Couverture : L’Etrange créature du lac noir, Jack Arnold, 1954
Déjà bien présent dans la littérature, le monstre a trouvé dans le cinéma son média de prédilection. N’oublions pas que le cinématographe fut d’abord une attraction de foire. A ce titre, il divertit mais surtout surprend et fait peur. Le genre de l’épouvante est ainsi né relativement en même temps que son médium. On vient alors au cinématographe comme on va au train fantôme ou au cabaret voir les magiciens. Une fois passée la surprise de l’Arrivée d’un train en gare de la Ciotat en 1896, on prend également conscience du pouvoir narratif de la caméra.
Les pionniers
Le King Kong (1933) de Merian C. Cooper et Ernest B. Schoedsack fait date dans l’univers des monstres. Très gros succès au box office, il met les films de monstre sur le devant de la scène et notamment les scénarios d’attaques de monstres géants. Il ne s’agit cependant pas du premier film monstrueux et s’inspire notamment du Monde perdu de Harry O. Hoyt, produit par la RKO, et dans lequel Willy O’Brien aux effets spéciaux et marionnettes perfectionnera sa technique avant de travailler sur le set de … King Kong. Soit dit en passant, Steven Spielberg, lui-même, s’inspirera du même film au moment d’explorer pour la première fois son Jurassic Park (1993).
L’un des pionniers du genre restent cependant notre Georges Méliès national lequel a posé les bases du film de monstre avec son Le manoir du Diable (1896). Il s’agit d’ailleurs, excusez du peu, le premier film de vampire.
Le cinéma, c’est un fourmillement d’outils narratifs pour faire peur et traduire une ambiance frissonnante . Les multiples combinaisons existantes entre la monstration et la suggestion en font un terrain de jeu fabuleux pour troubadour gothique: bruit de porte qui grince, jeux d’ombres …
Ces outils narratifs font mouche notamment avec l’impressionnisme allemand lequel nous livrera quelques uns des plus beaux chefs d’oeuvre du cinéma.
Universal monsters : le film de monstre prend ses lettres de noblesse
Créé en 1912, la Universal Pictures est aujourd’hui l’un des plus anciens studios encore en activité avec, devant lui, Gaumont (fondé en 1895), Pathé (1896) et Nordisk Films (1906). Elle fait d’ailleurs partie des grandes majors américaines qui ont (et le font toujours) dominé le monde du cinéma au début du XXe. Des films cultissimes que l’on ne présente plus ont ainsi vu le jour sous la houlette de ces nouvelles “usines à rêves” rivalisant de paillettes et de têtes d’affiches prestigieuses. Dans un souci de différenciation au coeur du krach boursier de 1929, les studios Universal et Carl Lemme Jr, le nouveau maître à bord, vont se tourner vers un pan narratif encore assez peu vu à Hollywood : les monstres.
Dracula, Tod Browning & Carl Freund (1932)
Frankenstein, James Whale (1932)
La Momie, Karl Freund (1932)
C’est ainsi que vont naître du même coup : un grand nombre de code liés au film de monstres et au cinéma gothique ainsi qu’un rendu visuel de ces derniers qui leur collera à la peau encore aujourd’hui. Produite entre 1923 et 1960, cette série de films remportera un succès qui ne se dément pas grâce à des monstres issus de la culture littéraire et populaire. Citons ainsi : Dracula (1932) et l’inoubliable Bela Lugosi, Frankenstein (1932) et le make up de Boris Karloff qui définira notre vision classique du monstre, La Momie (1932), L’étrange créature du lac noir (1954) ou encore Tarantula ! (1955). La série fera les beaux jours des studios jusqu’à en faire une usine à monstre qui épuisera presque le filon avec des suites de suite de suite (La Maison de Frankenstein, le fils de Dracula,la fille de Dracula pour ne citer qu’eux ) ou encore de crossover (Frankenstein rencontre le loup garou par exemple). Le monstre devient marrant, sympathique et entre pleinement dans la pop culture.
Âge d’or avec la Hammer 1960-70
Si il est un studio que l’on ne peut dissocier de la vision moderne du monstre c’est bien la britannique Hammer Film Production !
La firme fondée en 1934, plutôt discrète et peu productive face à ses énormes concurrents américains. Elle va toutefois se démarquer dès la deuxième moitié des 1950’s. Elle secourra ainsi un genre qui commence sérieusement à patiner et marquera toute une époque avec sa “patte” si caractéristique. Le studio qui s’est spécialisé dans le film d’épouvante marquera donc notamment par l’une des premières utilisation du technicolor pour un film de ce genre, son esthétique gothique et un brin (mais juste un brin) erotico-subversif. Tout un symbole ! La firme s’appuie également sur des réalisateurs de talent et des acteurs devenu cultes : Christopher Lee et Peter Cushing en tête.
