Coloniser l’espace. Installer des communautés aux confins de notre galaxie et des autres. Ces objectifs sont plus que jamais d’actualité. L’état de notre planète, en effet, pousse l’humanité à s’intéresser plus près que jamais à la conquête spatiale. Les gouvernements comme l’Inde et sa sonde Chandrayaan-2 ou encore l’agence privée détenue par Elon Musk, Space X, avec son rêve martien lancent des projets de plus en plus ambitieux. Il ne s’agit plus uniquement aujourd’hui d’exploration mais bien de colonisation. Si l’homme s’est toujours demandé ce qu’il y avait au delà, l’empressement autour de la question semble désormais tenir de la survie. Elle cristallise néanmoins de nombreux enjeux géo-politiques terrestres comme au temps des premiers pas sur la Lune il y a tout juste 50 ans en pleine Guerre Froide.
Ces questions bien terre à terre se retrouvent alors pour le grand public dans un regain d’intérêt pour le film de science fiction et plus précisément encore le film spatial. Gravity (A.Cuaron 2013), Prométhéus (R.Scott, 2012) ou encore Star Trek: Sans limites (J.Lin, 2016) participe de ce retour en force. Le Interstellar (2014) de Christopher Nolan, cependant, illustre à la perfection ces angoisses écologiques.
Petit point scénario : Dans un futur proche, la Terre est de moins en moins accueillante pour l’humanité qui connaît une grave crise alimentaire. Le film raconte les aventures d’un groupe d’explorateurs qui utilise une faille récemment découverte dans l’espace-temps afin de repousser les limites humaines et partir à la conquête des distances astronomiques dans un voyage interstellaire.
Film événement à sa sortie, il réunit à l’écran Matt Damon, Anne Hathaway, Matthew McConaughey et Michael Caine pour ne citer qu’eux. Nolan a-t-il ainsi réussi son pari de voyage Interstellar ?
La patte Nolan
Si le film est apparaît sur nos écrans en 2014, le projet commence en 2006 sous l’égide Steven “Grand Manitou” Spielberg. Des différences ont donc été apportées au scénario d’origine par le frère même de Nolan (lequel est scénariste et collabore de manière régulière en famille) pour coller à son univers propre. Le réalisateur d’Inception apporte alors une grande dimension reflexive au film ce qui n’est pas pour nous déplaire.
Christopher, comme à son habitude, ne nous propose pas une pièce que l’on peut ingérer simplement en la visionnant d’un trait. Un Nolan ça se digère. Si l’action suit une mise en scène rigoureuse et que l’on peut aisément séparer en différentes parties (ou actes), le rythme semble toutefois un peu sens dessus dessous. Mais, après tout, cette mise en forme fait aussi partie de sa marque de fabrique. Nolan aime en effet les scénarios alambiqués, ultra-construits et on peut dire que ses thématiques de prédilections s’y prêtent plutôt bien !
Le temps et l’espace temps, la mémoire ou encore les rêves sont autant de possibilités d’explorer le monde qui nous entoure d’une manière qui n’appartient qu’au cinéma (et l’art en général). La caméra complète ainsi le calcul scientifique et y apporte une vision plus libre dénuée des lois de la physique ou de la technologie. On interroge donc l’imagination sur la base de faits scientifiques pour déboucher sur autant de théories qu’il y a de spectateurs. La chronologie semble ainsi bouleversée et même si l’action principale trouve une signification sur la fin, beaucoup d’éléments restent flous.
Christopher, pour nous faire réfléchir (ou plutôt créer des embrouilles dans nos repas de famille), est passé maître dans le principe scénaristique du set up/ pay off ou fusil de Tchekov. Celui-ci réfère à l’homme de lettres russe et consiste à placer des éléments d’apparence anodine mais qui vont avoir un rôle par la suite (le fantôme de Murphy ou l’allusion au Plan B avant le départ en sont des exemples flagrants). Tout est donc extrêmement calculé et (cela va sans dire) extrêmement bien construit !
La bande originale de Hans Zimmer, cependant, si elle colle parfaitement à l’image a été composée sans qu’il n’ai vu le film ou lu le scénario. Cette musique industrielle très dramatique et chère à la filmographie de Nolan s’insère cependant à merveille avec ces images froides mais magnifiques à l’inspiration très 2001.
Le rapport au scientifique
Interstellar est basé sur les travaux de Kit Thorne, physicien spécialiste des trous noirs. Lequel a d’ailleurs assuré la vraisemblance de la modélisation de ces phénomènes gargantuesques. Les représentations spatiales ont d’ailleurs été mises en forme numériquement grâce aux calculs d’un mathématicien. Le scénario et ce malgré son illustre parenté ne déroge pas à sa nature, c’est à dire un scénario. Les trous de verre et autres trous noirs ont, certes, été repris dans de nombreuses oeuvres et recherches scientifiques, ils demeurent encore largement au stade de la théorie voire de la mythologie.
