois utilisé à des fins simplement humoristiques, le punk (ou son héritier) est souvent l’élément perturbateur, un agitateur, un provocateur (si tu n’as pas la référence, félicitations, tu as de bons goûts musicaux). Bref, le personnage punk est souvent celui qui permet de contester l’ordre établi tant pour le protagoniste principal que pour le public.
En dehors des films documentaires et des biopics comme Sid et Nancy sur le couple sulfureux du leader des Sex Pistols, l’esprit punk est encore aujourd’hui bien présent au cinéma. Références musicales, meilleur ami kepon du héros ou traitement d’un sujet par la provoc’, le punk n’a pas fini de nous interpeller.
Né au début du XXe siècle, le western est considéré comme l’un des premiers genres du cinéma. Initialement, il met en scène les mythes fondateurs des USA pleins de tuniques bleues, de tribus indiennes, de duels au pistolet et bien sur de grands espaces. Au fil des décennies, cependant il s’est politisé, “philosophisé” même. Les héros ont changé de camp, sont devenus moins manichéens et le discours s’est approfondi. S’il garde son caractère légendaire et fait toujours rêver toutes générations confondues, le western ne se limite plus aux frontières de la mythologie américaine.
Avant tout un peu de contexte
A ses prémices, le western est un genre littéraire. On y conte déjà les faits d’arme des tuniques bleues et surtout des héros de l’Amérique pionnière comme George Custer, défait à la bataille de Little Big Horn. On considère souvent que le premier film du genre fut Le Vol du Grand Rapide de Edwin S.Porter sorti en décembre 1903 et distribué par la Edison Manufacturing Company. Il connaît sa première heure de gloire au temps du cinéma muet. Rapidement, l’industrie se rend compte que ces récits d’aventures épiques se marient bien avec le burlesque, en vogue à cette époque. De nombreux noms de l’humour vont alors s’y frotter tel que Buster Keaton. Un ton comique qui restera l’un des piliers du genre à base de bruitages parfois surréalistes, de surenchère…
Le western connaît cependant un passage à vide au moment de la transition avec le parlant avant de retrouver les salles avec notamment les films de John Ford dans les années 1930’s. C’est à cette époque que le genre s’approfondit et se politise. Les films ne sont plus de longues odes à la gloire des grandes figures coloniales (grands noms militaires mais aussi le Pionnier). Il ne s’agit plus seulement de glorifier la victoire de la culture sur la nature (tant dans les “relations” avec les tribus autochtones que littéralement avec la naissance des villes et surtout du chemin de fer). Le western se dote ici d’une double lecture afin de décrire, et décrier, les maux de l’Amérique de l’époque. Les premières nations ne sont plus les grands méchants de l’histoire et deviennent parfois même des héros. Une avancée certaine pour l’époque même si l’amérindien est encore bien souvent campé par un acteur blanc grimé et serti de plumes.
Le western s’exporte bien. La portée légendaire du genre fait rêver le monde si bien qu’outre atlantique on se tente aussi au western. La France ou l’Allemagne s’y essayeront mais c’est en Italie que les USA rencontreront un concurrent sérieux. Appelé western spaghetti de façon sarcastique, le western à l’italienne à marqué l’histoire au point de s’inscrire profondément dans la culture du genre. Les films de Sergio Leone, par exemple, ont rencontré un succès immédiat et sont encore aujourd’hui des classiques du genre. Le western passe ici un cap et la portée de son message devient plus globale. Le grand méchant n’est plus le “sauvage” mais le promoteur qui exproprie les petites gens pour faire passer sa ligne de chemin de fer comme un écho avec les changements sociaux qui secouent l’Europe. Avec des influences diverses comme le japonais Kurosawa et une approche plus philosophique, le réalisateur italien donne au genre ses lettres de noblesse. A tel point que sa trilogie du dollar (Pour une poignée de dollars, 1964, Pour quelques dollars de plus, 1965 et Le Bon, la Brute et le Truand, 1966).
Ecrire sa légende
Bref, le western, ce n’est pas que des cow boys et des indiens qui se battent à coup de carabines. ça, un certain William Frederick Cody l’avait bien compris. Plus connu sous son surnom de Buffalo Bill, gagné au cours d’un duel qui l’opposa à un autre chasseur de bison en en tuant 69 contre 48 en une seule journée, Cody est aujourd’hui une légende de la conquête de l’ouest. Conscient qu’il assiste, fin XIXe, à l’extinction d’une époque faite d’aventure et de grandes plaines et surtout convaincu de l’immense potentiel de divertissement de celle-ci, il se lance dans une tournée de spectacles grandioses. Bisons, chevaux et véritables indiens se partagent la piste dans des reconstitutions (très) romancées de la conquête de l’ouest. Représentations après représentations, ville après ville, cette conquête ressemble plus en plus à une épopée légendaire et fait rêver le monde entier. L’American Dream s’inscrit dans la culture populaire. Le cinéma le marquera au fer rouge quelques décennies plus tard. Le western fait rapidement genre avec ses héros et ses demi-dieux comme John Wayne, Clint Eastwood ou John Fonda.