Christopher Lee dans la série des Dracula, Terence Fisher
Docteur Jekyll and Sister Hyde, Roy Ward Baker (1971)
Le conservatisme britannique des années 1980 et le désir du box office pour des histoires plus ancrée dans le réel à l’image de L’Exorciste (1973) auront cependant raison des studios cultes.
De nouveaux monstres
Au cours des années 1990/2000 et surtout au tournant 2010, apparait un nouveau type de monstre. La mondialisation des modes de vie et la bulle internet font de l’altérité une question moins inquiétante que l’inconscient humain, la monstruosité de son côté sombre et la zombification des masses. Le monstre se fond ainsi avec l’humain. Le monstre devient Jack Torrance dans Shining (Kubrick, 1980) ou Hannibal Lecter dans Le Silence des Agneaux (Jonathan Demme, 1991)
Une nouvelle catégorie de monstre voient également son heure de gloire comme un miroir aux peurs de l’époque : l’Alien et la peur du vide intersidéral, le cyborg et l’intelligence artificielle ou encore, bien entendu, le zombie et l’effet culture de masse.
Alien, le huitième passager, Ridley Scott (1979)
Bienvenue à Zombieland, Ruben Fleisher (2009)
Et aujourd’hui ?
Edward aux mains d’argent, Tim Burton (1990)
Le film de monstre peut désormais se catégoriser en 2 grandes approches ceux qui garde un je ne sais quoi de romanesque qui intègre le monstre au coeur de l’action (et pas simplement comme élément perturbateur) et ceux pour qui la peur doit être au centre du processus. Avec cette dernière, les films doivent rivaliser de tricks narratifs, de plot twist et d’image soigneusement étudiées. Cette vision écarte ainsi le monstre d’une quelconque empathie. Le monstre est clairement nuisible voire détestable. Le film répond en premier lieu, ici, au besoin primaire de ressentir la peur et son frisson.
Les poètes, quant à eux, Guillermo del Toro et Tim Burton en tête, s’attachent plutôt à rendre le monstre doué de sensibilité qui, si elle n’est pas humaine, existe bel et bien. Empreinte de la nostalgie d’un cinéma monstrueux classique, il lui oppose une sorte de tendresse envers ces monstres pas si différents finalement.
Et voilà, c’est (déjà) la rentrée ! Mais pour ne pas trop déprimer en ces temps incertains, Netflix est là pour remonter un peu le moral de chacun.
Et ici le focus va être mis sur une série Sud-Africaine (oui, oui ils font aussi des séries !…) qui s’intitule Blood & Water. Sortie en Mai 2020, cette série nous raconte l’histoire de Puleng Khumalo, une lycéenne vivant dans l’ombre de sa sœur, enlevée lorsqu’elle était bébé dans le cadre d’un trafic humain. Le premier épisode s’ouvre sur la famille Khumalo qui fête un anniversaire. On apprend rapidement que c’est l’anniversaire de Phumele – la sœur disparue – qui est célébré. Pour se changer les idées, Puleng décide de faire le mur et d’aller à une soirée d’anniversaire d’une certaine Fikile Bhele. Celle-ci partage donc la même date d’anniversaire que sa sœur disparue. Puleng nourrit alors l’espoir que cette jeune fille pourrait être sa grande sœur.
La série est plutôt adaptée pour les adolescents car on retrouve surtout des lycéens qui tentent de gérer leur jeunesse -dorée- pour la plupart d’entre eux. On peut alors y découvrir le système scolaire très anglosaxon du pays : uniformes, casiers, clubs plus ou moins “in” à intégrer au lycée etc… Par ailleurs, il peut être également intéressant d’y jeter un coup d’œil pour apercevoir quelques paysages de la côte sud-africaine et entre apercevoir les inégalités qui prennent place dans le pays sans pour autant être littéralement plongée dans la culture à 100% (cependant, on peut noter une bonne playlist d’artiste sud-africains). Certains diront qu’on y retrouve un « Elite » à la sud-africaine.
En tout cas, les jeunes acteurs sont convaincants et on a tendance à s’attacher, à se poser des questions et à vouloir aider Phumele dans sa quête de vérité, même si le scénario n’est pas toujours au top ; un peu lent par moment. Netflix a annoncé par ailleurs qu’une deuxième saison était commandée donc il n’y a plus qu’à espérer qu’ils trouveront un rythme un peu plus soutenu et qu’ils arriveront à nous surprendre.