L’univers et ses dynamiques restent encore un grand mystère. La caméra et autres modélisations permettent ainsi d’interroger le monde qui nous entoure sans limites scientifiques et d’imaginer les scénarios les plus fous (que, parfois, même la science n’effleure qu’à peine).
Interstellar, comme beaucoup de films avant lui, tente ainsi de démêler voire d’expliquer l’inexplicable. Qu’elle soit basée sur des faits scientifiques ou de la fiction pure, la SF tente de comprendre l’univers et notre place dans celui ci.
Mais après tout, est ce que ce qui nous fascine tant n’est pas justement ce flou, cette zone d’ombre qui nous pousse à imaginer et à créer des technologies toujours plus sophistiquée. Est ce que, finalement, “certains mystères (ne) sont (ils) parfois fait (que) pour rester des mystères” (J.Cooper/M.McConaughey) ?
Parabole écologique
Interstellar est cependant et avant tout une belle parabole autour de l’écologie et de l’exploration spatiale, de ce qui fait de nous une espèce, l’amour tout ça tout ça.
Le premier acte même semble ainsi nous crier : Attention ! Ceci pourrait être notre avenir !
La Terre après nous avoir permis de nous (sur)développer pourrait en effet se retourner contre nous après toutes les tortures industrielles que nous lui avons fait subir. La Nature bienfaitrice se ferai crise alimentaire et tempête de poussière. Notre expansion technologique qui est aujourd’hui la base de nombre de sociétés serait alors stoppée par l’obligation pour beaucoup de devenir cultivateurs et tenter de nourrir une population moribonde.
Une allusion politique se glisse alors au milieu de ce monde devenu chaotique: le principe du bien commun comme fil rouge sociétal.
“On n’a plus besoin d’ingénieurs aujourd’hui..”, c’est sur cette réplique que les professeurs décident qui poursuivra ses études ou non. La population se meurent comment peut on encourager des enfants à croire en leurs rêves égoïstes d’astronomes ?! Sauver l’humanité grâce à la recherche scientifique ? Foutaises ! D’ailleurs les manuels de physiques sont enfin corrigés. Les US ne sont jamais allés sur la Lune voyons ! Il s’agit d’une pure machination en contexte de Guerre Froide. Il faut être stupide pour l’avoir cru. Le confort des uns passe ainsi au service du “bien commun” ou, plutôt ici, le “bien de l’espèce humaine”. Un discours qui n’est pas sans rappeler les oeuvres d’Orwell 1984 et La Ferme des Animaux mais qui interroge notre nature d’animal grégaire.
Interstellar s’inscrit donc parfaitement dans la filmographie de Christopher Nolan. Un scénario à l’architecture ciselée, des images impressionnantes et un bulldozer sonore en guise de bande son figurent son cocktail favori pour nous faire cogiter. Nolan, à l’image d’un certain Kubrick (avec tout de même plus d’indices) laisse une grande place à l’interprétation. Voyages interstellaires, vie extraterrestre voire expérience d’EMI, les théories les plus folles sont ouvertes par les fans qui, peut être n’y sont pas du tout… ou ont tapé dans le mille ?
Enfin ! Ce mercredi 14 août sortait sur nos écrans le 9e film de Quentin Tarantino : Once Upon a Time in Hollywood !
Fan inconditionnel ou intrigué par le fantastique déploiement de communication, c’est l’un des événements les plus attendus de l’année. Les raisons de cette émotion presque religieuse depuis son avant première à Cannes est non seulement dûe à son pedigree tarantinesque mais aussi (et surtout) à un casting certifié platine composé presque exclusivement de grands noms tel que Margot Robbie, Al Pacino ou encore la fille d’Uma Thurman: Maya Thurman – Hawke. C’est aussi et surtout les retrouvailles à l’écran (et en lead role s’il vous plaît) des monstres sacrés : Leonardo Dicaprio et Brad Pitt ! Rien que cela. Il n’en fallait pas moins qu’une armée de stars pour nous plonger au coeur du royaume aux 1000 projecteurs !
Petit point scénario : En 1969, Rick Dalton et le cascadeur Cliff Booth, sa doublure de longue date, poursuivent leurs carrières au sein d’une industrie qu’ils ne reconnaissent plus.
Oeuvre cosmique ? Ramassis de guest star sans intérêt ? Que vaut le dernier long métrage du réalisateur de Pulp Fiction et Inglorious Basterds ?
Arrêt sur image
OUATIH c’est avant tout un cadre spatio-temporel du tonnerre ! Hollywood dans son Golden Age ou comment mettre en place un véritable appât pour cinéphile de tout poil (et plume ne soyons pas raciste). On le sait, cinéphile, Quentin l’est jusqu’au plus petit travelling. Il distille sa nostalgie version 35mm à coups de références plus ou moins visibles pour le commun des mortels. Ses films sont d’ailleurs souvent construits en hommage à ces oeuvres qui ont marqué le 7e art.