Un outil marketing
Le western est encore très apprécié de nos jours comme le démontre le succès de Django Unchained de Quentin Tarantino (2013). Les films de Ford ou même ceux de Leone sont aujourd’hui des classiques au panthéon de l’histoire du cinéma.
Le western c’est aussi l’un des piliers de la mythologie américaine et surtout du soft power nord-américain. Le cinéma en tant que divertissement de masse et surtout d’outil de propagande ultra puissant est un atout de choix dans l’attirail d’un pays dont l’histoire s’écrit (semble-t-il) seulement à partir du XVIe siècle. Une tradition si brillamment narrée par l’Olympe-Hollywood qu’aujourd’hui encore, le genre fait parler de lui comme l’illustre le succès du Django Unchained de Quentin Tarantino (2013).
Quelques classiques du genre à voir avant de mourir
Si il est UN film à retenir de la fin des sixties, c’est bien Le Lauréat ! S’il est souvent éclipsé au profit du célèbre Easy Rider, Le Lauréat, adapté par Mike Nichols d’après un roman en grande partie autobiographique de Charles Webb (selon ce dernier),pourtant, est un vrai condensé de la révolte culturelle qui se trame à ce moment précis. Là où Easy Rider explore les limites d’un mouvement sur le déclin, il se pose en véritable manifeste de ce même mouvement qui vit alors son heure de gloire. Un classique donc, tant dans le discours qu’il déploie que par sa forme avec des plans inhabituels pour l’époque et qui lui aura valu d’être considéré comme le point de départ du Nouvel Hollywood.
Les femmes au pouvoir
L’un des premiers éléments de rupture est la place qu’occupent les femmes tout au long du film. Alors, certes, il y a encore du chemin à faire. Les personnages féminins sont encore très marqués par la dichotomie de la vierge (Elaine) et de la putain (Mrs Robinson). Elles occupent cependant une place centrale dans l’action. Benjamin est ballotté entre deux femmes et leurs décisions de sorte que ce sont elles qui mènent la danse. Notre héros désabusé aurait pu se laisser guider par une figure paternelle, un mentor, un gourou mais ce sont les femmes Robinson qui l’entraîneront dans un imbroglio presque oedipien. On est alors tenté de faire le lien avec le revival des mouvements féministes de cette époque et notamment le Women’s International Terrorist Conspiracy from Hell ou Witch.
L’affiche, elle-même, traduit cette nouvelle place que commencent à se faire les femmes. On y voit, en effet, Benjamin posant avec une panthère noire, un symbole sensuel mais non moins dangereux.
La sexualité
La figure de la panthère, et plus largement du félin, est, en effet, largement associée aux femmes. Sa beauté, ses traits fins mais aussi ses mouvements souples ont très tôt inspiré ce lien dans l’imaginaire collectif dont le fameux chat noir, familier des sorcières en est l’exemple le plus répandu. On eût dit même qu’une sorcière pouvait se transformer en chat à l’envie.
Le félin, par ses mouvements lascifs, est aussi associé à la sexualité et surtout à la sensualité féminine. Dans Le Lauréat, le sexe prend en effet une toute nouvelle place. On en parle, il fait partie de l’initiation de Benjamin comme n’importe quel domaine de la vie mais surtout on parle du désir de Mrs Robinson, délaissée par son mari ou encore de sa grossesse. N’oublions pas, non plus, les célèbres plans subliminaux de poitrine féminine. Une approche résolument moderne du sexe à l’écran qui fait écho à la libération sexuelle de cette fin des sixties.
Jeunesse et révolte
Le film dans son ensemble est donc un condensé de la pensée des sixties. Il transpire de cette rupture entre une jeunesse avide d’expérience et un système dans lequel elle ne se reconnaît pas. Plusieurs scènes traduisent ainsi ce détachement de façon presque littérale. La scène du cadeau du père du jeune diplômé à celui-ci, par exemple, en est une allégorie aussi criante qu’un tableau. Engoncé dans un scaphandre peu pratique, Benjamin se voit obligé de faire une démonstration de l’équipement devant tout un parterre de relations de ses parents. Ne voulant pas les embarrasser, il saute dans la piscine sous le regard de tous qui le regarde plonger avec une joie polie. Son hublot devient son seul moyen de voir autour de lui mais son tuba l’empêche d’interagir.
La scène d’ouverture, déjà, nous présentait également un Benjamin blasé à l’aéroport. Il se laisse glisser le long du tapis roulant sans aucune expression. Des visages, des silhouettes passent sans lui prêter la moindre attention (il ne leur en prête pas non plus). On ne peut en distinguer réellement l’une ou l’autre et elles ne semblent être que des ombres colorées prise dans un ballet monotone sur le superbe The sound of Silence de Simon and Garfunkel.