Ce n’est pas une news incroyable que de dire que l’école et principalement le lycée est l’un des décors les plus usités dans la cinématographie japonaise. Les animés et dramas, principalement, participe de la diffusion de l’image de l’écolière japonaise revêtue de son uniforme réglementaire. Le long métrage, cependant, et surtout en prise de vue réelle n’est toutefois pas aussi enthousiaste vis à vis des jupes patineuses courtes et des longues chaussettes. On en retrouve tout de même des occurrences et notamment dans le domaine de l’animation. Films et séries partagent ainsi certaines caractéristiques de traitement “à la patte japonaise”. Le goût pour les aventures spirituelles presque magiques voire totalement surnaturelles et décalées (coucou Assassination Classroom) est, par exemple, un bon ambassadeur de cette “patte japonaise”. L’exemple le plus criant en est cependant ce contraste maîtrisé entre une violence parfois psychologique parfois clairement physique et l’esthétique soignée du pays des Geishas et de Hokusai.
Le Japon face à son histoire
L’école et surtout les interactions enfants/parents, enfants/adultes ou encore enfants/ professeur permettent de questionner le monde. Le regard jeune et (plus ou moins) innocent pointe ainsi les non dits et un système dans lequel il doit faire sa place.
L’un des thèmes qui ressort le plus de ces interactions reste l’histoire du Japon et son intégration au monde moderne. Il se retrouve ainsi de nombreux scénarios qui mettent en relief le gap grandissant entre la ville et la campagne. Les studios Ghibli en tête, les croyances animistes et le respect des traditions qui ont fait la culture japonaise sont bien souvent violemment opposées à l’appétit du monde connecté du Japon de l’endroit. Un débat toujours lié à l’actualité japonaise et à l’intégration du monde global.
Le seconde thématique à noter est les conséquences voire le traumatisme de la WW2. Vécu comme une humiliation au pays des samouraïs, la guerre fut lourde de pertes. L’occupation américaine et le tourisme de masse ne faisant qu’accentuer ainsi la crise identitaire d’un Japon entre ultra-modernité et traditions séculaires.
Bushido, émotion et collectif
L’école permet ainsi de questionner le monde comme le ferait le regard d’un enfant. Le thème du chemin initiatique n’est donc pas bien loin mais d’une façon bien spécifique. Là où au USA, c’est l’expression de soi et de sa différence qui prime, le Japon apporte ainsi une toute autre vision de l’individu et de la collectivité.
Au pays du bushido, cette initiation de jeunesse prend un tournant plus mystique. Il s’agit ici de prendre conscience de sa place dans la société et de savoir composer avec ses émotions et surtout se battre pour ce que l’on souhaite. Le pouvoir de la volonté, la gestion des émotions et le respect de la vie, voilà qui nous rappelle vaguement quelque chose.
Le jeune prend ainsi peu à peu conscience de lui même, s’affirme puis trouve sa place dans une société qui porte haut les concepts de respect, discrétion et de force tranquille.
Le cinéma à l’école japonaise c’est donc un petit concentré de Japon. La culture japonaise respectueuse et très impliquée dans sa relation à la nature et aux autres se voit ainsi mise en scène au travers des aventures de jeunes gens. Celle ci, cependant, s’oppose de plus en plus, aux films plus violents, surnaturels et de science fiction (qui ont fait son succès ne se le cachons pas) et qui dénote de l’avancée de la mondialisation au pays du contraste.
Battle Royal, Kinji Fukasaku, 2001
La Chorale, Akio Nishizawa, 2006
https://www.youtube.com/watch?v=QfYx-tOz-6A
Je peux entendre l’océan (Oceans Waves), Tomomi Mochizuki, 1993
L’école tient une place particulière dans le cinéma français. Si il figure plutôt dans le domaine du documentaire, on trouve cependant quelques fictions cultes. A l’instar du documentaire, cependant, une fiction qui prend place dans le milieu scolaire permet alors de faire ressortir une réflexion sur le social et le collectif. Les grandes questions sociales et politiques ainsi que l’actualité sont ainsi mis en exergue grâce au microcosme offert par le milieu de l’école.
L’agora
L’école c’est un lieu publique. Les enfants et ados de toutes les classes sociales sont ainsi potentiellement représentés. Ceci permet alors un brassage des points de vue et pose les bases de la vie en collectivité. Le vie en société et les questions qui en découlent sont alors expérimentée par les élèves et leurs professeurs de par le microcosme scolaire donc, d’une part, et par l’inexpérience des protagonistes, d’autre part. L’apprentissage de la chose publique ou (res publica, tmtc) par les uns à l’écran permet ainsi de questionner le politique in real life. Très franco-française, cette démarche de remise en question ne détonne pas vraiment au pays de la philosophie des Lumières et autre Résistance. Une conversation se crée alors entre l’écran et le public et permet de continuer le débat sur la place publique.