Once Upon a Time … in Hollywood nous plonge donc dans un scénario méta au coeur des studios et des tensions de l’industrie pelliculaire elle même. On y découvre des acteurs aux dents longues mais à l’ego fragile, les joies du copinage business et autres villas insouciantes. Les films tournés sur le plateau face caméra eux mêmes (les films dans le film, vous suivez ?) traitent du manichéen western cher au coeur de l’Amérique et s’y retrouve également la bagarre US/ Rome pour le plus cool des lonesome cow boy. L’immersion est également grandement aidée par l’un des piliers de cet époque: la musique. Quentin nous régale alors comme à son habitude d’une BO de folie composée des plus grands titres des années hippies.
Tarantino cristallise alors plus qu’une époque, une industrie, un mythe et son Olympe au plus fort de son influence.
De l’autre côté du miroir
C’est toutefois un arrêt sur image du style clair obscur que nous livre Quentin. Hollywood est certes un royaume mais comme tout royaume, la réalité n’est pas que châteaux, paillettes et champagne. Le faste d’Hollywood se ressent aussi par ses excès et son côté sombre. L’alcoolisme, la drogue et les (très jeunes) filles faciles, l’immunité judiciaire sous entendue et les caprices sont autant d’éléments qui placent Hollywood comme hors du monde réel. Le titre même “Once upon a time” (n.b: Il était une fois pour les non anglophones) plante le décor. Ce long métrage est ainsi tant un hommage qu’une critique du mythe hollywoodien.
Sharon Tate (Margot Robbie) a beau être riche, belle et mariée à Roman Polanski, elle n’est pas reconnue par les guichetiers du cinéma où elle souhaite voir sa propre apparition à l’écran. Rick Dalton (Leonardo Dicaprio) est, certes, une star reconnue mais est incertain, instable, alcoolique et fragile. Tout n’est pas si rose au pays de l’American Dream.
Cette tension entre le mythe et la réalité est également illustrée par le grand intérêt pour les ragots et autres faits divers hollywoodiens. Des drames s’y passent comme partout mais ils suscitent de par la célébrité de leur protagonistes une obsession pour le commun des mortels qui tient de l’épisode de GoT. Ces drames deviennent alors des synopsis ultra violents qui passionnent le public en salle sous de légers relents morbides comme un roman d’horreur ou un polar. Ce n’est d’ailleurs pas une coïncidence si Quentin choisit de faire coïncider la date de sortie de son 9e film avec les 50 ans des meurtres de la Manson family.
Le business du Diable
“Nous avons tous grandi en regardant la télé.Allons tuer ceux qui nous ont appris à tuer ! Ils sont là comme des porcs dans leurs villas !” s’écrit une des jeunes disciples de Charlie devant Cielo Drive. Le 9 août 1969, en effet, (au moment de l’action de OUATIH donc) Susan Atkins et d’autres disciples de Charles Manson s’introduisent au 10050 Cielo Drive, la résidence de Roman Polanski et tuent tous ceux qui s’y trouvent dont Sharon Tate, actrice et épouse enceinte du réalisateur de Rosmary’s Baby. Le lendemain ce seront les époux LaBianca. L’émotion est palpable face à ce crime d’une violence extrême. Sharon Tate aurait reçu pas moins de 16 coups de couteaux !
On avance rapidement que Charles Manson souhaitait se venger d’un producteur de musique célèbre qui lui aurait refusé l’entrée du royaume des projecteurs mais celui ci aurait déménagé avant les faits sans que Manson n’en soit informé. Cette vengeance n’a cependant pas totalement échoué puisque ce sont tout de même des stars de l’époque qui en ont fait les frais. Plus qu’un fait personnel, celle ci devient un symbole. Susan, Tex, Charlie et leur famille figurent alors le “Diable venu faire le travail du Diable” et fissurent à jamais l’idéal hollywoodien.
Cinquante ans plus tard, il ne s’agit plus d’un simple fait divers. Manson est resté un symbole fort dans la (pop) culture américaine mais aussi mondiale. Son image ou simplement son nom sont très souvent utilisés comme symbole d’horreur et du mal incarné.
Il est vrai que Cielo Drive arrive à la fin des années 60’s, période d’insouciance, de libérations en tous genres et de l’amour universel. Cet événement figure alors un véritable basculement de la culture hippie en quelque chose de beaucoup plus sombre.
Les tueurs en séries et leurs méfaits vont par la suite faire l’objet d’une grande médiatisation voire d’une certaine fascination par le grand public. Il va alors s’ensuivre une vague de crimes odieux parmi les plus célèbres comme, par exemple ceux d’Edmund Kemper. Le FBI commence même à s’intéresser à ses tueurs d’un genre “nouveau” et crée le premier département d’étude du comportement comme retracé dans la très (très très très) bonne série Mindhunter.