Une bande son, d’ailleurs, qui restera estampillée sixties pour les décennies à venir.
Le Lauréat fait partie de la liste des films à voir avant de mourir. Par son sujet, le traitement qui en est fait, ses personnages et sa mise en scène, il casse les codes de l’ancienne garde et met en place ce qui devra le nouvel Hollywood. Surtout, le film de Mike Nichols cristallise toute une génération plongée dans une époque de grands changements sociétaux. Il déclare une nouvelle approche du monde mais laisse toutefois planer le doute quand à sa mise en pratique à l’image de sa scène finale qui laisse libre cours à l’interprétation.
Le cinéma est une fantastique plateforme pour qui souhaite faire passer un message. Du film historique à la mémoire des martyrs de la Shoah (Inglorious bastereds, La liste de Schindler …) au film politique engagé contre le racisme (Ten years a slave, Do the right thing, Blackkklansman …) en passant par le film éducatif avec Disney en pole position, nos bibliothèques Netflix et consorts sont emplis de ces plans qui valent plus que des discours. Plus souvent utilisé comme un élément de décor narratif que placé au centre de l’intrigue, la santé mentale est de plus en plus intégrée aux grandes questions fouillées par le cinéma. Il n’est plus si rare de voir des personnages principaux aux prises avec leurs addictions (Trainspotting, Enter the void…) ou la dépression (Happiness Therapy…).
Est-ce pour le meilleur ou pour le pire ? Petit tour d’horizon…
Le besoin de représentation
A la fin des années 1980’s et début 1990’s, le grunge s’installe. Comme en réponse aux représentations dorées et sourires ultra bright des 1980’s, ce nouveau courant réclame du vrai, les craquelures sous la belle peinture chromée. Kurt Kobain au premier plan, l’artiste se fait rockeur, bad boy sensible et réclame la libération des sentiments, de tous les sentiments (comme il n’est pas sans rappeler les Romantiques du XIXe siècles, cc Chateaubriand, Poe et Baudelaire).
Ce retour du sensible et surtout son succès commercial fait émerger de nouvelles oeuvres plus sombres avec une approche plus psychologique des personnages et du contexte. Ce qui permet pour certains leurs premières rencontres avec les troubles mentaux. Jusqu’ici tabou et assez mal compris, les troubles obsessionnels compulsifs, la dépression, les troubles alimentaires et d’autres sont mis alors sur le devant de la scène (quand ce n’est pas au centre) et des oeuvres comme Rainman (Barry Levinson, 1988) ou Requiem for a dream (Darren Aronofsky, 2000) répandent l’émoi et surtout lancent enfin le débat autour de ces pathologies et des vies qu’elles créent.
L’industrie du spectaculaire
Le cinéma, cependant, reste un divertissement de masse. Ce caractère de divertissement induit alors qu’ il faut que le film soit accrocheur, qu’il fasse passer un moment riche en émotions et la volonté d’en faire profiter un public le plus vaste possible implique de devoir s’adapter, aplanir. Le cinéma a donc pour fâcheuse habitude de se concentrer sur ce qui sera fort, spectaculaire et propre à marquer les esprits. Les phases maniaques, qui ne sont pourtant qu’une infime partie de certains troubles du comportements, sont ainsi montrées à outrance lorsque tout le reste (phases dépressives, différences dans l’acceptation du monde, répercussions physiques…) sont presque invisibles des écrans. Seule porte d’entrée dans la psycho-éducation de certains publics, le cinéma met ainsi en avant les pathologies ou les phases de certaines autres, qui inclut des délires parfois spectaculaires, bien loin donc de la réalité.
De l’importance du cliché
Le cinéma, s’il est un formidable vecteur de sensibilisation, peut aussi être une machine à clichés tout aussi formidable. Pensez à la représentation de l’autisme dans Rainman (Barry Levinson, 1988), par exemple. Il s’agit là d’une généralisation (un peu grossière) des troubles du spectre autistiques qui a malheureusement encore ses conséquences sur le comportements des non initiés face à ce genre de troubles (malgré le fait, qu’il ai pa La schizophrénie, encore, représentée dans Black Swan est là aussi extrêmement simplifiée et use et abuse du cliché de la double personnalité (trop) souvent liée à ce genre de trouble (le duo tutu blanc et noir). L’ Aviator de Martin Scorsese (2004), également, fait du trouble obsessionnel compulsif, une simple obsession de la propreté. Il y aurait encore énormément matière à pointer les incohérences et les images véhiculées par le grand écran. Le cliché, dans tout ce qu’il a de dévastateur, entretient ainsi une certaine méfiance (voire une exclusion) envers ces pathologies et laquelle peut faire beaucoup plus de dégâts que le trouble lui-même.