Si de grandes questions restent des sujets phares et intemporel tels que les caractéristiques de l’amour ou la classe sociale, les sujets abordés sont aussi largement reliés à l’actualité. La France ces dernières décennies, par exemple, a subit de nombreuses vagues d’émigration. Celles ci apportent ainsi leur lot de conséquences sur la scène sociale du plus positif avec le multi culturalisme au racisme le plus violent. La plus grande visibilité apportée aux communautés queer, au combat féministe … figure également un terreau fertile pour nombre de parabole cinématographique.
L’égalité des chances
L’égalité des chances est alors désormais un sujet prégnant. Les préjugés et le racisme ainsi que le fossé toujours plus grand entre les niveaux de vie sont autant de handicap scolaire et social pour les enfants et jeunes adolescents. La question des cités et des ZUP, notamment, est très souvent représentée à l’écran français. Certains profs font tout pour hisser leurs élèves, certains battent pour sortir de l’image et de l’avenir qu’on leur impose, d’autres, encore, tentent de réaliser leur rêves coûte que coûte et racontent ainsi à l’écran le débat de l’intégration.
Le sujet du harcèlement, également, et surtout depuis le développement des réseaux sociaux, est de plus en plus représenter à l’écran.
Moderne VS Anciens
L’inexpérience des enfants figure ainsi la meilleure toile pour ses paraboles filmées. Il va, tout au long du film, remettre en question ces croyances mais également ce que lui inculque ses parents. Que cette réflexion se fasse de plein gré ou non, le protagoniste s’interroge. Les institutions, ses parents, tout est matière à questionnement pour ce jeune inexpérimenté et surtout, en pleine construction de lui-même.
La lutte contre l’ordre établi est un grand sujet dans et hors écran. La jeunesse, aujourd’hui sur-connectée et aux minorités visibles, tente ainsi de se faire une place dans un monde qu’il apprend à connaître et qui, parfois, n’est que celui de son entourage.
Le décor de l’école dans le cinéma nord américain tient une place choix. Les aventures de jeunes gens en goguette est même devenu un genre à part entière : le teen movie. L’école permet alors au jeune public de s’identifier aux personnages et à l’action en cours.
On pourrait citer Easy Girl (Will Gluck, 2010), College attitude (Raja Gosnell, 1999) ou encore, l’inénarrable American Pie (Paul et Chris Weitz, 1999) et tant d’autres. Il s’agit d’autant de titres qui ont marqué l’adolescence de nombres d’adolescents américains mais aussi à travers le monde. Certains sont même devenus des classiques du teen movie mais également du cinéma US en général (cf. notre sélection au bas de cet article).
Du show et des paillettes
Le pays d’Hollywood et des Ziegfeld Girls a fait depuis longtemps sa spécialité des scènes de danses ultra chorégraphiées, des ponctuations chantées et autres comédies musicales. Le teen movie ne fait pas exception à la règle et si chaque teen movie ne comporte pas forcément de scène musicale, le show est très régulièrement au rendez vous.
L’intrigue est également souvent placé au cours de l’année de Terminale (Senior Year) ou à la suite d’un événement important dans la vie du protagoniste principal. Changement d’école, décès dans la famille, divorce des parents, choix de l’université ou encore tout simplement puberté soudaine sont autant de thèmes qui marquent le début d’une bonne intrigue teen hollywood. Le jeune se cherche. Il expérimente et surtout chante, chante et re chante ses peines, ses joies, ses sentiments…
Au pays de l’Oncle Sam, rien ne se fait dans la sobriété. La forte culture du musical hall “à l’américaine” transpire au travers des strass, des sourires ultra bright et du show must go on !
Au pays de l’American Dream
Le teen movie US est pour sa grande majorité centré sur le protagoniste principal et sa quête de lui même. Il s’agit ainsi d’une sorte de parabole bling autour de la construction et de l’acceptation de soi. Il s’agit d’une sorte de chemin initiatique donc sur les voies de l’individualité.
Le personnage principal possède une caractéristique particulière voire est parfois carrément outcast de la masse. Parfois simplement plus profond qu’il n’en a l’air (cf. Clueless), d’autre fois gay ou rebelle (cf. Breakfast Club), le teen movie pousse l’ado à s’accepter tel qu’il est et accepter les autres. Le concept d’individualité et d’affirmation de soi est ici central. La philosophie de l’American Dream en background culturel, on pousse les jeunes à expérimenter, à s’imposer et à révéler leur personnalité.
Le teen movie nord américain et plus particulièrement ceux qui prennent place à l’école sont ainsi des plaidoyers pour une culture de l’American Dream où chacun peut être qui il veut. Ils appellent donc à ne pas “Stick with the status quo” et bien de “Bop to the Top”. L’école, finalement n’est que “The start of something new”.