Quentin Tarantino dresse donc avec ce Once upon a time in Hollywood, malgré (ou grâce à) l’exubérance qu’on lui connaît un tableau du mythe hollywoodien plus ancré dans la réalité qu’il n’y paraît. C’est un regard critique sur le faste d’Hollywood et ses pendants que l’on peut y analyser à la manière d’un Lalaland (Damien Chazelle, 2017) ou d’un A star is born version Cukor avec le trashy en plus. C’est ainsi une sorte de mise en garde jouissive et colorée contre la lumière des projecteurs qui érigent en “icône mythologique” des personnages tel que Manson.
“Les fous, les marginaux, les rebelles, les anticonformistes, les dissidents… tous ceux qui voient les choses différemment, qui ne respectent pas les règles. Vous pouvez les admirer ou les désapprouver, les glorifier ou les dénigrer. Mais vous ne pouvez pas les ignorer. Car ils changent les choses. Ils inventent, ils imaginent, ils explorent. Ils créent, ils inspirent. Ils font avancer l’humanité. Là où certains ne voient que folie, nous voyons du génie. Car seuls ceux qui sont assez fous pour penser qu’ils peuvent changer le monde y parviennent”.
Vous aurez reconnu la plume de l’icône américaine Jack Kerouac. Son oeuvre cultissime Sur la Route, éditée en 1957, fut érigée au fil du temps en une véritable Bible pour jeune barbu réfractaire. Elle est surtout l’une des premières à conceptualiser ce mode de vie qui prône la liberté par dessus tout.
Si une adaptation filmique fut en discussion pendant de nombreuses années. C’est finalement Walter Salles qui présente au Festival de Cannes de 2012 ce road trip existentiel.
Petit point scénario : Au lendemain de la mort de son père, Sal Paradise, apprenti écrivain new yorkais, rencontre Dean Moriarty, jeune ex-taulard au charme ravageur, marié à la très libre et très séduisante Marylou. Entre Sal et Dean, l’entente est immédiate et fusionnelle. Décidés à ne pas se laisser enfermer dans une vie trop étriquée, les deux amis rompent leurs attaches et prennent la route avec Marylou. Assoiffés de liberté, les trois jeunes gens partent à la rencontre du monde, des autres et d’eux-mêmes.
De la page à l’écran, il y a de nombreux pas et travellings. Alors, Walter Salles a-t-il réussi à nous emmener sur la route ?
. La Beat generation
Sur la Route fait figure depuis sa parution de classique au même titre que Les portes de la perception d’Aldous Huxley (1954). Classique dont l’on vous recommande la lecture d’ailleurs.
“Les nouveaux hipsters américains”, comme les nomment Kerouac, ou “Beat” apparaissent, en effet, à la fin des 50’s et révolutionnent notre approche existentielle. L’auteur les définit ainsi dans une interview comme ceux qui ont dépassé le stade des plaisirs charnels et qui s’intéressent maintenant à Dieu et aux Visions sacrées.
Sur la Route raconte alors à la première personne les aventures de Sal Paradise sur les routes d’Amérique. On y croise des lieux, des personnages hauts en couleur et des situations rocambolesques voire fantasmagoriques. Attention toutefois, en 2007, Viking Press publie The Original Scroll, le manuscrit originel et non sectionné. Des épisodes ainsi que le nom de certains personnages diffèrent alors de l’édition originale. A lecteur averti. On retrouve ainsi le fameux Neal Cassady ou Dean Moriarty dans le roman originel, Allan Ginsberg (Carlo Marx) et William Burroughs (Old Bull Lee).
Le mouvement Beat ne se revendique cependant pas en tant que genre littéraire. Les écrivains du cercle de Kerouac et ceux qui s’en réclame par la suite, s’ils partagent un goût pour la prose spontanée et le surréalisme ont tous des façons d’écrire qui ne se ressemblent pas.
C’est ainsi cette spontanéité et ce goût du fantasme qui caractérise Sur la Route et ses descendants. L’idée du mouvement est ici centrale. In a nutshell : “Tout faire à fond ou pas du tout. De toute façon, on n’en sortira pas vivant”.
. Le sens du courant
Au temps de la surconsommation, il ne s’agit alors plus de trouver un bon parti, un bon travail et suivre le flot. L’urgence est ailleurs. A contre courant.
La route est alors un voyage tant physique qu’intérieur. Ce que l’on recherche c’est quel sens donner à sa vie. Ce que l’on raconte ainsi ce sont des jeunes perdus, écorchés par la vie qui ne se reconnaissent pas dans le système que l’on veut leur imposer. Ils opposent alors à ce fameux système mortifère un véritable ouragan d’énergie et d’inspiration artistique. L’important est de vivre l’instant et uniquement celui ci. Une philosophie qui se veut alors déchaînée et libre de toute emprise du passé et (presque) de l’avenir. Tout tenter, tout voir et danser comme flamme au vent et ainsi contrer la mort, l’oubli et surtout l’ennui.
Cette urgence et cette énergie caractéristiques, on ne les retrouve malheureusement pas dans le film de Walter Salles. Aurait il eu tant peur de l’oeuvre et de sa célébrité qu’il en aurait oublié le sens premier ?
. De la plume à l’écran
Beaucoup de cinéastes s’était intéressés à l’oeuvre de Kerouac avant 2012…et s’y était cassé les dents. Francis Ford Coppola, par exemple, en avait acheté les droits mais ne tournera jamais le film. Il n’est pas chose aisée, en effet, de se frotter à une oeuvre d’une ampleur. On le sait.
Walter Salles comme directeur avait pourtant de quoi constituer une belle promesse. On lui doit notamment la réalisation du biopic autour de Ernesto “Che” Guevara en 2004 avec Diario de motocicleta (Carnets de voyage en français). Le long métrage Sur la Route est cependant décevant. On y retrouve l’idée de mouvement. Mais il s’agit surtout ici de passer d’une scène à une autre sans vraiment de fil conducteur et surtout surtout surtout sans cette énergie qui est (rappelons le) au coeur de la philosophie Beatnik ! Tous les détails sont ainsi très convenus, classiques. On suit le scénario sans un travelling de travers et c’est tout. Le timecode finit presque par transpirer l’ennui auquel souhaite tant échapper Sal, Dean et leurs amis. Les choix scénaristiques se concentre ainsi sur la relation Dean/ Sal et en oublie presque la route et sa quête de sens. La performance de Kirsten Stewart en une Marylou délurée lucide est à saluer cependant. On en oublierai presque la faussement dépressive Bella de la franchise Twilight.
Si l’adaptation de la Bible Beat par Walter Salles n’a pas de quoi faire pleurer dans les chaumières, il n’en reste pas moins un bon récit. Le réalisateur met en scène ici plus un carnet de voyage et perd quelque peu l’essence de vie qui a fait l’oeuvre. C’est toutefois une bonne entrée en matière pour qui n’a pas lu le livre et/ou souhaite s’évader en découvrant cet univers. Une scène surtout retient notre attention. Celle ci prend place au coeur d’une soirée de Nouvel An. Marylou et Dean dansent en une sorte de transe. On ne sait d’ailleurs plus si ils dansent ou s’ils brûlent sur place.
Robert Rodriguez et Quentin Tarantino sont mondialement reconnus pour leur patte respective souvent copiée, jamais égalée. Les deux réalisateurs, en effet, partagent un goût certain pour les couleurs qui flashent, les combats sanglants et une nostalgie cinéphilique. Amis dans la vie, ils sortent en 2007 leur double programme: Grindhouse. Celui-ci est composé des long métrages, Death Proof (ou Boulevard de la Mort pour les francophones) et Planet Terror. Ces deux là, bien que pièce d’un ensemble plus large, sont construits de sorte qu’ils se visionnent aussi bien ensemble (et c’est ce que l’on vous recommande) qu’ indépendamment l’un de l’autre.
Death Proof est donc non seulement une pièce du puzzle mais aussi la vision personnelle du Grindhouse par Tarantino. Il s’agit donc bien du 6e film de Quentin et en cela est une oeuvre à part entière.
Petit point scénario avant toute chose: C’est à la tombée du jour que Jungle Julia, la DJ la plus sexy d’Austin, peut enfin se détendre avec ses meilleures copines, Shanna et Arlene. Ce trio infernal, qui vit la nuit, attire les regards dans tous les bars et dancings du Texas. Mais l’attention dont ces trois jeunes femmes sont l’objet n’est pas forcément innocente.
. Grindhouse… quoi ?
Le Grindhouse c’est plus qu’un genre, c’est un univers visuel complet avec ses (quelques) codes et une façon de raconter des histoires sans commune mesure.
Death Proof fait donc partie du diptyque Grindhouse avec le survolté Planet Terror de Robert Rodriguez. Sang, sexe, drogue et gros calibres sont au rendez vous. Ce qui caractérise surtout le Grindhouse c’est cette manière de ne surtout pas se prendre au sérieux. L’étalage impressionnant de seins, pus et autres joyeusetés défile alors à l’écran avec une auto dérision non voilée. On remarquera également (en même temps, il est très difficile de rater ça), l’amour presque obsessionnel des CGI et autres cascades grandioses. Tout ceci se mêle dans une esthétique aux accents vintages 50’s et rend un tout surréaliste et incroyablement visuel. Le Grindhouse possède également ses sujets de prédilection à savoir notamment horreur, thriller et slasher le tout parsemés de relents western.
Si ce double programme pose les bases du Grindhouse moderne, le phénomène ne date cependant pas d’hier. Le point de départ, en effet, est le “film d’exploitation” des années 50/60’s. Ceux ci sont un tel déchaînement de violence qu’ils ne peuvent être diffusés au sein des réseaux habituels. Le faible budget de leur production également ne les aident pas à se créer une place sur le devant de l’affiche. Ils sont alors distribués dans des théâtres sur la scène desquels se produisait les spectacles de bump’n’grind. C’est d’ailleurs de ceux ci que viendra le nom des ces salles d’un genre nouveau: les Grindhouses. Ces films ont ainsi inspiré toute une génération de cinéastes.
. La patte de Tarantino
Death Proof, si il s’insère dans l’univers Grindhouse ainsi que dans le dyptique éponyme de 2007 reste avant tout une oeuvre estampillée Tarantino. Il contient en effet tous les ingrédients de la recette tarantinesque, de même que Planet Terror et Robert, fan de comics, Rodriguez. Chaque plan est minutieusement travaillé et on ressent fortement l’influence des films de l’âge d’or.
De nombreuses références sont d’ailleurs disséminées à l’écran par Quentin comme à son habitude. Les voitures notamment font l’objet d’une attention toute particulière et renvoient à de grands moments de cinéma mais également aux précédentes oeuvres du réalisateur. On peut apercevoir ainsi un autocollant “Pussy Wagon” sur le pare choc de la voiture sur laquelle Lee s’adosse en attendant que ses amies finissent les courses. La plaque de Mike, également, qui au début du film affiche JJZ 109 reprend celle de Steeve MCQueen dans Bullitt (Peter Yates, 1969).
. Le Grand Frisson
La voiture possède une place à part dans l’univers de Tarantino mais également du Grindhouse. Elle est vu presque comme un élément à part entière du casting voire une extension des personnages qui en sont propriétaires. L’amour de la vitesse est d’ailleurs une caractéristique répandue parmi les personnages Grindhouse.
La route permet aussi d’insérer les personnages et l’action dans la mythologie du héros à la manière du mercenaire des westerns d’antan.
La route est ainsi la voie de la liberté laquelle permet un déchaînement cathartique et la recherche du Grand Frisson. Elle est d’ailleurs à la base du scénario de Death Proof puisque le point de départ de ce dernier est (justement) un départ en road trip entre amies.
. Bagnole, bain de sang et féminisme
Une telle explosion de violence, trips et boyaux est bien sûr cathartique. Il permet surtout la dénonciation. Les traits des personnages et les situations sont, en effet, étirés au maximum afin d’en démontrer le ridicule. Ce que Death Proof met en ainsi en lumière, c’est la libération des femmes et le spectre de l’homme qui reste tout de même au dessus d’elles.
Les jeunes filles, si elles sont (très) sexualisées, restent toutefois maîtresses de leur corps et de leurs envies. Elles aiment aussi les grosses bagnoles et n’hésitent pas à jouer de leurs charmes pour amadouer la gente masculine.
Death Proof est ainsi représentatif de l’esprit Grindhouse tant dans son univers narratif que dans sa construction visuelle. Il trouve également complètement sa juste place au sein de la filmographie de Quentin Tarantino. Une bande originale cultissime achève de faire de ce film un indispensable. Si le double programme fut un échec commercial, son impact continue de se faire sentir sur la route de la cinéphilie.
Pour ceux qui souhaitent aller plus loin dans la découverte de cet univers explosif:
La recherche du bonheur. L’Illumination. Vaste sujet. Cette problématique emmène son lot de questionnements douteux et de phrases bateaux.
La route de l’initiation est toutefois largement représentée au cinéma et dans la littérature. Cette thématique figure ainsi un genre à part entière au sein de laquelle la route devient le symbole du chemin vers le sens de la vie.
Le Little Buddha de Bernardo Bertolucci (1993) et Hector et la recherche du bonheur de Peter Chelsom (2014) réussissent cependant à explorer le thème de façon légère et sans (trop) de clichés.
Commençons par un petit point scénario: Hector est un psychiatre londonien à la vie bien ordonnée et sans remous. Il s’enfonce cependant petit à petit dans une profonde crise existentielle : qu’est ce que le bonheur ? Suis – je heureux ? Et sinon, comment l’atteindre ? Il part alors sur la route afin de trouver des réponses et (pourquoi pas ?) l’épiphanie tant souhaitée. Notons qu’il s’agit bien de l’adaptation du roman éponyme de François Lelord paru en 2002.
Little Buddha, quant à lui prend les traits de Jesse, petit garçon américain qui serait la réincarnation d’un grand maître bouddhiste. Un vieux moine le prend alors sous son aile et le guide sur les voies du Buddha à travers les aventures du prince Siddhartha.
Leurs castings respectifs sont plutôt réussi avec, notamment, Simon Pegg (Shaun of the Dead) dans le rôle d’Hector pour l’un et Keanu Reeves (Matrix, John Wick..) pour l’autre. Des compagnons de routes 4 étoiles pour un voyage inspirant au cours duquel la route se fait véritable chemin initiatique voire fantasmagorique.
L’élèv(ation)
Les deux oeuvres permettent ici une vraie identification au personnage principal. L’élève est aussi et surtout le spectateur après tout. Si elle est assez évidente pour Hector,Jesse cristallise également une vision certaine du spectateur.
L’aventure d’Hector c’est un peu celle de Mr. Tout le monde finalement. C’est en cela que réside son essence “good vibes”. Qui ne s’est jamais interrogé sur le sens de sa vie ? Et surtout qui n’a jamais souhaité tout quitter pour partir à l’aventure ?
On se reconnaît donc très facilement en Hector, bien dans sa vie où rien ne manque sinon l’essentiel, la spontanéité. Une crise du “où vais je ? Dans quel état j’erre ?” que tout le monde traverse un jour ou l’autre.
Jesse, quant à lui, symbolise plutôt l’Homme au début de sa quête de sens. L’individu ordinaire est alors un enfant à qui il faut enseigner les grands préceptes du monde.
De l’art de vivre
L’art tient également une grande place dans le processus initiatique. Il permet, en effet, de visualiser, imager et interpréter l’enseignement qui est alors dispensé au cours de la (ou les) leçons.
Hector, par exemple, emporte avec lui un petit carnet dans lequel il consigne ce qu’il tire de ses péripéties. La route et ses étapes se mêlent au dessin et autres réflexions à la manière du carnet de voyage ou plutôt d’un journal pas si intime. Ce voyage se fait alors tant physique que spirituel. Partir à la recherche du bonheur serait donc partir en quête de qui l’on est et de ce que l’on souhaite. L’apparition d’Hector enfant à plusieurs reprises puis de celui-ci se changeant en homme adulte participe de cette dynamique. Le dessin apporte alors une dimension onirique et mystique à cette aventure.
Jesse, notre little Buddha, lui use de la littérature bouddhiste et notamment des légendes autour de la naissance de cette religion. Le conte est d’ailleurs utilisé dans ses fonctions d’enseignement dès les premières scènes du film ! Le principe du film d’initiation, lui même, est d’ailleurs construit en ce sens rappelons le.
Qu’il soit oral, écrit ou dessiné, la narration est alors présenté comme le moyen privilégié d’illustrer ces leçons de vie.
Eclaircissements
Si les deux oeuvres traitent le même sujet à savoir l’initiation, leur moralité n’est pas tout à fait la même. Ils empruntent cependant tous les deux le même outil, à savoir le voyage donc la Route dans tous ses sens. Elle est, en effet, le chemin physique en ce que chacun des personnages sort de sa zone de confort et part vers le vaste monde. Elle symbolise également le concept légendaire du voyage intérieur.
Hector recherche toutefois un sens à donner à sa vie terrestre actuelle tandis que Jesse se voit offrir une Illumination plus complexe à base de réincarnation. Deux versions qui se rejoignent autour d’une grande question: comment être pleinement vivant. Deux aventures qui se complètent en somme.
La recherche de l’Illumination est donc un thème largement exploré au cinéma. Marqué par les problématiques de chaque époques, le message distillé, si il est toujours plus ou moins le même en substance s’adapte. L’avancée de la cause écologique voit fleurir ses dernières années quantité de retours à la nature sauvage à l’image de Into the Wild (Sean Penn, 2007). Little Buddha et Hector et la recherche du bonheur traitent principalement de l’homme face à son propre mysticisme dans une société toujours plus mondialisée. On notera toutefois que si Little Buddha a reçu la Caméra d’or de Berlin en 1994, Hector peine à se détacher du lot (assez impressionnant) d’oeuvres initiatiques.
“En faisant ce film, je voulais rappeler des choses qui ont fait mes films mais aussi les remettre au présent” .
Le 29 mars 2019, Agnès Varda s’éteint à Paris. Une vague d’émotion soulève le monde culturel. L’ouverture du festival de Cannes 2019 sera d’ailleurs l’occasion de lui rendre un hommage en grande pompe avec le discours d’Edouard Baer et le (très beau) “Sans toi”, tiré de la BO de Cléo de 5 à 7 (1962) interprété par Angèle.
Agnès Varda c’était une artiste prolifiquement curieuse. Agnès Varda c’était une figure de la Nouvelle Vague française. L’une des seules féminines d’ailleurs.
Agnès Varda c’était avant tout Agnès. Accessible. Indubitablement moderne. Libre.
Son dernier film, Varda par Agnès (2019), fut disponible sur Youtube via la chaîne Arte cinéma suite à sa disparition. Autoportrait en forme de travelling documentaire discontinu, Agnès explore la Mémoire(s) de Varda comme une dernière masterclass.
L’influence de la nouvelle vague
Agnès commence sa carrière en tant que photographe avant de se lancer dans le cinéma un peu comme ça, au hasard de sa curiosité. Elle réalise alors son premier long métrage, en 1955, La pointe courte et, déjà, les traits de son style bien à elle se font sentir.
L’influence de son époque tout d’abord. Il s’agit, en effet, des débuts de la période “hippy” et surtout, surtout, de la Nouvelle Vague. Période mouvementée s’il en est.
Elle fut la femme de Jacques Demy et amie de Godard et Jim Morrison. Son oeuvre tant cinématographique que plastique et photographique est imprégnée de ces influences et de ce rapport au monde si caractéristique.
Varda par Agnès ne fait pas exception. On retrouve la très grande importance accordée au montage mais aussi à la couleur, à la musique et la diction. Le film n’est plus seulement un conte narratif, mime d’une quelconque réalité. C’est une oeuvre complète tant au niveau de sa narration que de son identité visuelle ou musicale.
Elle teste. Elle invente. Elle s’amuse avec la caméra et le spectateur comme, par exemple, avec son “fondu à la couleur” (parce qu’après tout pourquoi n’aurions nous que des “fondus au noir” ?)
Exploratrice du regard
Agnès Varda est avant tout une très très bonne documentariste. Le mouvement des Blacks Panthers, le combat pour l’avortement ou encore la Guerre du Vietnam (1955-1975) sont passés devant son objectif.
Elle filmera néanmoins en priorité ce qui se trouve près d’elle. Le quotidien, les gens et les lieux qu’elle connaît. Elle recherche principalement ceux qu’elle appelle “les vrais gens”. Ces personnes, ces lieux et ces situations de tous les jours qui lorsque l’on y accorde un regard révèlent tant. C’est ainsi le regard que nous portons aux choses du monde qui interroge Agnès.
Ce n’est donc pas un documentaire au sujet d’elle même que nous livre la réalisatrice. Il s’agit là, en effet, beaucoup plus d’une balade, au gré de sa mémoire, certes, mais également de ses idées. C’est une réelle causerie entre Agnès et l’objectif, son vieil ami, support d’un regard magnifié.
Le regard ne devient cependant oeuvre qu’une fois réfléchi et travaillé. Notre inconscient est ainsi le filtre premier ; au cinéma, c’est le montage.
“Je signe tout mes montages.(…) C’est la vraie écriture au cinéma”, déclare Agnès à Léa Salamé pour l’émission Stupéfiant ! Fidèle à ses premiers amours cinématographiques, elle use et s’amuse du montage pour créer le discours mais aussi et surtout l’émotion souhaitée. Le montage devient ainsi le principe de notre imaginaire qui se superpose à l’image perçue par la caméra ou l’oeil. La causerie/mémoires de Varda par Agnès ne déroge pas à la règle et nous propose une pérégrination aux côtés de ce et ceux qui l’ont inspiré.
Paysage mental
Varda par Agnès trouve ainsi sa place au sein de son oeuvre complète en ce qu’il regroupe ses inspirations mais aussi ses réflexions et confessions. C’est un véritable journal intime artistique qu’elle nous dévoile. Il est à remarquer, par ailleurs que Varda aime à distiller des bribes d’Agnès au sein de ses productions en général, à divers degrés.
Les deux causeries, ici, revêtent cependant un caractère plus intime. Agnès revient sur ce qui a fait Varda. Dates, lieux, personnes, réflexions, tout est présent dans ce carnet de croquis qui se transforme au fil de la timeline en un carnet de voyage coloré et bien rempli.
“Si on ouvre les gens, on trouverait des paysages. Si on m’ouvrait, on trouverait des plages”, s’amuse Agnès, dans sa chaise de direction, face à la mer.
Une sociologie de l’imaginaire
Varda par Agnès c’est donc une entrée dans la réflexion de Varda presque comme une masterclass. Le déroulement et les choix autour du film viennent ainsi illustrer les confessions contées et rythment la balade.
Cette réflexion autour du cinématographe mais encore plus autour de l’art et du regard font de son oeuvre entière un recueil ludique et presque sociologique.
La question de l’image, notamment, est au centre du discours et permet ainsi d’appuyer le rapport entre image et imaginaire. Elle interroge ainsi tant ce que l’on voit que notre perception du réel et surtout sa hiérarchisation.
Pourquoi prête t on plus attention à certaines choses ?
Qu’est ce qui fait que je ressente cela à la vue de ceci ?
Pourquoi cela est il comme cela ? Ne pourrait il pas être comme ceci ?
Elle insiste principalement et surtout sur “(l’importance) de filmer des choses que l’on ne comprend pas. Parce que même au cinéma, c’est important de sentir, d’éprouver”.
Il est très compliqué d’écrire à propos d’Agnès Varda, autant l’oeuvre que le personnage. Outre l’émotion de son décès, encore trop récent, Agnès c’est une oeuvre plutôt conséquente. Elle fut prolifique autant en quantité qu’en qualité. Son travail fut comme sa vie divers et ludique. Il est surtout accessible et ouvert à la réflexion face à notre perception individuelle. Celle ci en retire alors ce qui lui plaira comme un miroir. Un journal intime collectif et pour tous.
“C’est comme cela que je finis cette causerie. Je disparais dans le flou. Je vous quitte.”
Voilà. Agnès a finit sa causerie. Elle s’enfonce dans la brume. Elle part vers on ne sait où. C’est fini.